Amid Faljaoui

Quand le Mossad connaît le code wi-fi de Téhéran

Israël n’a pas seulement frappé l’Iran. Il a révélé à quel point il était infiltré au plus haut niveau. Ce n’est pas un éditorial sur les missiles, mais sur le renseignement. Celui qui voit avant de tirer. Celui qui désorganise avant d’attaquer.

Et de fait, en quelques jours, Israël a frappé les trois sites nucléaires clés de l’Iran : Natanz, Isfahan, Fordow. Tué plusieurs généraux, visé des infrastructures énergétiques. Une démonstration de force ? Oui. Mais surtout, une démonstration de connaissance intime du regime iranien.

Et cette connaissance ne sort pas des satellites. Elle sort de l’intérieur même de ce régime. Et encore une fois, au plus haut niveau.

L’agence d’information financière Bloomberg le résume sans ambages : « L’étendue de l’infiltration israélienne dans l’appareil sécuritaire iranien est devenue évidente. »

Autrement dit : Israël ne devine pas. Israël sait tout sur tout le monde en Iran. Parce que son service de renseignement, le Mossad, écoute, scrute, voit tout. Parce que le Mossad a placé des hommes. Et parce que l’appareil sécuritaire iranien a des failles.

Souvenez-vous de l’élimination de Mohsen Fakhrizadeh en 2020, cerveau du nucléaire iranien. Un assassinat propre, téléguidé à distance, sans une bavure. Ou encore de l’explosion du site de Natanz en 2021, causée — c’est Téhéran lui-même qui l’a laissé entendre — par un sabotage interne. Ou souvenez-vous de l’assassinat de Ismael Hanieh, l’un des dirigeants du Hamas, alors qu’il se trouvait dans une residence d’Etat à … Téhéran. Si ça, ce n’est pas de l’infiltration, qu’est-ce donc alors ?

Depuis, les frappes israéliennes ne cessent de cibler juste. Trop juste pour n’être que de la chance. Et d’ailleurs, le silence de Téhéran en dit long. Mais celui du Mossad, lui, dit tout.

Alors oui, l’Iran pourrait être tenté d’accélérer sa course à la bombe, comme le redoute Bloomberg. Parce qu’un régime humilié, infiltré, contourné, peut vouloir réagir par une escalade clandestine. Mais c’est un pari risqué.

Pourquoi ? Parce que le régime iranien, malgré ses postures, reste pragmatique.

Au moment d’écrire ces lignes, il n’a pas fermé le détroit d’Ormuz (par lequel transite 20% du pétrole Mondial), malgré les menaces.

L’Iran n’a jamais frappé les raffineries du Qatar ou des Émirats, alors qu’un missile bien placé y suffirait à provoquer un chaos pétrolier mondial.

Pourquoi cette retenue ? Parce qu’il sait que ce serait se tirer une balle dans le pied, car l’Iran a aussi besoin d’exporter son pétrole en Chine. Et surtout, ce serait déclencher une guerre régionale qu’il ne pourrait pas gagner.

Mais attention : si les frappes israéliennes devaient viser le sommet du pouvoir – l’Ayatollah lui-même – alors cette retenue pourrait sauter. Et la tentation du chaos prendrait le dessus sur le calcul rationnel encore en vigueur aujourd’hui. Et c’est pour cela que, malgré la puissance des armes, la sortie du tunnel reste diplomatique.

Alors, oui, le régime iranien est affaibli.

Alors, oui, ses relais régionaux (Liban, Syrie) sont neutralisés.

Alors, oui, ses alliés, comme la Russie ou la Chine, sont restés silencieux.

Alors, oui, son économie est étranglée.

Alors, oui, cent fois oui, sa jeunesse ne rêve plus de martyre, mais d’Internet et de liberté.

Et vouloir disposer de la bombe nucléaire ne lui garantirait pas la survie. Elle pourrait, au contraire, précipiter sa chute.

D’ailleurs Bloomberg le rappelle « les milliards de dollars de pétrole sacrifiés n’ont pas acheté la sécurité du regime. Ils ont creusé son isolement. »

Alors que faire ? Négocier. Même si la confiance est morte.

Parce que si un accord nucléaire était souhaitable hier, il est  encore plus vital aujourd’hui.

Parce que si le régime tombe, le vide qu’il laissera pourrait être pire que le mal qu’il incarne.

Et parce qu’un Iran acculé pourrait être tenté de tout faire sauter avec lui.

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