Amid Faljaoui
Efficacité des sanctions contre la Russie : un regard critique
Les sanctions économiques et financières : sont-elles efficaces ? À cette interrogation, la réponse semble mitigée. Il suffit d’observer Poutine à la télévision pour constater qu’il est en bonne forme, affichant même un sourire.
On pourrait penser que Poutine mise sur l’usure, croyant qu’à terme, il remportera la victoire en Ukraine. Cela pourrait se produire, soit parce que Trump reprendra le pouvoir aux États-Unis et cessera de soutenir l’Ukraine, soit parce que la population européenne se fatiguera de cette guerre d’usure interminable. En effet, les chiffres montrent que malgré les nombreuses sanctions économiques imposées à la Russie, ce pays ne semble pas fléchir. Pire encore, la Russie a clôturé l’année 2023 avec une croissance économique de 3%, alors que des pays européens tels que la Grande-Bretagne et l’Allemagne sont entrés en récession.
Le principal obstacle réside dans le contournement des sanctions. Prenez le pétrole, officiellement interdit dans l’Union européenne. Mais nous continuons à le consommer quotidiennement, car même s’il est vendu à bas prix à l’Inde et à la Chine, ce même pétrole nous revient plus cher sous une autre étiquette. De même, les produits interdits d’exportation en Russie parviennent à destination via d’autres pays tels que la Turquie, le Kazakhstan ou les pays du Golfe, selon Les Echos. Tout cela s’explique par le fait que l’Union européenne n’a pas encore réussi à imposer une clause sur le destinataire final aux pays tiers.
À un moment donné, les Européens pensaient que mettre la pression sur les oligarques russes, en confisquant leurs avoirs à l’étranger ou en leur interdisant l’accès à leurs somptueuses villas sur la Côte d’Azur, les inciterait à influencer Poutine pour mettre fin à la guerre en Ukraine. Cependant, cela s’est avéré être une illusion, car ces oligarques doivent leur fortune et leur vie à Poutine, et aucun d’entre eux n’a protesté. Certains ont même accru leur richesse en récupérant à peu de frais des entreprises occidentales forcées de quitter précipitamment la Russie.
Cela démontre que les sanctions économiques n’ont réellement fonctionné qu’une fois dans l’histoire, en Afrique du Sud, pendant l’apartheid. La différence résidait dans le consensus mondial unanime pour imposer un embargo et des sanctions contre les partisans de l’apartheid. En Russie, plus de la moitié de la planète n’a pas condamné l’invasion et ne partage pas l’opinion de l’Occident sur les événements en cours. Malgré cela, les sanctions sont maintenues faute d’alternative évidente.
La question de l’utilisation des intérêts des avoirs gelés russes en Europe est également débattue. Cependant, il est difficile d’agir rapidement en raison des contraintes juridiques liées aux États de droit. Les dirigeants européens se questionnent également sur le message qu’ils enverraient au reste du monde. Si les avoirs étrangers risquent d’être gelés en cas de conflit, quel pays africain ou asiatique osera déposer ses avoirs en Europe ? Il existe donc un risque de fuite de capitaux étrangers hors de l’Europe.
En résumé, la situation est complexe, et bien que les sanctions puissent éventuellement produire des résultats, cela prendra du temps. Poutine est conscient que les Occidentaux, habitués à l’instantanéité des réseaux sociaux, manquent de patience. Cependant, la persévérance est une leçon que l’histoire nous a enseignée, même si dans l’ère de l’immédiateté, elle semble souvent oubliée.
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