Amid Faljaoui
Étonnant, mais vrai, notre cerveau adore la désinformation
Comment faites-vous pour maigrir lorsque vous êtes comme moi une bouche à sucre ? Bonne question en effet… Et c’est la même question ou presque qui se pose aujourd’hui avec la désinformation. Nous sommes entourés de fausses nouvelles et c’est d’autant plus déplorable que cela a été prouvé scientifiquement : notre cerveau aime, que dis-je, adore la désinformation !
Or, nous savons tous qu’en 2024, la moitié de la planète va participer à des élections. Nous savons aussi que de très nombreuses élections vont être manipulées par l’intelligence artificielle… Récemment encore le président américain Joe Biden a été victime d’un faux message téléphonique, et au Pakistan ce sont les fans de l’ancien premier ministre Imran Khan qui ont utilisé l’intelligence artificielle pour générer des discours plus vrais que nature de leur leader, alors que ce dernier est en prison !
Les géants du numérique comme Meta, Microsoft, Google, OpenAI ou TikTok sont bien conscients de ce danger de manipulation. Et c’est la raison pour laquelle, la plupart des géants du numérique se sont engagés à lutter contre la désinformation. L’une des techniques mises en place consiste à apposer un tatouage numérique sur les vidéos générées par l’intelligence artificielle. Ce tatouage sera invisible à nos yeux humains, mais il pourra être détecté par une machine pour éviter les fake news.
Mais comment éviter un raz de marée de fausses nouvelles alors que notre cerveau adore la désinformation comme l’ont démontré plusieurs études récentes. Nous sommes tous victimes de nos biais cognitifs, vous savez ce sont ces défauts de notre cerveau qui font que « nous sommes capables de nous mentir à nous-mêmes juste pour bien dormir la nuit » pourreprendre la jolie expression de Nathalie Gallet, du Media Lab de l’information. Et parmi ces biais cognitifs, recensés par Nathalie Gallet dans Metamedia, il y a le biais de réceptivité au « baratin ». En d’autres termes, c’est ce mauvais réflexe qui fait que plus une déclaration est complexe et plus nous avons tendance à la prendre au sérieux. C’est comme le latin des médecins de Molière, ces médecins ne savaient pas de quelle maladie vous étiez atteint, mais ils enrobaient leurs discours de phrases en latin, et le patient était rassuré. C’est idiot, mais cela marche encore de nos jours, sauf que le jargon économique et financier a remplacé le latin.
Il y a aussi le biais de la vérité illusoire. En d’autres termes, plus on est exposé à une information et plus nous pensons qu’elle est vraie. Et c’est vrai que les algorithmes des réseaux sociaux ne nous aident pas puisqu’une fois qu’on a regardé une vidéo sur un certain thème, l’algorithme nous en propose d’autres similaires.
Au fond, c’est ce que disait l’ancien président Ronald Reagan à ses détracteurs : « Oui, je sais, je répète toujours les mêmes idées, et les mêmes blagues, mais à force de les répéter, les gens les retiennent ». C’est tout aussi triste comme constat, mais là également, cela marche toujours.
Et puis, il y a un autre biais cognitif qui nous joue des tours, c’est le biais de l’influence sociale. C’est clair, nous aimons plaire à nos amis et nous cherchons leur validation ou celles de nos pairs. Cela revient en réalité à suivre les croyances du groupe sans se poser trop de questions.
Et tout cela a une origine psychologique : en effet, à une époque, c’était dangereux de quitter le groupe ou la tribu. Être solitaire, c’était prendre le risque de se faire tuer par un animal sauvage ou une tribu adverse. Heureusement, ce danger n’existe plus aujourd’hui, mais il n’y a rien à faire, notre cortex a été forgé par des millénaires d’habitudes et le réflexe remplace hélas la réflexion.
Je pourrai continuer avec plein d’autres biais cognitifs pour démontrer à quel point notre cerveau aime la désinformation. C’est la raison pour laquelle, les spécialistes recommandent d’insérer dans les programmes scolaires des cours d’éducation aux médias. L’enseignement de nos biais cognitifs devrait être obligatoire, il n’empêchera pas la désinformation, mais il permettra à davantage de monde de la reconnaître. Mais là aussi, je n’ai rien vu sur ce sujet dans le programme de nos hommes et femmes politiques… Je crois que c’est Albert Einstein qui disait : « La folie, c’est de faire toujours la même chose et de s’attendre à un résultat différent ». Cela est plus vrai que jamais.
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