Eddy Caekelberghs
“Vous aviez à choisir entre la guerre et le déshonneur, vous avez choisi le déshonneur et vous aurez la guerre !”
Les aides américaines à l’Ukraine sont pratiquement épuisées. Les démocrates de la gauche “Sanders ” lient tout nouveau budget à un stop d’aide à Israël. Où est le lien ? Apparemment nulle part. Sauf dans leurs têtes. Puisque Joe Biden veut aider Kiev, on a donc un levier pour l’empêcher d’aller plus loin envers Israël dans sa guerre contre le Hamas. Sans compter le calcul isolationniste des républicains.
Et pendant ce temps en Europe ? On se dispute. Pour des idées ? Pas vraiment. Pour des valeurs ? Oui, mais sonnantes et trébuchantes. La Hongrie de Viktor Orban fait pression pour finir par obtenir un déblocage de 10 milliards d’euros d’aides en contrepartie de négociations possibles d’adhésion pour l’Ukraine. Et tout ça alors que les Pays-Bas – avec un Geert Wilders emportant les urnes – menacent de ne pas livrer les F-16 prévus.
Quelle défaite de l’esprit ! Quelle honte européenne. Espérant tout de Washington, comme d’habitude. Achetant les votes de ses pires opposants internes. Et, pourtant, à Washington comme au sein de l’Union, on ferait bien de relire l’analyse de l’Irish Independent : ” Si la Russie devait s’en prendre à l’un des alliés de l’Otan, par exemple un des petits Etats baltes de Lettonie ou d’Estonie, sans parler de la Pologne ou d’un autre grand pays allié, Washington serait obligé, en vertu des traités, d’envoyer des troupes pour défendre les pays agressés. Il est certes difficile d’évaluer le coût d’un déploiement de troupes américaines pour défendre des alliés de l’Otan en position de vulnérabilité face à une puissance nucléaire. Mais à en juger par le prix payé par les Etats-Unis dans d’autres guerres au cours de ce siècle, on comprend que l’investissement serait énorme – en tout cas sans commune mesure avec les fonds pour l’Ukraine dont il est actuellement question au Congrès “.
Tout cela est pathétique. Imaginez-vous pareil débat en 1941-1942 à Londres puis aux Etats-Unis entrant en guerre contre le nazisme !
Et, à Paris, “Le Figaro” résume les similitudes insoupçonnées des deux rives à la dérive : ” L’Europe ne fait guère mieux […] Les dirigeants occidentaux s’en défendent, mais il est apparent depuis un bon moment que leur soutien n’est pas à la hauteur de leurs intérêts affichés “.
Ou encore à Londres où le “Financial Times” conclut : ” La Hongrie a été privée de milliards en raison de ses entraves à l’Etat de droit. Orban a démontré qu’il était en mesure de ‘gâcher le jeu’. C’est pourquoi l’UE devrait employer tous les moyens à sa disposition pour le mettre hors d’état de nuire “.
Et tout ce troc de milliards n’est que cynisme et lâchetés. En fait, Orban sait que l’entrée, un jour, de l’Ukraine dans l’Union diminuerait la part hongroise dans les fonds européens alloués au développement. En fait, les républicains savent que les Etats-Unis n’ont pas vraiment le choix ni en Ukraine ni au Proche-Orient mais il leur faut favoriser la campagne électorale contre Joe Biden et se montrer plus isolationniste dans les mots que dans les actes.
Tout cela est pathétique. Imaginez-vous pareil débat en 1941-1942 à Londres puis aux Etats-Unis entrant en guerre contre le nazisme ! Pour l’UE, ceci démontre (une fois encore) qu’il est urgent de modifier les procédures et de le faire officiellement et non en achetant l’abstention ou l’engagement d’Orban. Ou de qui que ce soit d’autre. L’autre question, c’est de savoir combien de temps ce débat durera, si l’on tient compte du fait que les élections européennes auront lieu dès le mois de juin 2024.
Et de méditer vite ceci attribué à tort ou à raison à Churchill après l’entrevue de Chamberlain avec Hitler à Munich : “Vous aviez à choisir entre la guerre et le déshonneur, vous avez choisi le déshonneur et vous aurez la guerre !”
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