40 % des vêtements pour enfants du site Shein contiennent des perturbateurs endocriniens
Une nouvelle étude de Testachats révèle que 40 % des vêtements provenant du site Shein contiennent des substances chimiques nocives. La présence de perturbateurs endocriniens dans les vêtements pour enfants est particulièrement alarmante pour l’organisation de défense des consommateurs.
Les vêtements bon marché peuvent irriter la peau, comme le démontrent les tests de laboratoire effectués par Testachats sur 25 pièces (vestes imperméables, t-shirts, chaussures et maillots de bain), provenant du site chinois de fast fashion à bas prix Shein. Dans 10 d’entre eux (40 %), au moins une substance dangereuse pour la santé a été repérée.
“Dans une paire de chaussures pour enfants, nous avons retrouvé des substances nocives qui dépassaient de loin la quantité autorisée : cinq fois trop de plomb et des centaines de fois trop de phtalates”, dénonce Julie Frère, porte-parole francophone de Testachats, pour qui “il est complètement irresponsable de proposer un tel article sur le marché européen”.
“C’est extrêmement problématique”, renchérit la porte-parole pour le nord du pays Laura Clays au Morgen, car Testachats n’a testé que des vêtements pour enfants. “Même les entreprises en dehors de l’Europe doivent faire des efforts pour protéger nos enfants et respecter au moins la loi”, plaide-t-elle. “Cela montre à quel point Shein bafoue les règles de manière flagrante. En particulier pour les vêtements pour enfants.”
“Cela montre à quel point Shein bafoue les règles de manière flagrante. En particulier pour les vêtements pour enfants”
Laura Clays, porte-parole de Testachats
Stijn Steuperaert de Centexbel, le centre de recherche et d’innovation belge spécialisé dans les textiles et les plastiques, nuance toutefois ces résultats dans le quotidien flamand. Seule une paire de pantoufles a dépassé la norme légale européenne, ce qui place le nombre de dépassements à 4 % au lieu de 40 %. Lors de tests antérieurs de Centexbel sur des produits chinois, 16 % n’étaient pas conformes, tandis que les tests de Greenpeace sur Shein montraient 15 %. Laura Clays parle pourtant d’un résultat comparable. “Cela montre à quel point Shein bafoue les règles de manière flagrante. En particulier pour les vêtements pour enfants, on espérerait au moins que les perturbateurs endocriniens soient réduits à zéro.”
Des substances toxiques
Parmi les substances trouvées lors du test figurent notamment des phtalates, des composés chimiques qui rendent les plastiques plus souples et qui sont des perturbateurs endocriniens, des allergènes tels que le nickel et le plomb, mais aussi des irritants, comme le diméthylformamide, la quinoléine, en plus d’éthoxylates de nonylphénol.
Ces substances chimiques sont reconnues comme perturbateurs endocriniens. Elles peuvent interférer avec le système endocrinien, le réseau de glandes qui produit et libère des hormones régulant de nombreux processus dans le corps. Les perturbateurs endocriniens peuvent causer des effets néfastes tels que des troubles de la reproduction (infertilité, anomalies de développement des organes reproducteurs), le développement de cancers hormonodépendants (comme le cancer du sein et de la prostate), des problèmes de croissance et de développement, des déséquilibres métaboliques (obésité, diabète), ou encore, un dysfonctionnement du système immunitaire.
1000 euros le test
Selon De Morgen, le Service Public Fédéral Santé Publique fait régulièrement des recherches sur les substances nocives dans des produits, mais rarement sur les vêtements. Le problème: chaque vêtement coûte environ 1.000 euros à tester, explique Testachats.
Il est également compliqué d’agir contre les entreprises étrangères incriminées. Le site Shein produit en effet des centaines de milliers de vêtements, de chaussures et d’accessoires. Il est difficile d’obtenir le retrait des produits qui dépassent les normes de la vente.
Effet cumulatif
Bien que les autres articles testés respectent les quantités maximales imposées par la législation européenne – le règlement REACH – Testachats juge celle-ci trop laxiste. “Nous demandons un renforcement du règlement européen REACH, en particulier pour ce qui concerne les perturbateurs endocriniens. Certains peuvent avoir des effets sur la santé à de très faibles concentrations, surtout s’agissant des enfants. Il faut également tenir compte de l’effet cocktail de toutes ces substances et de l’exposition chronique provenant de différentes sources” avertit-elle.
“Je ne dramatiserais pas : tout dépend de la durée de l’exposition.”
Stijn Steuperaert de Centexbel
Le biologiste Chris Callewaert souligne dans le quotidien flamand qu’il existe un manque significatif de recherches sur l’accumulation des substances chimiques. Le toxicologue Jan Tytgat décrit, lui, ce mélange chimique comme une “zone aveugle.” Stijn Steuperaert de Centexbel note, de son côté, que le contact répété avec différents perturbateurs endocriniens a un effet cumulatif. “Je ne dramatiserais pas : tout dépend de la durée de l’exposition.”
“Pourtant, même une infime quantité de contact au mauvais moment peut vraiment causer des dommages,” écrit Lieselot Theys dans son ouvrage Onze hormonen, onderschatte helden (ndlr: “Nos hormones, des héros sous-estimés”, non traduit en fr), “notamment chez les enfants à naître et les jeunes enfants.”
Temu visé
Ce n’est pas la première fois que Testachats contrôle des boutiques en ligne non européennes, parfois en collaboration avec d’autres organisations de consommateurs. La boutique en ligne chinoise Temu pose également divers problèmes en matière de sécurité des produits, ou de respect de ses obligations en tant que boutique en ligne. AliExpress, Wish, Amazon et consorts ne font pas mieux : lors d’un test précédent, deux produits sur trois provenant de ces plateformes de vente présentaient des problèmes de sécurité.
Les résultats problématiques des diverses analyses menées par l’organisation de consommateurs montrent que la législation existante n’est pas encore suffisamment contrôlée. “Trop de produits arrivent encore sur le marché intérieur sans respecter la législation européenne sur la sécurité des produits. Nos autorités doivent mener davantage de contrôles et nous demandons également aux plateformes de prendre au sérieux leurs obligations. Il en va de la sécurité des consommateurs et consommatrices” conclut Julie Frère.
Lavage obligatoire
Pour éviter d’être (trop) en contact avec ces substances nocives, la règle numéro un lors de l’achat de nouveaux vêtements est de les laver avant de les porter la première fois. Le lavage permet d’éliminer une partie des produits chimiques qui y sont imprégnés. Les vêtements de seconde main qui ont été lavés à plusieurs reprises sont moins contaminés.
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