Protection des consommateurs : le pari risqué des tribunaux spéciaux

Le gouvernement fédéral envisage de créer des tribunaux spéciaux pour aider les consommateurs à faire valoir leurs droits face aux entreprises malhonnêtes, annonce le ministre Rob Beenders (Vooruit).
Rob Beenders pense surtout au secteur de la construction. « Par exemple, les personnes qui construisent ou rénovent une maison et qui se retrouvent sans le sou parce que l’entrepreneur fait faillite. Ou qui achètent un appartement neuf et dont le parking n’est pas étanche. Il est souvent difficile d’assigner ces entrepreneurs et promoteurs de la construction. Ils ont du temps et de l’argent. Ils font fuir les gens. La loi actuelle ne protège pas suffisamment les consommateurs. »
L’intention de « raccourcir les procédures judiciaires pour les litiges de consommation » figurait déjà dans l’accord de coalition, mais n’avait pas encore été précisée. M. Beenders examine actuellement avec le ministère de la Justice où ces nouveaux tribunaux peuvent être mis en place. La ministre des Classes moyennes, des Indépendants et des PME, Éléonore Simonet (MR) a fait savoir samedi qu’elle n’était pas favorable à cette proposition.
Onéreux et inutile
« Créer une nouvelle couche judiciaire serait non seulement très onéreuse, à l’heure où l’on tente plutôt de réduire le coût de l’État, mais aussi inutile. De plus, cela sèmerait la confusion auprès des consommateurs, alors que l’objectif du gouvernement est justement de raccourcir les délais des procédures judiciaires et leur complexité, que ce soit pour les consommateurs, les travailleurs et les entreprises », souligne la ministre.
« De plus, le ministre Beenders oublie que de nombreuses entreprises sont souvent, elles-mêmes, victimes de défauts de paiement par leurs clients. Enfin, cette vision unilatérale qui laisse à penser que le secteur de la construction (l’un des principaux pourvoyeurs d’emplois du pays) est un monde de voleurs n’est pas acceptable. »
Moderniser le loi Breyne
Éléonore Simonet ajoute que l’accord de gouvernement prévoit justement de moderniser la loi Breyne qui a pour but de protéger les consommateurs face aux pratiques commerciales déloyales. L’accord prévoit également la mise en place d‘un service de médiation dédié au secteur de la construction, ainsi qu’un régime de protection juridique spécifique pour les consommateurs qui entreprennent des travaux de rénovation.
La fédération de la construction Embuild a également peu apprécié les propos du ministre Beenders. « La toute grande majorité des entreprises de construction respectent en effet les règles », pointe l’organisation, qui estime que sur les 100.000 chantiers réalisés l’an dernier, « presque tous ont été menés à bien dans un climat de confiance entre l’entrepreneur et le client. Les cas problématiques mentionnés par le ministre restent donc heureusement très limités. »
Embuild plaide plutôt pour « une interdiction professionnelle plus rapide et plus large à l’encontre des entrepreneurs malhonnêtes, afin qu’ils ne puissent plus tromper les consommateurs. » La fédération a ajouté rencontrer la semaine prochaine Rob Beenders avec l’espoir de conclure des accords concrets « afin d’améliorer, en partenariat, la relation entre consommateur et entrepreneur. »