Amid Faljaoui

L’iPhone va-t-il tuer Proximus et Orange ? Pas si vite…

Une chronique d’Amid Faljaoui.

Le jour où votre iPhone captera en pleine zone blanche, vous penserez que les opérateurs ont enfin amélioré leur réseau.

La réalité sera plus subtile : ce ne sera peut-être pas leur réseau… mais celui du ciel.

L’agence d’informations financières Bloomberg explique qu’Apple travaille sur “une messagerie par satellite améliorée prenant en charge les photos”. Dit comme ça, on imagine déjà la firme à la pomme en train de court-circuiter les opérateurs. Et beaucoup en concluent – sans doute un peu vite – qu’Apple prépare un monde sans antennes, sans forfait, sans infrastructure traditionnelle.

En réalité, attention à ne pas s’emballer trop rapidement. Non pas par erreur, mais par enthousiasme devant une technologie impressionnante. Parce que la vérité est plus nuancée, et surtout plus économique.

D’abord, Apple n’a pas de constellation. Pas d’infrastructure. Pas de spectre mondial. Et surtout aucune envie de devenir un opérateur, un métier où l’argent sort plus souvent qu’il ne rentre. Les marges des télécoms sont faibles, la régulation stricte, l’investissement colossal. Rien à voir avec le modèle Apple, construit sur le contrôle, la marge et la scalabilité.

Ensuite, la technologie satellite n’a pas vocation à remplacer la 5G. C’est une roue de secours intelligente. Un filet de sécurité. Un moyen de combler les trous du réseau, pas de tirer une autoroute numérique dans l’espace. Pour l’instant, le satellite sait envoyer un SOS, un SMS, bientôt peut-être une photo compressée. Mais il ne peut pas absorber la demande quotidienne d’un pays entier.

Et surtout, Apple n’a aucun intérêt à se passer totalement des opérateurs : elle a intérêt à renverser la relation de force.

Et c’est là que tout devient business.

En intégrant l’eSIM, en développant la connectivité hybride, en offrant un service minimal même hors réseau, Apple reprend un morceau de la “proposition de valeur” historique des télécoms.

Si demain votre iPhone est toujours un peu connecté même quand l’opérateur ne l’est plus, à qui attribuerez-vous la performance ? À l’opérateur ou à Apple ? Dans ce scénario, l’opérateur perd un avantage symbolique : celui d’être indispensable. Apple ne le remplace pas, la firme de Cupertino le relègue. Apple transforme l’opérateur en fournisseur d’une partie seulement de la connexion.

Et c’est là que se joue la vraie bataille.

Pour le consommateur, c’est simple : un smartphone plus fiable, plus continu, plus rassurant.

Pour les opérateurs, c’est plus complexe : comment rester au centre du jeu quand l’expérience utilisateur dépend de plus en plus du terminal, et de moins en moins du réseau ?

Au fond, la grande révolution n’est pas un “iPhone sans opérateur”. C’est un “iPhone qui dépend un peu moins d’eux”. Et c’est probablement suffisant pour changer l’équilibre du marché.

Alors la question de ce weekend devient : dans un monde où la connectivité se déplace vers le terminal, qui possédera réellement la relation client ?

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