Fonds: une approche plus défensive se justifie

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Investir dans les actions distribuant un dividende résilient constitue une bonne alternative pour traverser les moments de forte volatilité sur les Bourses.

Les actions de croissance ont fait la une des journaux au cours de la dernière décennie, avec des performances qui ont attiré les flux des investisseurs. Sur le long terme, de nombreuses études ont démontré qu’investir avec une approche basée sur les dividendes constitue une meilleure stratégie. Durant les cinq dernières années, de nombreux fonds spécialisés sur ce thème ont engrangé des progressions annualisées supérieures à 8%, au travers d’un cycle de hausse de l’inflation et des taux obligataires.

Pour Fred Sykes, gestionnaire du fonds Fidelity Funds – European Dividend, cette performance ne doit pas constituer une surprise. “Le revenu d’une obligation est fixé lors de son émission, tandis que les dividendes versés par les entreprises de haute qualité peuvent augmenter, et constituent donc un meilleur moyen de protéger le portefeuille en termes réels (corrigés de l’inflation, ndlr).” Sur une période de cinq ans, la performance des meilleurs fonds globaux et européens a eu tendance à se confondre, avec une moyenne de 12% pour les produits dans notre échantillon. Depuis le début 2025, les fonds européens ont toutefois eu tendance à creuser l’écart, avec une hausse moyenne de 9% contre un recul de 2% pour les fonds globaux.

Renouveau européen

Pour les fonds européens, Fidelity Funds – European Dividend arrive en tête. “Pendant de nombreuses années, les flux ont privilégié le marché américain, indique Fred Sykes. Il est donc aujourd’hui beaucoup plus sensible aux déceptions, même minimes. Après avoir constitué un élément pénalisant pour la performance de cette classe d’actifs pendant plusieurs années, le positionnement européen constitue désormais un atout.

“Les dividendes versés par les entreprises de haute qualité constituent un meilleur moyen de protéger le portefeuille en termes réels (corrigés de l’inflation).”

Pour sa part, Brian Hall, gestionnaire du fonds Blackrock BGF European Equity Income, souligne que l’Europe reste un excellent endroit pour une stratégie basée sur les dividendes. “En moyenne, les entreprises européennes distribuent 40 à 45% de leurs bénéfices en dividendes, et environ 40% de la performance est venue directement des flux de dividendes durant la dernière décennie.” Le redressement constaté en 2025 constitue une correction par rapport aux sorties massives observées en 2024, aidée par un contexte politique qui s’est amélioré. “Les responsables sont aujourd’hui incités à atteindre un consensus pour renforcer les structures européennes, fait remarquer Brian Hall. Enfin, la décote sur les marchés européens avait atteint un niveau record au début de cette année.”

Au sein du fonds BlackRock BGF European Equity Income, l’exposition sectorielle privilégie les secteurs financiers et industriels, qui représentent plus de 60% des actifs sous gestion. “Le secteur financier européen affiche des niveaux de rendements soutenables et attractifs, indique le gestionnaire. Nous apprécions également les entreprises qui s’inscrivent sur des tendances de long terme comme l’électrification, ou dans des secteurs exposés sur la décarbonation comme l’industrie ou la construction.”

Pression américaine

À l’inverse, la volatilité observée depuis le début d’année aux États-Unis a pesé sur la performance des fonds globaux, qui restent largement exposés sur le marché américain (en moyenne 52% des actifs sous gestion pour les fonds globaux de notre échantillon). En tête des performances sur cinq ans, Invesco Global Equity Income est également celui qui affiche l’exposition la plus élevée sur l’Europe, à près de 40% des actifs sous gestion.

Quand le rendement d’une entreprise est trop élevé, le marché va systématiquement s’interroger sur sa capacité à soutenir les versements.

Typiquement, les meilleurs investissant sur les sociétés à dividendes ont une stratégie d’investissement concentrée et diversifiée, avec en moyenne une cinquantaine de lignes individuelles, et un poids tournant autour de 33% pour les 10 premières positions. Plus que le niveau du dividende, c’est surtout la capacité d’une entreprise à pouvoir remonter régulièrement son dividende qui est appréciée, et à ne pas être contrainte de le couper si l’environnement vient à se dégrader. “Quand le rendement d’une entreprise est trop élevé, le marché va systématiquement s’interroger sur sa capacité à soutenir les versements”, indique Sam Witherow, gestionnaire du fonds JPMorgan Investment Funds – Global Dividend.

Fondamentaux

Sam Whiterow met en avant trois raisons principales pour considérer une exposition globale sur les actions à dividende. “Premièrement, nous allons entrer dans une période de croissance accélérée des dividendes à l’échelle mondiale, de 5 à 6% durant les 20 dernières années vers 8% durant les cinq prochaines, principalement en raison du niveau très bas des taux de distribution et de l’arrivée de nombreux géants technologiques parmi les sociétés distribuant un dividende.”

“Deuxièmement, les actions à haut rendement affichent toujours des décotes significatives en dépit du rebond observé depuis le début 2025, poursuit Sam Whiterow. Et troisièmement, nous sommes aujourd’hui à un point du cycle où il est peut-être plus judicieux de penser à la protection contre les baisses qu’à la participation aux hausses, et les stratégies basées sur les dividendes ont été traditionnellement plus résilientes lorsque la volatilité et l’incertitude augmentent.”

Réorientation

L’élection de Donald Trump et la hausse de l’incertitude politique aux États-Unis a amené les gestionnaires de fonds globaux à ajuster leur stratégie depuis le début 2025. Joe Dowling, fund manager – global equities chez Invesco, indique avoir privilégié “les entreprises capables de résister aux aléas tels que les droits de douane et la dégradation du climat économique, et nous avons même trouvé des sociétés susceptibles de bénéficier d’un tel environnement comme le principal actionnaire du distributeur Action, qui pourra bénéficier de tarifs plus attractifs de la part des exportateurs chinois. Enfin, nous avons également acheté quelques lignes pour lesquelles nous pensons que le marché a surestimé l’impact des tarifs, ou dont la correction nous semblait trop importante. Nos lignes les plus défensives ont clairement joué un rôle positif depuis le début de 2025.”

De son côté, Sam Witherow avait un positionnement assez défensif au début 2025, de sorte qu’il a “profité des opportunités qui se sont présentées suite à la correction sur les marchés, notamment dans les valeurs industrielles, les logiciels ou les semi-conducteurs”. “À l’heure actuelle, l’impact des droits de douane reste encore impossible à évaluer correctement, dit-il. Notre réponse à ce problème est d’être peu exposé dans des actions ou des secteurs où nous pensons que le risque est significatif, notamment les entreprises qui doivent importer massivement aux États-Unis et qui ne disposent pas d’un important pouvoir de fixation des prix. Notre plus forte surpondération est aujourd’hui dans les services aux collectivités, qui connaissent une croissance plus rapide par rapport à leur moyenne historique grâce à l’électrification, à la modernisation des infrastructures et au développement des centres de données. Nous pensons que le marché ne valorise pas correctement cette opportunité.”

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