Inclusio, locomotive du redressement des sociétés immobilières cotées en Bourse

Inclusio est active dans le segment du logement social, niche peu représentée en Bourse. Il possède, par exemple, ce complexe situé à Laeken (Bruxelles), qu’il loue au New Samusocial. © PG/Inclusio

Le vent tournerait-il pour l’immobilier coté ? Après une période de vaches maigres, le secteur montre des signes de reprise dans le sillage du spécialiste des logements sociaux Inclusio.

Au début des années 2020, les sociétés immobilières cotées avaient tout pour séduire, alliant à la fois croissance et rendement. Cette période dorée, portée par des taux négatifs, appartient désormais à l’histoire. Le tournant est intervenu en 2022, lorsque l’envolée de l’inflation a brutalement inversé la tendance des taux d’intérêt.

En Bourse, le choc a été brutal pour les valeurs immobilières. Le secteur a encaissé de plein fouet le double effet du renchérissement du loyer de l’argent : la hausse des coûts du crédit a pesé sur les résultats et les rendements de dividendes ont perdu de leur attrait face aux obligations, redevenues bien plus rémunératrices.

Timide reprise

Trois ans après le début de cette longue traversée du désert, certains signaux laissent entrevoir une sortie de crise pour le secteur. Sur les six derniers mois, l’indice européen des sociétés immobilières réglementées (REIT Europe) a même légèrement surperformé le marché dans son ensemble, signe d’un (timide) retour en grâce auprès des investisseurs. La tendance reste toutefois exposée aux secousses du marché obligataire, comme l’a montré le repli de la semaine dernière sur fond notamment d’inquiétudes liées à la dette américaine.

En Europe continentale, la dynamique est plutôt à la stabilisation des taux longs, à l’image du rendement du Bund allemand à 10 ans. Cette évolution reflète surtout l’inflexion de la politique monétaire de la Banque centrale européenne, qui a abaissé ses taux directeurs à huit reprises depuis juin 2024, ramenant son taux de dépôt de 4% à 2%.

Embellie conjoncturelle


Au-delà de l’environnement financier, les perspectives économiques s’éclaircissent également. En août, l’indice PMI manufacturier de la zone euro, basé sur les enquêtes auprès des directeurs d’achats, est remonté à 50,8. Il a, à nouveau, franchi le seuil d’expansion (50) et atteint son plus haut niveau depuis début 2022.

Cet indicateur n’est, certes, pas prépondérant pour les sociétés immobilières réglementées, comme les SIR en Belgique ou les REIT à l’international. Leur modèle repose sur la location de biens plutôt que sur la promotion immobilière. De plus, leur statut impose un cadre strict : limitation de l’endettement et distribution obligatoire de la majorité des bénéfices (au moins 80% pour les SIR) sous forme de dividendes. Ces caractéristiques en font historiquement des placements défensifs.

Le secteur des maisons de repos donne des signes de redressement, après le triple choc de la pandémie, de la hausse des taux et du scandale Orpea.

Mais l’évolution de l’économie n’est pas sans effet pour des segments comme la logistique ou le commerce de détail, un ralentissement de l’activité augmentant le risque accru de vide locatif et de loyers impayés.

Par ailleurs, le secteur des maisons de repos donne lui aussi des signes de redressement, après avoir subi le triple choc de la pandémie, de la hausse des taux et du scandale Orpea, qui avait éclaboussé le secteur, à la suite des révélations de maltraitances en France.

Rendement social et financier

La star immobilière d’Euronext Bruxelles cette année n’évolue pas dans un de ces segments traditionnels, mais dans une niche peu représentée en Bourse : le logement social. Inclusio affiche en effet un gain de 39% depuis le 1er janvier, une envolée qui reflète d’abord un mouvement de rattrapage pour un titre qui évolue toujours loin de son prix d’introduction en Bourse de fin 2020 (21,40 euros). La SIR joue aussi un rôle de valeur refuge, le titre ayant entamé son rebond dans le sillage des droits de douane annoncés par Donald Trump au début du mois d’avril.

La spécialisation dans le logement social limite quelque peu le rendement locatif brut – estimé à 4,6% à la mi-2025 pour l’ensemble du portefeuille, contre 5,9% pour Cofinimmo (immobilier de soins et diversifié) et 6,2% pour WDP (immobilier logistique). Mais ce positionnement comporte aussi des atouts financièrement : la quasi-totalité des biens est louée à des agences immobilières sociales (et autres institutions), ce qui garantit l’absence de mauvais payeurs, un vide locatif pratiquement nul et des coûts de gestion limités. En Wallonie, Inclusio envisage toutefois de louer directement aux particuliers, ce qui permettrait de récupérer les 15% de frais actuellement prélevés par les AIS.

Côté valorisation, le titre se négocie toujours avec une forte décote par rapport à sa valeur intrinsèque, évaluée à 30,2 euros fin juin. Cette décote soutient également son rendement de dividende net, attendu à 3,4% sur la base du coupon de 0,92 euro prévu pour cette année. Enfin, Inclusio dispose encore de marges de manœuvre pour croître, son taux d’endettement s’établissant à 41,6%, en dessous du seuil légal de 65% et du niveau généralement ciblé par les SIR (50%).

Immobilières non réglementées

Les analystes de Degroof Petercam privilégient des valeurs plus dynamiques, et tout particulièrement VGP et Shurgard en Belgique. Le premier est spécialisé dans les entrepôts logistiques et semi-industriels. L’immobilière se distingue par une stratégie de croissance affirmée à travers toute l’Europe (17 pays allant du Danemark à l’Espagne et de la France à la Roumanie – mais étonnamment, pas en Belgique).

Deuxième caractéristique importante : VGP n’a pas le statut de SIR. L’entreprise fonde sa croissance sur la promotion immobilière (des biens qu’elle loue ensuite), notamment via d’importantes coentreprises. Selon Vivien Maquet, de Degroof Petercam, ces investissements devraient permettre à VGP de verser, en 2027, un dividende de 4,30 euros par action, soit une hausse de 56% en cinq ans.

Le profil de risque est toutefois plus élevé que pour une SIR classique. En 2022, la remontée des taux, la récession dans la zone euro et l’arrêt d’une coentreprise avec le géant Allianz avaient fait basculer le résultat net dans le rouge et contraint VGP à réduire son dividende de 60%.

Deuxième “chouchou” belge des analystes de Degroof Petercam, Shurgard n’a pas non plus le statut de SIR. Le spécialiste de la location de garde-meubles mène également un important programme de croissance dans le nord-ouest de l’Europe, avec notamment une hausse de 14% du nombre de centres de stockage au premier semestre, grâce à des développements propres et à des acquisitions.

Outre l’aspect plus cyclique de son activité, Shurgard ne met pas en avant la rémunération de ses actionnaires : le dividende reste figé à 1,17 euro par action depuis plusieurs années, malgré la progression régulière des résultats.

Généreux dividendes

Si vous privilégiez le rendement de dividende, mieux vaut vous tourner vers les SIR spécialisées dans l’immobilier de santé (maisons de repos et cliniques). Les deux acteurs de référence, Aedifica et Cofinimmo, sont sur le point de fusionner pour donner naissance au leader européen du secteur, avec un portefeuille estimé à 12 milliards d’euros réparti dans neuf pays. Un seul obstacle demeure : l’aval de l’Autorité belge de la concurrence. Ce risque fait d’Aedifica un choix plus défensif. En cas de refus (peu probable), Cofinimmo rechuterait en Bourse, alors que le titre cote déjà quasiment au niveau de l’offre de rachat (1,185 action Aedifica pour une action Cofinimmo).

La fusion entre Aedifica etCofinimmo va donner naissance au leader européen de l’immobilier de santé. © PG

Aedifica prévoit de verser un dividende brut de 4 euros au titre de l’exercice 2025, correspondant à un rendement brut de 6,4%. Ce généreux dividende ne devrait pas être remis en question par l’intégration de Cofinimmo, qui affiche elle-même un rendement encore plus attractif (7%). En revanche, Aedifica va perdre le bénéfice du précompte réduit de 15%, que la fusion aboutisse ou non. Le rendement net attendu pour le dividende, qui sera payé en 2026, ressort donc à 4,5%.

Et les SIR?

Du côté des analystes, les SIR préférées du moment sont WDP (11 recommandations d’achat sur 16) et Xior (7 sur 9). La première, à l’instar de VGP, est active dans les entrepôts logistiques et semi-industriels, mais avec un profil plus défensif, car elle dépend beaucoup moins de la promotion immobilière. WDP concentre son portefeuille sur les grands axes logistiques belges et néerlandais (70%) et a accéléré, depuis quelques années, son expansion en Roumanie (19%). Valeur phare de la décennie écoulée, WDP a intégré le Bel 20 en 2019. Mais depuis fin 2021, le titre a marqué le pas, perdant la moitié de sa valeur dans le sillage du ralentissement de l’e-commerce post-covid et de la remontée des taux. Après avoir longtemps coté avec une prime substantielle, WDP s’échange désormais proche de sa valeur intrinsèque (20,80 euros fin juin) et offre un rendement net de 4% sur la base du dividende prévu pour 2025.

Xior, de son côté, est spécialisée dans les kots étudiants, avec 22.123 lits répartis dans huit pays et 42 villes européennes. Entrée en Bourse en 2020, la SIR a souffert de l’envolée des taux en 2022, alors qu’elle était engagée dans un cycle d’expansion rapide. Le titre tarde toujours à rebondir malgré une forte décote par rapport à sa valeur intrinsèque (38,86 euros par action fin juin) et un rendement net de 4,2% sur la base du dividende prévu pour 2025.

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