Fonds: la Chine prête à se relever

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Les fonds exposés sur les actions domestiques chinoises ont réalisé des performances décevantes depuis leur lancement. Le potentiel reste toutefois important, alors que la Chine a gagné son bras de fer avec Trump.

Pendant longtemps, le marché chinois n’a été accessible qu’à travers les grandes sociétés étatiques cotées sur la Bourse de Hong Kong. Depuis moins de 10 ans, le marché des actions domestiques (cotées à Shanghai, Pékin ou Shenzhen) a toutefois commencé à s’ouvrir, et les gestionnaires d’actifs occidentaux ont été en mesure de lancer divers produits sur cette classe d’actifs émergente. Une vingtaine de fonds sont aujourd’hui accessibles aux investisseurs particuliers, dont une dizaine disposant d’un historique de performance supérieur à trois ans.

Profils diversifiés

Ces produits affichent en général une exposition très élevée sur les grandes capitalisations (87% des encours). Parmi les principales positions, plusieurs sociétés ressortent toutefois fréquemment, avec en premier lieu China Merchants Bank qui figure dans le top 10 de tous les fonds repris dans le tableau. Derrière, avec huit présences, nous trouvons l’assureur Ping An et le producteur de batteries électriques Amperex ; suivis avec sept présences par le producteur de spiritueux Kweichow Moutai. Enfin, avec six nominations, nous avons le producteur de véhicules électriques BYD, le premier producteur d’énergie hydroélectrique au monde China Yangtze Power et le producteur d’appareils électroménagers Midea.

Le marché boursier domestique chinois est extrêmement profond, avec plus de 5.400 sociétés cotées recensées à la fin avril 2025, et reste encore largement dominé par les investisseurs retail. Ceci se traduit par un comportement boursier qui a une corrélation assez faible avec les autres grands marchés boursiers. Cette grande diversité des profils se retrouve également dans la composition sectorielle des différents fonds, avec quatre segments qui ressortent plus particulièrement : le secteur financier (22% des encours en moyenne), les industrielles (20%), la technologie (15%) et la consommation cyclique (14%).

À noter que la plupart des mastodontes boursiers chinois (comme Alibaba ou Tencent) ne sont traditionnellement pas repris dans ces fonds, car leur cotation est assurée depuis Hong Kong ou sous forme de certificats cotés aux États-Unis.

Années difficiles

La performance boursière n’a pas été au rendez-vous ces dernières années. Les sorties de capitaux des gestionnaires internationaux ont fortement pesé sur la valorisation des actifs chinois, en créant un écart de valorisation gigantesque en faveur des géants technologiques américains. Dans le même temps, la crise du secteur immobilier a constitué un autre facteur de défiance vis-à-vis des actions chinoises.

En dépit de la belle hausse réalisée en 2024 (+ 15% en moyenne), les 10 fonds repris dans notre échantillon affichent des performances annualisées teintées de rouge vif tant sur un horizon de trois ans (- 6,9%) que sur cinq ans (- 2,9%). Et l’année 2025 ne semble pas être mieux orientée, avec un recul moyen de plus de 5% depuis janvier, notamment en raison des turbulences provoquées par les tarifs douaniers imposés par l’administration Trump, suivis par la réponse vigoureuse des autorités chinoises.

Résistance et rebond

Après avoir encaissé des reculs compris entre 8 et 10% suite au “Liberation Day” de Donald Trump, les indices chinois ont toutefois été en progression marquée, et ils sont récemment repassés au-dessus de leur niveau du début avril. La Chine est désormais considérée par de nombreux investisseurs comme le vainqueur de cette joute, avec une administration américaine qui a été contrainte de battre en retraite suite à l’effondrement des échanges commerciaux entre les deux pays.

“Les actions domestiques ont connu un mois d’avril mouvementé, constate Jack Lee, gestionnaire du fonds Schroders ISF China A Shares. Cependant, le marché s’est redressé grâce à l’apaisement des tensions. Le pire scénario est passé et les négociations futures permettront probablement de réduire les droits de douane à des niveaux plus gérables.” La Chine a mis en place des mesures de soutien au marché boursier qui limitent le potentiel de baisse du marché, avec également un contrôle du rythme des introductions en Bourse pour limiter l’offre de nouvelles actions.

Plans de soutien

Pendant que la Réserve Fédérale est actuellement en pause, et pourrait même ne pas descendre ses taux en 2025 si l’impact des tarifs est moins important que prévu, la banque nationale chinoise a récemment baissé son taux avant la tenue des récentes négociations avec les autorités américaines. “Cet assouplissement était nécessaire afin de stimuler la croissance, indique Chi Lo, senior market strategist pour la région Asie Pacifique chez BNP Paribas Asset Management. Cette mesure constituait également une manière de ne pas arriver en position de faiblesse à la table de négociation. Nous anticipons un nouvel assouplissement monétaire et budgétaire durant les prochains mois.”

“La Chine est une économie planifiée, avec un gouvernement qui exerce un contrôle important sur l’ensemble des leviers économiques, indique Kevin You. Il est donc essentiel de comprendre l’orientation des politiques afin d’évaluer les perspectives du marché boursier.” Depuis septembre 2024, le gestionnaire du fonds Allianz GIF–China A Shares a pu constater le changement de cap des autorités chinoises.

Jack Lee constate également que le sentiment à l’égard de la Chine s’est amélioré depuis le début 2025 grâce aux mesures de soutien du gouvernement en faveur du secteur privé. “L’efficacité des mesures de relance pour stabiliser le marché immobilier et stimuler la consommation déterminera si la reprise du marché peut s’étendre au cours du second semestre de l’année. La réunion du Politburo qui se déroulera en juillet prochain pourrait être un moment opportun pour l’annonce d’un plan de soutien plus large et plus efficace.”

Avancée technologique

L’arrivée de DeepSeek a constitué un autre tournant pour le marché chinois. Cet événement a prouvé que le pays possède les capacités et compétences nécessaires en matière de développement technologique, un élément qui était souvent négligé par les investisseurs occidentaux. Pour Kevin You, “DeepSeek a modifié structurellement les perspectives de croissance de la Chine, et a permis de mettre en avant les progrès du pays plutôt que de rester focalisé sur ses problèmes macroéconomiques”.

Le pays est aujourd’hui un leader dans plusieurs domaines (véhicules électrique, robotique industrielle, conduite autonome, énergie solaire, etc). “Quel que soit le résultat des négociations commerciales en cours, l’orientation de la Chine en matière de développement technologique et d’autosuffisance ne changera pas, estime encore Kevin You. Dans le domaine de l’IA générative, la Chine a déposé plus de 38.000 brevets au cours des 10 dernières années, soit plus de six fois plus que les États-Unis.”

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