Un locataire qui ne règle plus ses loyers ou qui dégrade son logement constitue une situation délicate pour tout propriétaire.
Il est essentiel de réagir rapidement, tout en respectant les procédures légales. Ce problème survient souvent en fin de bail, réduisant ainsi les chances de récupérer son argent.
Ne jamais expulser soi-même
La première erreur à éviter est de vouloir expulser le locataire par ses propres moyens ou de lui interdire l’accès au logement. Une telle initiative peut entraîner des poursuites pour violation de domicile, dégradation de biens ou même violences. Pour éviter toute mauvaise surprise, il est primordial de passer par la voie légale. La rigueur et le respect de la loi restent en effet les meilleures protections pour le bailleur.
Privilégier la solution amiable
Un retard de paiement ponctuel ne signifie pas toujours que le locataire est de mauvaise foi. Il peut traverser un mois plus difficile. Pour de petits montants, une action en justice n’est pas forcément nécessaire. La négociation reste la solution la plus simple, la moins chronophage et surtout la moins coûteuse.
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La mise en demeure
Si, malgré les demandes explicites, le locataire ne paie toujours pas, la première étape officielle consiste à envoyer une lettre recommandée. Celle-ci doit rappeler les arriérés de loyers ou les dégradations constatées et mettre en demeure le locataire de régulariser la situation dans un délai précis. Cette mise en demeure est obligatoire avant toute action judiciaire et permet parfois de trouver un arrangement.
Il est souvent possible de convenir d’un plan d’apurement ou d’utiliser la garantie locative pour couvrir une partie des sommes dues.
Saisir le juge de paix
Si le retard atteint deux mois sans solution, il est préférable de saisir le juge de paix. Le bail ne peut être résilié par le juge que dès le troisième mois impayé. Compte tenu des délais de procédure et de jugement, les arriérés peuvent rapidement atteindre trois à six mois. Il est donc important d’agir rapidement en cas de mauvaise foi évidente.
Deux options s’offrent au propriétaire :
- Une citation par huissier, impliquant généralement l’intervention d’un avocat et des frais supplémentaires.
- Le dépôt d’une requête directement par le bailleur, sans avocat, à condition d’y joindre toutes les informations essentielles (identité des parties, bail, résumé du litige, certificat de résidence, etc.).
Cette seconde option permet de comparaître soi-même ou de mandater un proche par procuration. Les frais restent limités : 26 € de participation au fonds d’assistance judiciaire pour une requête, plus environ 50 € de frais d’enrôlement du dossier, à charge de la partie condamnée après jugement.
L’audience peut être fixée sous 15 jours minimum, mais il faut souvent attendre plus longtemps. Le juge peut rendre sa décision immédiatement ou reporter l’affaire si le dossier nécessite des précisions. Le jugement est ensuite prononcé sous un mois environ et enregistré officiellement. En cas d’expulsion, le propriétaire peut transmettre le jugement à un huissier pour exécution. Un recours est possible devant le Tribunal de première instance en cas de désaccord.
Le rôle de l’huissier de justice
L’huissier notifie la décision au locataire et lui accorde un délai pour quitter les lieux. Si le locataire refuse, l’huissier revient avec la police, un serrurier et des déménageurs pour procéder à l’expulsion. Les biens sont alors inventoriés et entreposés à ses frais pendant six mois maximum.
Délais et coûts
La procédure d’expulsion est longue et coûteuse. Elle dure en moyenne sept à huit mois, et peut parfois s’étendre jusqu’à deux ans. Les frais s’élèvent généralement entre 1.000 et 1.500 €, auxquels s’ajoutent éventuellement les frais d’experts (les montants varient selon le type d’expertise), d’avocats ou encore de signification du jugement (environ 200 €).
Ces frais sont avancés par le propriétaire et, en théorie, récupérables sur le locataire. En pratique, ils sont rarement récupérés si le locataire est insolvable. Les indemnités supplémentaires sont souvent minimes.
La trêve hivernale
Dans le logement privé, la trêve hivernale ne s’applique pas systématiquement, mais le juge peut accorder des délais supplémentaires selon les circonstances.
- Bruxelles : depuis le 1er septembre 2023, le moratoire hivernal s’applique aux logements sociaux et privés. Aucune expulsion n’est possible du 1er novembre au 15 mars, sauf exceptions (relocation du locataire, danger pour autrui, logement dangereux ou force majeure). Un Fonds de solidarité peut indemniser le propriétaire pour les loyers impayés pendant cette période.
- Wallonie : pas de trêve hivernale pour les logements privés. Seuls les logements sociaux bénéficient d’une protection entre le 1er novembre et le 15 mars, sauf si le locataire refuse l’aide d’un CPAS. Le juge de paix peut prolonger les délais selon les circonstances.
- Flandre : pas de trêve hivernale, ni pour les logements privés ni sociaux. Le locataire dispose en principe d’un mois pour quitter les lieux après décision du juge, délai pouvant être prolongé selon les situations exceptionnelles.
Le cas particulier des squatteurs
Découvrir que son bien est occupé illégalement est stressant et complexe. Contrairement à un locataire défaillant, le squatteur n’a signé aucun contrat et n’a donc aucun droit d’occupation.
Le squat est une infraction pénale. La première démarche du propriétaire (ou du locataire légal, s’il existe) est de déposer plainte à la police. Sans plainte, aucune expulsion ne peut être initiée.
La procédure est similaire à une expulsion locative classique, mais les délais sont raccourcis : le juge peut ordonner l’expulsion 8 jours après la signification du jugement. Elle concerne tous les occupants « sans titre ni droit ».
Il existe également la voie pénale via le procureur du Roi et un juge d’instruction. Depuis 2022, le procureur peut demander l’expulsion avec l’autorisation du juge d’instruction, qui doit statuer sous 72 heures. L’ordonnance est affichée et notifiée aux squatters, au propriétaire, au CPAS et à la police. Les occupants ont alors 8 jours pour quitter les lieux, sauf recours suspensif.
Si les squatters refusent de partir, la police intervient avec un serrurier, et les biens sont évacués. Le refus d’obtempérer est une infraction supplémentaire, passible de prison (8 jours à 1 an) et/ou d’une amende (26 à 200 €).
Les sanctions varient selon que le logement est occupé ou non :
- Logement occupé : 15 jours à 2 ans de prison + amende de 208 à 2.400 €
- Logement inoccupé : 8 jours à 1 an de prison + amende de 208 à 1.600 €