Pourquoi le prix du diesel baisse 6 fois moins que le cours du pétrole?
Sur les marchés financiers, le cours du baril de Brent a chuté de 32% depuis le sommet de début octobre, repassant sous les 60 dollars. À la pompe, le prix du diesel n’a pourtant baissé que de 5%, la faute aux moyennes, au raffinage et à la fiscalité.
De 86 dollars début octobre, le cours du baril de Brent a plongé sous les 60 dollars. Ramenée en euros, la chute est également de plus de 30%, la monnaie unique valant entre 1,13 et 1,16 dollar depuis plusieurs mois. À la pompe, le prix maximum du diesel n’a pourtant baissé que de 5,3% à 1,548 euro et les automobilistes doivent s’attendre à ce que le recul des prix demeure limité.
Fiscalité fixe
La fiscalité explique en grande partie ce très grand écart. Les accises et cotisations s’élèvent à 0,74 euro par litre TVA comprise, peu importe la valeur d’un litre de carburant. Cette composante fixe a pour effet mécanique de lisser les évolutions des prix des produits raffinés. Beaucoup moins taxé, le prix du mazout de chauffage a ainsi baissé de 20% depuis le plus haut d’octobre. Dans le cas du diesel, les accises ont augmenté de plus de 30% depuis 2015 sous l’effet d’une succession de “cliquets positifs”, les taxes étant augmentées à chaque baisse du prix du diesel B7. La dernière a toutefois eu lieu en juillet 2018, ramenant les accises sur le diesel au même niveau que l’essence, et n’explique donc pas pourquoi le prix de l’essence (-10,4%) a baissé beaucoup plus depuis le pic d’octobre.
Marge de raffinage
Pour comprendre ce phénomène, il faut plutôt voir du côté des raffineries. Selon le groupe pétrolier finlandais Neste, la marge des raffineries est passée de 3 dollars par baril (de 159 litres de pétrole) début octobre à plus de 9 dollars le 20 novembre grâce au diesel essentiellement. Le prix de référence de l’essence 95 hors taxes (prix CIF en euros) a baissé de 28% par rapport au plus haut et celui du diesel de seulement 18%. Cette évolution est liée aux tensions persistantes en Europe sur le marché du diesel. Le succès de ce carburant auprès des automobilistes européens ces dernières décennies a en effet déséquilibré la consommation entre diesel et essence. Les raffineries européennes se retrouvent ainsi avec un excédent d’essence à exporter et un manque de diesel qu’elles doivent importer, ce qui influence également les marchés mondiaux. Actuellement, un litre d’essence E10 à la sortie de la raffinerie coûte ainsi 0,37 euro et un litre de diesel B7 quasiment 40% de plus (0,51 euro) selon Petrolfed.
Une nouvelle baisse (limitée)
Soulignons enfin que le SPF Economie a recours à une moyenne de prix sur 7 jours. Cela explique une certaine latence entre la chute du cours du baril de Brent et les prix à la pompe. Ces derniers ne reflètent ainsi pas encore entièrement la récente chute des cours sur les marchés pétroliers. On peut donc s’attendre à une nouvelle baisse des prix de l’essence et du diesel dans les prochains jours, d’autant plus que la marge de raffinage a rechuté à 6 dollars le baril. Cette marge a en effet tendance à bondir lors des phases de chute du prix du baril pour ensuite se stabiliser autour de 4 à 6 dollars le baril. Il est toutefois évidemment qu’il ne faut pas s’attendre à un plongeon des prix au vu des taxes fixes et de la TVA s’appliquant sur le solde. Même en tenant compte d’une chute hypothétique de moitié du prix du diesel à la sortie de la raffinerie, impliquant un véritable effondrement du prix du pétrole, le prix maximum à la pompe serait toujours de 1,25 euro. Pour l’essence, le potentiel de baisse est encore plus limité étant donné la moindre valeur du prix du produit hors taxes et distribution. Seule exception, le gasoil de chauffage dont le prix à la sortie de la raffinerie représente 66% du prix de vente final.
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