Lave-linge et séchoir: des pistes pour contrer l’obsolescence programmée

© Getty Images/iStockphoto
Ilse De Witte Journaliste chez Trends Magazine

Kris Peeters, ministre de l’Emploi, de l’Economie et des Consommateurs, se penche sur la question de savoir si les fabricants de lave-linge programment des mécanismes d’obsolescence de leurs appareils. En attendant la réponse, que faire pour prolonger la durée de vie de votre gros électroménager ? Existe-t-il des solutions plus durables ?

Un sèche-linge Whirlpool déclare forfait au bout de trois ans. Le réparateur de la marque voit immédiatement qu’il manque une petite pièce à la porte. En 10 minutes, la pièce – qui coûte 9 euros – est remplacée et la facture établie. Au total, la réparation revient à un peu moins de 126 euros. L’exemple est authentique. Et quand on doit faire appel à un réparateur plusieurs fois coup sur coup, on finit par se résoudre à acheter un nouvel appareil…

Il est vrai que, de prime abord, il n’est guère dans l’intérêt des producteurs de machines à laver et séchoirs de fabriquer des machines qui durent. Plus ils vendent de machines, plus ils génèrent des bénéfices. Généralement, les fabricants vendent aussi des garanties supplémentaires, en sus de la garantie légale de deux ans. Dans le cas des appareils Whirlpool, par exemple, vous pouvez, pour 50 euros, conclure à l’achat un “plan de garantie” de cinq ans et bénéficier ainsi d’une garantie supplémentaire pendant trois ans.

Si vous souscrivez ce plan de garantie, une réparation ne vous coûtera plus que 50 euros au lieu des 126 euros de notre exemple. Dans le cas contraire, les frais peuvent bien entendu être nettement plus élevés si les pièces défectueuses sont chères. Chez Miele, vous pouvez prendre une garantie couvrant votre sèche-linge ou lave-linge jusqu’à 10 ans après l’achat. D’après le fabricant, vous ne trouverez nulle part ailleurs de garantie d’une aussi longue durée.

Sur divers forums, nous sommes tombés sur des doléances de consommateurs ayant conclu ce genre de prolongation de garantie auprès de fabricants de lave-linge qui se plaignaient des délais, de problèmes non couverts, etc. Il est donc plus que recommandé de lire attentivement les conditions avant de souscrire une garantie prolongée.

Si vous avez un souci et devez appeler le service de réparation d’une marque, il y a de fortes chances qu’on vous propose de contracter sur-le-champ une telle assurance. En échange d’une prime mensuelle relativement élevée, vous serez alors couvert pour des réparations relativement bon marché. Nous n’avons pas trouvé d’informations à ce sujet sur Internet, ce qui rend difficile toute comparaison entre les offres des différents fabricants. Cependant, des consommateurs signalent régulièrement que de telles offres leur ont été faites par téléphone.

Une question de “réparabilité”

D’après Test-Achats, les fabricants utilisent bien trop souvent des pièces détachées spécifiques à leur marque au lieu de composants standards plus faciles à trouver et moins chers. L’année dernière, l’association de défense des consommateurs a testé plusieurs lave-linge pour vérifier leur résistance à l’essorage et leur “réparabilité”. Elle a constaté que les producteurs incorporent parfois des pièces à usure rapide dans un composant plus grand, de sorte que c’est l’ensemble qui doit être remplacé en cas de défaillance. Cette enquête relevait également le peu d’informations disponibles pour les réparateurs indépendants. Whirlpool constituait, soit dit en passant, l’exception à la règle.

Test-Achats a par ailleurs demandé à divers fabricants quelle était la durée de vie estimée de leurs machines. Celle-ci varie de “deux ans par tranche de 200 euros du prix d’achat avec un maximum de huit ans” (Hotpoint-Ariston), à “15 ans, un chiffre réaliste” (Miele) en passant par “minimum 10 ans” (Candy, Samsung, Bosch, Siemens). Le ministre de l’Emploi, de l’Economie et des Consommateurs, Kris Peeters (CD&V), a commandé fin 2015 une étude sur la durabilité des machines à laver. Il veut également savoir si les producteurs programment l’obsolescence de leurs machines. Les conclusions de cette étude sont attendues pour la fin de cette année.

Réparateurs amateurs

De nos jours, les bricoleurs ont accès à quantité d’informations. Il existe ainsi des sites internet publiant toutes sortes de modes d’emploi (www.manuel-notice.fr, par exemple). Il y a aussi des pros de la débrouille qui montrent sur YouTube comment procéder à telle ou telle réparation. Et enfin, il existe des initiatives telles que les Repair Cafés, où des bénévoles réparent appareils électriques, vélos, jouets et tout ce que vous pouvez apporter sur place.

D’octobre 2014 à octobre 2015, 320 Repair Cafés ont été organisés, l’occasion pour 5.120 bénévoles d’aider 19.520 visiteurs à réparer leurs objets cassés. Au total, 9.800 objets, soit 65 %, ont pu être réparés.

Les producteurs incoporent parfois des pièces à usure rapide dans un composant plus grand, de sorte que c’est l’ensemble qui doit être remplacé en cas de défaillance.

L’accès est généralement gratuit, mais un droit d’entrée minime est parfois demandé. La réparation est, elle aussi, gratuite ; toutefois, les visiteurs satisfaits peuvent, s’ils le souhaitent, donner “un petit quelque chose” aux réparateurs de service. Il est naturellement moins évident d’apporter son sèche-linge au Repair Café qu’un fer à repasser ou le train électrique des enfants. On ne peut pas non plus savoir à l’avance si un des volontaires présents pourra ou voudra vous aider. Ce sera peut-être un coup dans l’eau.

” En outre, réparer des appareils électriques, comme des machines à laver, comporte parfois un risque d’incendie. C’est pour cela qu’on ne le fait pas au Repair Café”, explique Eva Van Velzen, coordinatrice de projet chez Netwerk Bewust Verbruiken (un réseau qui favorise la consommation durable en Flandre et dans la partie néerlandophone de Bruxelles). Nous avons pourtant trouvé plusieurs comptes-rendus de Repair Cafés locaux faisant mention de la réparation de sèche-linge et/ou de machines à laver.

Bundles, cette start-up néerlandaise, qui envisage de s'étendre sur le marché belge, propose des abonnements lessive et séchage via des machines haut de gamme qu'elle place chez le client. Abonnement qui donne, par exemple, droit à six lessives par semaine.
Bundles, cette start-up néerlandaise, qui envisage de s’étendre sur le marché belge, propose des abonnements lessive et séchage via des machines haut de gamme qu’elle place chez le client. Abonnement qui donne, par exemple, droit à six lessives par semaine.© Bundles

Il existe par ailleurs des initiatives telles que les SEL (système d’échange local) en Wallonie ou LETS en Flandre qui visent l’échange de services. On peut par exemple lancer un appel via le réseau pour faire réparer son lave-linge ou son séchoir en échange d’un repas ou de tout autre menu service dans un domaine où l’on excelle. Ou comment donner une deuxième chance à ses appareils électroniques détraqués quand on a deux mains gauches. Et si, malgré tous vos efforts, vous ne parvenez pas à remettre votre séchoir ou votre lave-linge en état et que vous souhaitez vous en débarrasser, il reste la solution du parc à conteneurs.

S’abonner au lieu d’acheter

Aux Pays-Bas, une start-up baptisée Bundles vend depuis peu des ” abonnements lessive et séchage”. Ces abonnements se composent d’un montant mensuel fixe et d’un prix par lessive/séchage. Pour les grands ménages où le lave-linge tourne plus de six fois par semaine, Bundles conseille un abonnement de 19,95 euros par mois et de 0,20 euro par lessive. La même famille paiera 40,90 euros si elle prend en plus un abonnement séchage. Cela fait une somme rondelette, mais Bundles promet, sur son site internet, de réduire ses prix unitaires dès qu’elle vendra ses abonnements à plus grande échelle. Le lave-linge actuellement utilisé par Bundles – un Miele WKG 120 WCS – coûte environ 1.100 euros, ce qui correspond plus ou moins à trois ans et demi d’abonnement avec six lessives par semaine. Mais le service n’est évidemment pas le même. A titre de comparaison : vous pouvez faire venir chez vous un technicien Miele pour un contrôle annuel, un nettoyage et un conseil, le tout pour 74 euros plus les frais de déplacement (ce service s’appelle ExclusiveCare), ce qui prolonge d’un an la garantie de l’appareil. En lisant les plaintes sur les forums des organisations de défense des consommateurs, on se rend compte qu’il reste quand même des pannes qui ne sont pas couvertes par la garantie. Ou des frais supplémentaires qui viennent parfois s’ajouter.

Avec Bundles, c’est la start-up qui installe le lave-linge et le sèche-linge chez ses clients et qui se charge de l’entretien et des réparations. Comme Bundles a tout intérêt à ce que les machines durent le plus longtemps possible, elle a développé une appli qui prodigue des conseils personnalisés aux clients afin qu’ils se montrent les plus écologiques et économes possibles. De plus, Bundles rapporte les machines usées chez le fabricant, qui récupère et réutilise certains composants.

Bundles n’opère pas encore en Belgique, mais son fondateur et directeur général Marcel Peters a fait savoir à la rédaction de Trends-Tendances que la société projetait d’étendre ses activités à notre pays, où il n’y a pas encore d’initiatives similaires, selon lui. En Belgique, si on n’a pas envie de racheter un nouveau lave-linge ou un séchoir toutes les x années, on n’a actuellement pas d’autre choix que de se rendre au salon-lavoir ou dans la blanchisserie du quartier avec sa montagne de linge.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content