Amid Faljaoui

Les partis politiques à la chasse aux célébrités, mais gare à la gueule de bois

Les partis politiques belges sont partis à la chasse aux voix. La vôtre et la mienne, bien entendu, mais avant cela, ils ont décidé de faire la chasse aux célébrités, aux Wallons connus comme on dit chez nous.

Le marché électoral est un marché fermé, qui par définition n’est pas en expansion et donc chaque parti essaie de grignoter des voix chez l’autre. Le MR a pour tactique ancienne de chasser les célébrités. Sa dernière recrue, Julie Taton, sera deuxième sur la liste électorale au fédéral, juste derrière le président du parti Georges-Louis Bouchez. Par le passé, le MR a surtout chassé du côté des journalistes, que ce soit des présentateurs de la RTBF ou de RTL.

Le parti Défi lui vient de débaucher Michel Claise, un ancien juge d’instruction parti à la retraite, mais bien connu dans le monde des affaires. Quant aux Engagés, ils ratissent large – dans la société civile – mais aussi en prenant des figures du monde patronal comme Yvan  Verougstraete, le fondateur de Medi-Market et ancien Manager de l’Année, ou plus récemment Jean-Jacques Cloquet, l’ancien patron emblématique de l’aéroport de Charleroi et lui aussi ancien Manager de l’Année ou encore Olivier de Wasseige, ancien administrateur délégué de l’Union Wallonne des Entreprises.

Bien entendu, toutes ces personnes sont d’abord et avant tout des attrape-voix. Leur rôle est d’acheter des parts de marché plus rapidement et plus facilement, surtout en cette période de désamour de la population à l’égard de la politique. Est-ce que la greffe va prendre ? A court terme, oui, mais à moyen et long terme, ce n’est pas aussi sûr. Les quelques anciens patrons qui ont fait de la politique en Belgique n’étaient généralement pas très heureux de ce passage de leur vie.

C’est ce que je répète souvent aux patrons que je croise régulièrement et qui sont parfois pris d’envie de faire de la politique. Ma réponse est invariablement, surtout pas, vous allez vous faire dézinguer ! D’abord, par les politiques de carrière qui voient que vous prenez leur place alors que cela fait des années qu’ils convoitent ce poste ou cette fonction. C’est ça la grande différence avec le monde de l’entreprise et la politique : en politique, l’ennemi n’est pas à l’extérieur, mais à l’intérieur du parti. C’est normal, les électeurs du PS ne voteront pas pour un candidat MR. La concurrence se fait donc en interne, au sein du parti.

Ensuite, le cycle du temps n’est pas le même. Dans une entreprise, lorsque la stratégie est définie, tout le monde est aligné sur le même objectif. En politique, la stratégie fait souvent place à de la tactique, ce qui n’est pas la même chose, l’horizon temporel est le court terme. L’homme politique ne s’intéresse pas à l’avenir, pas parce qu’il est idiot ou incompétent comme le pensent trop vite les électeurs, mais parce que l’horizon du politique, ce sont les prochaines élections. « La génération future, j’y pense aussi me disait l’un d’eux, mais la génération future, je ne la rencontre pas sur les marchés ou dans les rues quand je fais du porte-à-porte. Mon horizon de temps, c’est la génération actuelle, celle qui est devant moi, car l’autre – la génération future – ne vote pas ».

L’autre différence avec le monde des affaires, c’est que l’entreprise s’adresse à des consommateurs en lui offrant un produit ou un service qui correspond à ses attentes. En politique, le consommateur – donc le citoyen – est lui-même schizophrène et ne sait pas ce qu’il veut. Il dit qu’il veut voter pour un homme d’Etat qui a une vision longue, mais il finit par voter pour quelqu’un qui défend juste ses intérêts à lui. Ce même citoyen exige même un discours de vérité, mais ne vote bien souvent que pour celui ou celle qui lui promet des lendemains qui chantent.

Je pourrai continuer de la sorte, mais mon message est simple. La greffe entre le monde des affaires et le monde politique n’est pas simple, car ce sont deux mondes avec des codes aux antipodes l’un de l’autre. Et pour le reste, ce marketing politique, ce sont de vieilles méthodes sur de nouveaux vêtements.

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