Amid Faljaoui

Prévisions 2024: des entrailles de poulet aux algorithmes

Nous sommes au début de l’année 2024 et comme d’habitude, c’est le moment des grandes résolutions dont nous savons tous qu’elles ne durent que le temps d’y penser. Hélas pour notre égo !  Mais c’est aussi la période des prévisions économiques.

C’est une tradition bien vivace, et comme chaque année, tous les économistes des grandes banques internationales et nationales font tourner leurs modèles économiques pour nous dire à quoi pourrait ressembler 2024. A vrai dire, je ne sais pas à quoi sert cet exercice, car il est tellement complexe qu’en réalité, il est vain. La preuve, c’est que le consensus des économistes a eu tort la plupart du temps et il n’y a pas de raison pour que ces beaux esprits ne se plantent pas aussi en 2024.

Si vous avez des doutes, souvenez-vous juste des prévisions de 2023. Démonstration !
– On nous avait dit que les États-Unis allaient entrer en récession à cause de la hausse brutale des taux d’intérêt. Au final, cela n’a pas été le cas. Merci à la résilience des ménages américains.
– On nous avait dit que l’économie chinoise, après trois années de politique de « Covid Zéro », allait rebondir et faire exploser la croissance et même notre inflation. Au final, cela n’a pas été le cas.
– On nous avait dit que l’inflation était là pour durer, et Christine Lagarde, la présidente de la BCE, a même indiqué que l’inflation pourrait même devenir « permanente ». Au final, cela n’a pas été le cas.
– On nous avait dit que le prix du pétrole allait monter dans les tours avec la guerre en Ukraine, qui perdure, et les tensions au Moyen-Orient. Au final, cela n’a pas été le cas, malgré la réduction de la production voulue par l’OPEP.
– On nous avait dit que la Bourse allait souffrir de la hausse des taux. Au final, c’est l’euphorie à la Bourse, les indices sont au vert foncé.
– On nous avait dit que le Bitcoin était mort à cause des scandales et des faillites frauduleuses des plateformes d’échange de cryptomonnaies de type FTX. Au final, le Bitcoin tourne autour des 45.000 dollars.
– Et on nous avait dit que l’or ne jouait plus son rôle de valeur refuge. Au final, il tutoie la barre des 2.100 dollars l’once.

Bref, vous l’avez compris, en termes de prévision, cela a été plutôt un flop. Mais bon, ce n’est pas ce genre de remarque qui va empêcher une tradition bien établie de continuer. Au fond, c’est humain, terriblement humain. La raison ? Nous autres, êtres humains, détestons l’incertitude et nous souhaitons tous savoir à quoi pourrait ressembler l’avenir. Toujours cette volonté de maîtriser son destin.

Jadis, nous demandions à des druides ou à des chamanes d’étudier le vol des oiseaux ou les entrailles de poulets pour deviner notre avenir. Aujourd’hui, ce sont les modèles économétriques sophistiqués des économistes qui remplacent ces druides et ces chamanes. Vive les algorithmes et adieu les entrailles de poulet !

Et pour 2024, le grand jeu des économistes, c’est de tenter de savoir quand aura lieu la baisse des taux d’intérêt. Est-ce en mars comme l’espère la Bourse, ou en juin, ou plutôt au second semestre ? Chacun y va de son pronostic. Pour ma part, je pense que le commentaire de Marc Fiorentino, un observateur avisé de la Bourse, est le meilleur. Il écrit en résumé, « on s’en fout, l’important, c’est que nous sommes sortis du cycle haussier des taux d’intérêt et que nous sommes entrés dans un cycle baissier des taux et qu’il commence en mars ou en juin, n’a aucune importance, l’important c’est qu’il y aura une baisse des taux ».

En soi, c’est déjà une très bonne nouvelle pour les ménages qui veulent acheter un bien immobilier, idem pour les entreprises qui veulent financer leurs projets. Et c’est aussi une excellente nouvelle pour nos États qui sont plus que surendettés. Pour le reste, je voulais pour ce premier « point final » de l’année, non pas faire une prévision, mais juste vous souhaiter de garder à l’esprit, cette phrase d’un ami médecin qui m’a marqué au fer rouge, je vous la cite : « le bonheur, c’est le silence des organes ». Comme chaque année, et à défaut de faire une prévision, je vous souhaite une année 2024 très silencieuse.  

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