L’impact d’un Trump “modéré” sur la croissance américaine

Pierre-Henri Thomas
Pierre-Henri Thomas Journaliste

Pour 2025, Belfius Asset Management table sur un Trump modéré, qui permettrait une croissance aux États-Unis et une inflation sous contrôle et donnerait encore les actions américaines gagnantes l’an prochain. Sinon…

« La grande question qui va déterminer les perspectives pour l’an prochain est de savoir si Trump sera modéré », résume Maud Reinalter, Chief Investment Officer de Belfius Asset Management. «  Nous avons un scénario principal et un scénario alternatif, tenant compte de risques plus importants, pour chacune des zones développées, et notamment les États-Unis et l’Europe. Et le déterminant, c’est la position de l’administration Trump sur le commerce ».

Le scénario de base de Belfius Asset Management (BAM) est donc celui d’un « Trump mesuré », un « smart Trump », un Trump intelligent.

Un Trump modéré

Ce scénario « prévoit une stimulation du moral des ménages et des entreprises, et donc une croissance du PIB, grâce à des réductions d’impôts, notamment sur les pourboires, les heures supplémentaires et les cotisations sociales », détaille BAM. L’inflation globale augmenterait modérément en raison de l’imposition de tarifs douaniers ciblés sur certains produits et/ou certaines zones, entraînant une hausse limitée de l’inflation à l’importation. Et, une production pétrolière accrue, sous le slogan “drill baby drill”, maintiendrait les prix de l’essence bas. Enfin, la Réserve fédérale devrait adopter une approche prudente concernant les baisses de taux, compte tenu de l’inflation et de la croissance accrues. » Tout cela permettrait donc une croissance sans trop d’inflation. Belfius Asset Management table sur une croissance américaine qui se maintiendrait à 2,7 % en 2024 et 2025, et atteindrait même 3 % en 2026. L’inflation, elle, continuerait de décélérer, passant de 2,9 % en moyenne cette année à 2,7 % en 2025 et à 2,5 % en 2026. Dans ce scénario, la Réserve fédérale américaine baisserait ses taux trois fois en 2025, puis n’y toucherait plus en 2026.

L’Europe, de son côté, reste confrontée à ses problèmes structurels : faible croissance, faible productivité, désindustrialisation, énergie chère. Et pour y remédier, la seule arme est celle de la politique monétaire, qui pourrait dès lors être plus agressive que la politique monétaire américaine. En revanche, Belfius Asset Management estime que « la mise en place d’un soutien budgétaire ou fiscal s’annonce plus complexe. La plupart des pays de la zone euro tout comme les États-Unis d’ailleurs, sont confrontés à des niveaux de dette très élevés ».

Côté chinois, les difficultés structurelles (crise immobilière, vieillissement, défiance des ménages) persistent elles aussi. « En Chine, les autorités visent toujours pour cette année une croissance de 5%, qui semble difficilement réalisable. La plupart des acteurs de marché pensent en effet qu’une fourchette de 4-4.5% est plus réaliste, de même pour les années à venir », estime BAM.

Maud Reinalter, CIO de Belfius Asset Management

Un Trump agressif

Et si Trump n’est pas smart ? Alors, ce sera la guerre tarifaire. « Des hausses agressives des tarifs douaniers sur les importations chinoises et mondiales pourraient provoquer une guerre commerciale globale, perturbant gravement les chaînes d’approvisionnement, souligne Maud Reinalter . Et des chaînes d’approvisionnement chamboulées, un marché du travail secoué par une politique anti-immigration brutale et une hausse des tarifs douaniers sur la plupart des produits importés, cela veut dire davantage d’inflation.

« L’inflation aux États-Unis remonterait aux alentours de 4 % (contre  2,7% dans le scénario principal), avec le risque que la Fed remonte ses taux. Dans ce cadre-là, la croissance se maintiendrait au début, mais baisserait fortement  à partir de la fin de l’année 2025 et en 2026.

Les actions américaines restent l’actif phare

Dans ce cadre, Belfius Management présente ses convictions pour l’an prochain :

La première est que la Bourse reste reine : « Nous maintenons une vision constructive sur les actions, grâce à la solide performance des entreprises et à un contexte macroéconomique qui reste robuste », souligne Belfius Asset Management. Et Wall Street, qui a déjà été en tête des performances cette année (un investisseur européen investi dans le S&P 500 a gagné 30%) reste « the place to be » : BAM conseille de « surpondérer fortement les actions américaines pour tenir compte à la fois du contexte actuel et de la politique future » et d’adopter une approche prudente sur les actions européennes.

Mais si l’on parle beaucoup des quelques actions technologiques stars (NVIDIA, Apple, Tesla,…), il ne faudrait pas oublier les plus petites capitalisations : «  les petites capitalisations ont affiché une performance faible par rapport à leurs homologues de plus grande taille. Cependant, le début des cycles de baisse des taux aux États-Unis et en Europe, dans un contexte économique toujours résilient, devrait permettre aux petites capitalisations de surperformer à nouveau. Une plus grande diversification de la contribution à la croissance des bénéfices, grâce à une plus forte contribution des petites capitalisations, devrait constituer un déclencheur positif dans les mois à venir », estime BAM.

Côté obligataire, le gestionnaire d’actif envisage une augmentation progressive de la duration. « Cette approche est adoptée pour prolonger la durée des positions obligataires en cas de dépassement des niveaux de taux d’intérêt prédéterminés. Il existe cependant des défis, tels que des dettes publiques élevées et des changements de politique possibles. »

Enfin, BAM conseille de détenir une position en or en tant que couverture contre les risques. « L’or offre une valeur refuge et des avantages de diversification en période de défis géopolitiques et d’une possible hausse de l’inflation due aux guerres commerciales ou aux tarifs d’importation. La demande des banques centrales dans les marchés émergents reste élevée et l’or a enfin une faible corrélation avec d’autres actifs. », dit le gestionnaire d’actifs.

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