Hier, dès le lundi matin, les marchés ont fait la fête. Oui, la fête. Comme s’ils avaient reçu un carton d’invitation pour un mariage royal. Les États-Unis et la Chine ont annoncé une trêve dans leur guerre commerciale. Résultat : Tesla a repris 65 milliards en capitalisation, le dollar a grimpé, l’or dégringolé, et les traders ont appuyé sur le bouton “acheter” comme s’il n’y avait jamais eu de guerre commerciale.
Et pourtant… ce n’est pas un traité de paix. C’est une pause. Une pause de 90 jours. Trois petits mois pour voir si Washington et Pékin peuvent faire semblant de s’entendre. C’est un peu comme si deux boxeurs s’arrêtaient un moment pour reprendre leur souffle, puis retournaient sur le ring avec plus de rancune que jamais.
Alors, soyons clairs : oui, les droits de douane baissent. Mais ils restent très élevés. On parle encore de 40 % en moyenne sur les importations chinoises. C’est énorme. Et si aucun accord n’est trouvé d’ici trois mois, Trump a déjà annoncé la couleur : il remettra une couche. Ce n’est pas un rétropédalage, c’est un demi-tour en marche arrière.
Mais le plus ironique, c’est ça : il y a quelques mois, les économistes les plus pessimistes imaginaient un scénario catastrophe, avec des droits de douane à 20 %, peut-être 60 % dans le pire des cas. Aujourd’hui, Trump menace avec du 145 %… et quand il revient à “seulement” 40 %, les marchés crient au génie. Autrement dit, on a déplacé la barre du pire tellement haut qu’un simple désastre devient une bonne nouvelle. C’est l’art de transformer une claque en caresse.
Et ça marche. Les investisseurs semblent atteints d’amnésie volontaire. Ils saluent ce qu’ils appellent un “retour à la raison”, alors que les tarifs en place sont toujours le double de ce qu’ils étaient avant Trump. On appelle cela une victoire… alors qu’en réalité, c’est juste un moindre mal. C’est un peu comme si un chirurgien vous disait : “Bonne nouvelle, on ne vous coupe qu’une jambe sur deux.”
Pendant ce temps, sur le terrain, l’économie réelle tousse. En Chine, jusqu’à 16 millions d’emplois sont en jeu si les tarifs reviennent en force. Aux États-Unis, ce sont les petites entreprises qui boivent la tasse : celles qui n’ont pas les reins financiers assez solides pour délocaliser leur production à la volée. Pour elles, cette trêve, c’est une bulle d’oxygène… qui peut, hélas, éclater à tout moment.
Et surtout, cette incertitude permanente paralyse. Les entreprises hésitent à investir, les chaînes logistiques restent désorganisées, les containers ne reprennent pas magiquement la mer entre Shanghai et Los Angeles. Bref, la guerre commerciale a peut-être levé le pied… mais elle laisse des traces.
Alors oui, cette trêve est un soulagement. Mais c’est un soulagement factice, temporaire, trompeur. Rien n’est réglé. Tout peut repartir à la moindre provocation. Et dans ce jeu d’escalade et de recul, Trump a réussi un coup de maître : faire passer l’anormal pour le nouveau normal. Chapeau l’artiste !