Les politiques belge et française sont un théâtre d’ombres, où l’on s’écharpe sur des détails alors que le monde réel change. Nos dirigeants rejouent de pathétiques querelles de partis pendant que l’intelligence artificielle et la robotique redessinent les bases du travail, de la santé et du savoir. Nos responsables politiques demeurent d’une nullité scientifique et technologique confondante. Leurs débats semblent sortis d’un autre siècle. On disserte d’alliances politiciennes misérables, mais jamais du rapport de force entre humains et machines pensantes.
Le problème n’est plus seulement culturel, il est existentiel. L’IA n’est pas un gadget, c’est une infrastructure cognitive qui redéfinit le pouvoir et la compétitivité. Les pays qui l’intègrent massivement à l’école, à la recherche et à l’économie seront souverains. Les autres deviendront des protectorats technologiques. Pourtant, ni à Paris ni à Bruxelles, l’école et la formation professionnelle ne sont pensées comme la colonne vertébrale de cette transition alors qu’il faudrait apprendre à dialoguer et raisonner avec des IA.
Les classes politiques vivent dans une bulle pré-numérique. Elles comprennent l’économie du 20e siècle, pas celle du 21e. Elles ne perçoivent pas l’IA comme le nouvel oxygène de la puissance. En France, les candidats rivalisent d’incompréhension technologique et prônent la “prudence” comme si l’on pouvait suspendre la révolution de l’esprit. En Belgique, des coalitions usées se déchirent sur les dotations régionales, tandis que la robotisation s’accélère, ce qui va laminer l’industrie. L’ignorance technologique des élites politiques est le scandale de notre époque.
Cet illettrisme scientifique du pouvoir empêche d’imaginer un futur où la technologie serait instrument de justice et non d’inégalité. Elle condamne nos nations à subir plutôt qu’à piloter. Les pays qui réussissent aujourd’hui ont fait de la compréhension technique une exigence civique. Dans nos deux pays, on confie des ministères à des gens incapables d’expliquer le fonctionnement d’un algorithme et qui n’ont jamais touché à ChatGPT.
Les politiciens d’autrefois devaient connaître Tacite. Ceux d’aujourd’hui devraient comprendre les matrices Transformer qui forment la base des IA. La culture générale ne suffit plus, il faut une culture computationnelle. Un État qui ne comprend pas la logique de l’IA ne peut ni la réguler ni l’utiliser. Et quand les législateurs sont plus incompétents que les lobbyistes, la démocratie devient un théâtre impuissant.
Ce n’est pas d’un changement de majorité dont nous avons besoin, mais d’un changement d’espèce politique.
Ce vide intellectuel mine la crédibilité même de la politique. On ne gouverne pas une civilisation neuronale avec des réflexes d’appareil. L’école, surtout, reste prisonnière d’un modèle dépassé alors qu’elle devrait former à la pensée systémique, à la symbiose homme-machine et à la créativité augmentée. Former des citoyens capables de penser avec l’IA, pas contre elle.
Il faut un “Vatican II de la politique”. Pendant que la Chine et les États-Unis façonnent les intelligences qui structureront la planète, nos politiciens débattent de combines d’appareils. Ce n’est pas d’un changement de majorité dont nous avons besoin, mais d’un changement d’espèce politique : des dirigeants capables de comprendre la science et l’IA. Il faut réhabiliter la compétence scientifique comme condition de la responsabilité politique. Sans cette révolution cognitive, la France et la Belgique déclineront dans un monde de “républiques algorithmiques”. Honte aux politiciens français et belges.