Un bon d’Etat radin!
L’Agence de la dette a annoncé l’émission d’un bon d’État à huit ans le 4 septembre. Le rendement brut proposé est désespérément bas : 2,1 %. Sachant que l’inflation dépasse aujourd’hui 2,3 %, il ne recueillera sans doute pas un succès fracassant. Au contraire.
La tendance à la baisse des deux dernières émissions est ainsi confirmée. à l’époque, ces émissions avaient rapporté le maigre butin de 59 millions d’euros pour la première, et le montant encore plus faible de 46 millions d’euros pour la seconde. Alors que l’an dernier autour de cette période, le Trésor avait récolté à peine 77 millions d’euros.
Et ce qui précède n’est encore qu’un rendement “brut “. Ce n’est donc pas celui qu’empochera l’investisseur. Indépendamment des commissions et autres frais de transaction qui lui seront facturés, son rendement sera encore érodé par le précompte mobilier ainsi que l’éventuelle taxe des millionnaires. Le précompte mobilier sur les intérêts liés à un bon d’État s’élève à 21 %. Ce tarif a été relevé depuis le 1er janvier 2012 – il était de 15 % avant. À cela s’ajoute la taxe des millionnaires de 4 %. Vous pouvez la payer volontairement (pour éviter l’obligation de déclaration), et elle vous sera de toute manière facturée si vous percevez plus de 20.020 euros en intérêts et dividendes.
Le rendement brut proposé sur le bon d’État s’effondre ainsi de 2,1 % à 1,57 % ou 1,66 % après impôts. Une telle rémunération nette ne fait saliver personne. L’Agence de la dette craint donc (à juste titre) que le montant recueilli atteigne un plancher historique. De manière assez laconique, elle précise que si le résultat était décevant (ce que l’on prévoit l’avance), elle accroîtrait les émissions d’obligations linéaires.
C’est naturellement très dommage. Pourquoi l’État ne fait-il pas sérieusement appel à l’investisseur particulier belge ? Dans les circonstances incertaines que nous connaissons, celui-ci a les poches bien pleines. Son credo est toujours : ” Cash is King “. Les seuls comptes d’épargne belges accueillent déjà plus de 200 milliards d’euros. À cela s’ajoutent les équivalents en liquidités (comptes à terme, sicav monétaires, certificats du Trésor, etc.) et les liquidités détenues à l’étranger. Une source de financement presque inépuisable.
Exploiter cette source présente de nombreux avantages. Ainsi, l’État peut se financer auprès d’un investisseur ” sédentaire “, ce qui évitera à la Belgique de devenir le jouet des marchés financiers. La dette sera détenue par les Belges. Le fait que les habitants soit les principaux créanciers d’un pays a en effet très stabilisateur. Voyez ce qui se passe au Japon. Par ailleurs, c’est également une manière de réduire la fraude fiscale.
Pourtant, la Belgique continue à miser massivement sur les placements internationaux. Un placement sérieux chez le Belge moyen n’est pas envisagé. D’autre part, nos gouvernants continuent à favoriser les comptes d’épargne. Ceux-ci sont nettement avantagés d’un point de vue fiscal. Ils sont en effet imposés à 15 % au maximum. Et ce pourcentage n’est jamais majoré de la “taxe de millionnaires”. Autrement dit : à rendement brut équivalent, préférer un compte d’épargne à un bon d’État engendre une économie d’impôt de 66 % (15 % contre 21 + 4 %). Et ce, sans compter les autres avantages. Les premiers 1830 euros d’intérêts d’un compte d’épargne sont par exemple exonérés d’impôt. Le rendement d’un bon d’État est taxé dès le premier euro.
Pourquoi ne pas accorder (au moins) les avantages des comptes d’épargne aux bons d’État. L’émission Leterme de 2012 prouve que si l’investisseur reçoit un petit quelque chose en échange, le succès augmente de manière exponentielle. Combinant un taux élevé et un précompte réduit de 15 %, il avait rapporté 5,7 milliards d’euros. Une différence énorme par rapport aux quelques dizaines de millions actuels.
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