Comédie d’erreurs à Washington : jadis champion du libre-échange, l’Amérique version Trump s’improvise illusionniste des barrières douanières. Son dernier tour : un droit de douane de 50% sur les produits indiens, officiellement pour punir New Delhi d’acheter du pétrole russe à prix cassés, posture censée défendre le consommateur américain. Mais cette mesure ressemble à un sabotage commercial, aux effets boomerang retentissants. Et se priver d’un pays-continent comme l’Inde, client en armement de la Russie, en le propulsant dans les bras de Xi est absurde.
Ce taux record de 50% frappe plus de la moitié des exportations indiennes vers les États-Unis, soit 41,5 milliards d’euros par an. Textile, maroquinerie, joaillerie, alimentation, automobile : des secteurs à forte intensité de main-d’œuvre sont menacés d’effondrement. Entre juillet et août 2025, les exportations indiennes vers les États-Unis ont chuté de 15%. Des milliers de PME sont déjà en difficulté, et le consommateur américain devra payer la douloureuse : prix en hausse, gamme de produits plus étroite. Les conséquences sociales et les standards de vie américains seront affectés durablement ! Sur le terrain social, l’industrie textile indienne, employant plus de 45 millions de personnes, subit un choc brutal. À Noida et Tiruppur, les premières vagues de licenciements font craindre un tsunami économique dans ces régions cruciales. Le secteur agricole, très politiquement sensible, reste verrouillé, Modi refusant d’ouvrir marchés agricoles et laitiers aux importations américaines jugées trop agressives.
Face à ce coup dur, le gouvernement indien renforce le marché intérieur et développe des incitations financières et fiscales pour amortir le choc à travers des mesures ciblées contre la hausse des coûts et en stimulation de la consommation locale avant la grande fête du Diwali. Parallèlement, Modi intensifie ses liens stratégiques avec Pékin et Moscou. La rente monétaire est en train de glisser : la roupie, le yuan et le rouble avancent face au dollar dont le règne vacille.
Politiquement, cette posture protectionniste a détruit l’image d’un partenaire fiable et stratège à Washington. Modi, un temps proche de Trump, se tourne plus que jamais vers ses rivaux asiatiques, participant au renforcement des BRICS+ et des alliances sud-sud. Le dollar, jadis monnaie hégémonique soutenue par un système d’échanges mondiaux unipolaire, affronte la montée d’un monde multipolaire à plusieurs monnaies.
La magie douanière se révèle finalement un tour raté, au prix d’un isolement accru, d’un dollar en perte de vitesse, et d’une Amérique spectatrice gênée de sa propre désillusion.”
Le risque n’est plus seulement économique : c’est un vrai glissement géopolitique qui fragilise les chaînes de valeur mondiales et le leadership américain. Malgré les efforts pour rouvrir les négociations, notamment un nouveau cycle avec l’UE, les fractures restent profondes : Bruxelles et New Delhi se heurtent aux mêmes défis, agricoles et environnementaux, et à des revendications symboliques, comme celle du riz basmati.
Trump, lui, s’obstine. Il appelle l’Union européenne à rejoindre la danse punitive avec des droits de douane pouvant atteindre 100%, dans une surenchère déconcertante. La magie douanière, brandie comme un instrument de puissance, se révèle finalement un tour raté, au prix d’un isolement accru, d’un dollar en perte de vitesse, et d’une Amérique spectatrice gênée de sa propre désillusion. Rideau sur l’hégémonie américaine ! Le Sud global applaudit derrière le rideau, spectateur amusé d’un monde en pleine recomposition. L’épicentre stratégique et économique mondial se déplace définitivement vers la Chine et l’Inde, pays les plus peuplés au monde.