Comptes d’épargne: bientôt la fin de la prime de fidélité ?
Les banques belges vont-elles devoir être plus généreuses à l’égard des épargnants ? C’est le rêve de pas mal de politiciens qui en ont fait leur cheval de bataille.
Le premier d’entre eux est notre ministre des finances qui grâce à son bon d’Etat est parvenu à secouer le monde bancaire belge en lui piquant 22 milliards d’euros des comptes d’épargne. Il est vrai que ce ministre des finances ne l’a pas joué à la loyale puisque ce bon d’Etat avait une taxation avantageuse par rapport aux comptes d’épargne bancaire. Les banques belges ont compris la leçon. Comme un seul homme, elles ont toutes augmenté la rémunération de leurs comptes d’épargne (souvent avec des conditions plus ou moins alambiquées). Mais ce n’est pas le seul fait d’armes du ministre de l’Économie. Il a aussi commandité un rapport de l’autorité de la concurrence. Et le moins que l’on puisse dire est que ce rapport épais de 80 pages et publié en fin d’année dernière n’était pas très tendre à l’égard des banques belges. Il les accuse de se livrer une concurrence beaucoup trop timide. L’autorité de la concurrence a été même plus loin. Elle a écrit noir sur blanc que les 4 grandes banques belges avaient toutes les caractéristiques d’un oligopole. C’est le mot juridique et poli pour dire que ces 4 banques s’entendent entre elles. Et visiblement le message a été entendu puisque mes confrères du quotidien économique L’Echo ont eu vent d’une lettre du gouverneur de la Banque Nationale, autrement dit l’autorité de surveillance de nos banques commerciales. Cette lettre dit notamment que la Banque Nationale n’est pas contre l’idée de supprimer la prime de fidélité sur les comptes d’épargne pour favoriser justement la concurrence entre ces 4 grandes banques.
Je rappelle qu’aujourd’hui le taux d’intérêt d’un compte d’épargne comporte deux volets : un taux de base et la prime de fidélité. Le taux de base est acquis immédiatement, en revanche, la prime de fidélité n’est acquise qu’après un an. En clair, si vous retirez ne serait-ce qu’un euro de ce compte durant l’année, la prime de fidélité disparaît. Cette distinction entre taux de base et prime de fidélité est une spécialité belge qui n’existe pas ailleurs et qui complique les comparaisons pour l’épargnant. Si le gouverneur de la Banque Nationale dit qu’il n’est pas contre l’idée de supprimer cette prime de fidélité, il ajoute néanmoins qu’il ne faudrait pas agir comme des cow-boys en l’enlevant immédiatement. Pourquoi ? Car, par son existence, cette prime contribue à la stabilité de l’épargne des Belges dans les comptes bancaires. On parle quand même de 250 milliards d’euros. Or cette épargne sert à financer l’économie et notamment les prêts hypothécaires des particuliers. En creux, on comprend que la disparition subite de la prime de fidélité pourrait rendre les banques belges plus frileuses à accorder des prêts hypothécaires à taux fixe. Or justement ce sont ces prêts à taux fixes qui ont protégé les ménages belges endettés lorsque les taux se sont mis à augmenter.
Comme nous sommes en pleine période électorale, certains partis verront dans ce scoop de mes confrères de l’Echo la preuve qu’il faut rendre gorge aux banques et supprimer illico presto la prime de fidélité de ces vilains banquiers. Les plus sérieux d’entre eux se diront qu’il faut certes encore améliorer le rendement de l’épargne belge, mais qu’il faut aussi agir avec prudence. Sous peine de voir l’édifice s’écrouler comme au Mikado. Les politiques belges devraient se souvenir de ce proverbe africain : le jeune marche plus vite que l’ancien, mais l’ancien connaît la route.
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