Amid Faljaoui

Bourse américaine : le consensus est-il trop massif pour être juste ? 

Je ne sais plus qui disait « quand tout le monde pense la même chose, c’est que plus personne ne pense ». Et c’est très vrai en ce moment en Bourse. Si vous lisez les analyses et les commentaires des grandes banques et des grands gestionnaires en actions, tout le monde est d’accord pour applaudir le programme économique de Donald Trump. Tout le monde est d’accord sur l’évolution de la croissance, de l’inflation, des taux d’intérêt, des indices boursiers, du dollar, du pétrole et même du Bitcoin.

Ce consensus met mal à l’aise certains commentateurs boursiers pour la simple et bonne raison qu’il n’y a qu’à regarder l’historique des Bourses, il est rare que le consensus ait eu raison. Et donc, si la plupart des analystes pensent la même chose, c’est bien souvent parce qu’ils ont fait le même type d’étude, qu’ils utilisent les mêmes outils informatiques de prévisions, qu’ils lisent les mêmes journaux économiques, qu’ils fréquentent les mêmes cercles d’influence, et surtout, ils savent que s’ils ne suivent pas le consensus, leurs clients pourraient leur en vouloir.

C’est étonnant mais c’est le paradoxe de la vie financière, un client n’en voudra pas à son gestionnaire de s’être trompé s’il a agit comme les autres gestionnaires des autres banques. D’ailleurs que voulez-vous que le client fasse ? Aller ailleurs, mais si ailleurs on s’est aussi trompé pourquoi changer de banque ? C’est un vieil adage bien connu des financiers, « mieux vaut se tromper avec tout le monde qu’avoir raison tout seul ». D’autant que le client a tendance à reporter les pertes de son portefeuille d’actions sur la mauvaise gestion de son conseiller et à s’attribuer la paternité des gains si la Bourse se porte bien. Comme dirait l’autre, « la défaite est orpheline et la victoire a 100 pères ».

Mais donc, oui, aujourd’hui, tous les analystes sont d’accord : on va assister à une hausse des actions américaines, surtout dans le secteur bancaire et des énergies fossiles, car ces deux secteurs vont être déréglementés pour le plus grand bonheur des acteurs de ces secteurs. Il y aura en contrepartie une baisse des actions européennes et chinoises, sauf si la Chine lance un plan de relance massif. Puis, il y aura aussi une hausse du dollar, une baisse du pétrole car avec la déréglementation dont je parlais, il y a quelques secondes, on va pouvoir forer et cherche du gaz de schiste un peu partout aux États-Unis. Donald Trump est un climato-sceptique qui se fout comme d’une guigne de l’impact sur l’environnement. Puis comme Trump veut aussi arrêter la guerre au Moyen-Orient, le cours du baril de pétrole sera dirigé vers la baisse.

Et cerise sur le gâteau, le nouvel amour de Donald Trump pour le Bitcoin et sa volonté de faire des États-Unis la capitale mondiale du Bitcoin, qui va pousser la reine des cryptomonnaies vers les cieux. Comme le faisait remarquer Marc Fiorentino, l’un de mes commentateurs boursiers préférés, derrière ce constat, il y a une logique claire, cohérente, peu contestable et c’est justement ça qui le gêne. Et encore une fois, pour une simple raison, l’histoire a montré que le consensus avait rarement raison. Je sais bien qu’avant de crier au loup, il vaut toujours mieux s’assurer que ce n’est pas un raton laveur, mais tout de même, ce consensus suscite des interrogations. Affaire à suivre comme on disait dans les anciens feuilletons.

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