Amid Faljaoui
Une première voiture électrique à 10 000 euros
Le monde change et il faut faire un saut jusqu’à Shanghai pour s’en rendre compte de manière encore plus vive.
Pourquoi Shanghai ? Mais parce que c’est là-bas que le salon de l’automobile chinois ferme ses portes. Mes confrères du Figaro nous disent que les visiteurs de ce salon ont pu voir 100 constructeurs alignés sur les « starting blocks » avec 150 nouveaux modèles, dont la plupart sont électriques.
Je vous en parle, parce que nous avons tous une mémoire de poisson rouge. Il n’y a pas si longtemps, autant les constructeurs japonais et sud-coréens ont réussi à imposer leurs marques (Toyota, Nissan ou Kia), autant il était encore impensable pour un citoyen européen d’imaginer rouler au volant d’une voiture Made in China. C’est simple, il fut une époque où les spécialistes du secteur automobile qui prenait la parole sur le sujet posaient la même question à leur auditoire : « vous montez sans inquiétude dans un ascenseur japonais. Monteriez-vous avec la même tranquillité d’esprit dans un ascenseur chinois ? ». Evidemment la salle disait non. Mais cette anecdote n’est plus qu’une mauvaise blague, un mauvais souvenir.
Les dernières statistiques montrent que la Chine va bientôt devenir le premier exportateur mondial de voitures. La Chine est en train de dépasser même l’Allemagne et va essayer de détrôner le Japon qui reste encore le premier exportateur de voitures au monde, mais plus pour longtemps selon les spécialistes. A cause de quoi ? Mais de la voiture électrique. La preuve, c’est que 40% des acheteurs américains de la marque Tesla achetaient avant des voitures japonaises. Et la faute de ce désistement en incombe aux Japonais qui ont pris du retard sur l’électrique. Dans le classement des fabricants de voitures électriques, le Japon est à la traine. Honda est 43e, Toyota 51e et Nissan 60e. C’est dramatique pour l’industrie automobile japonaise qui avait réussi à conquérir le marché américain et européen et qui se laisse manger tout cru par son rival chinois. N’oublions pas que la moitié des Tesla fabriquée dans le monde le sont en Chine, et que des marques connues comme Volvo appartiennent en réalité à des marques chinoises comme Geely. Et je ne parle même des marques chinoises à 100% comme BYD qui sont en train d’envahir l’Europe.
Justement, sur notre continent, les constructeurs sont pris en étau. Elon Musk a décidé de lancer une guerre des prix en Europe. Il a déjà baissé son modèle Tesla Y de 30% en 3 mois. Il perd de la marge, mais il s’en fout, car elle reste plus élevée que celle de ses concurrents. Ce qu’il veut, c’est tuer ses concurrents. A côté de ce concurrent redoutable, les constructeurs automobiles européens doivent aussi lutter contre la déferlante chinoise et notamment la marque BYD qui a proposé cette semaine au salon de Shanghai une automobile électrique à… 10.000 euros.
Donc oui, la transition énergétique est plus que nécessaire. On va y arriver, mais faute de pouvoir d’achat, nos concitoyens risquent de rouler en Tesla, une marque américaine ou dans une voiture chinoise. Au final, l’Europe est à nouveau mal prise. Elle s’est offerte, une fois de plus, mais sans exiger de contrepartie. Il y a quelques années, j’ai interviewé Alain Minc. Il me disait qu’il fallait faire attention que l’Europe ne devienne pas un musée visité par les classes moyennes chinoises. C’est fou comme sa déclaration semble aujourd’hui tellement prémonitoire.
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