L’étau réglementaire se resserre autour des passoires énergétiques à Bruxelles

Bruxelles
© Getty Images

Le Parlement bruxellois a renforcé vendredi l’arsenal de mesures réglementaires en matière de performance énergétique des logements dans la capitale. D’ici 2033, les passoires énergétiques (les logements d’un PEB F et G) devront avoir été rénovées. Autre échéance: l’amélioration, en vue de leur disparition, des PEB D et E d’ici 2045.

Les députés ont adopté par 46 oui (majorité), 12 non (PTB; N-VA; et Vlaams Belang) ; et 20 abstentions (MR; les Engagés), l’ordonnance qui modifie ainsi le Code Bruxellois Air Climat Energie en tenant compte de la stratégie de rénovation énergétique du bâti.

Pour le ministre de la Transition climatique, Alain Maron (Ecolo), il s’agit de répondre à la nécessité d’amplifier l’action déjà engagée pour atteindre l’objectif de -47% d’émissions de gaz à effet de serre en 2030, conformément aux objectifs européens.

Dans ce contexte, l’ensemble des logements bruxellois devront disposer d’un certificat de Performance Energétique du Bâtiment (PEB) d’ici 2030. 

A défaut d’obtenir un certificat en bonne et due forme, un propriétaire se rendra coupable d’une infraction environnementale passible d’une amende pouvant aller jusqu’à 100.000 euros et à une peine d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à deux ans. Dans la pratique, cette sanction pénale ultime prévue dans le contexte plus large des infractions environnementales ne devrait a priori s’appliquer que si le parquet entamait spontanément des poursuites, ce qui n’est pas dans ses habitudes. L’ordonnance mise plutôt sur un arsenal très progressif de sanctions administratives sensiblement moins sévères.

Plus de la moitié des gaz à effet de serre

A l’heure actuelle, le bâti bruxellois produit plus de la moitié des gaz à effet de serre sur le territoire de la Région et près d’un tiers des particules fines émises dans l’air. 27% des ménages bruxellois sont en situation de précarité énergétique et un tiers du bâti à Bruxelles n’est pas du tout isolé. 

Selon le ministre Maron, conformément Plan Air Climat Energie adopté en 2023, l’ordonnance vise à faire évoluer le bâti bruxellois en fixant un cap clair sur le long terme.

Dans l’opposition, Aurélie Czekalski (MR) a estimé que des moyens et des politiques utiles avaient été engagés, mais qu’il manquait une vision partagée ainsi qu’un cadre opérationnel assorti de moyens et mécanismes de financement. Le texte manque de priorités, y compris en matière de financement, et d’actions ciblées, a-t-elle jugé.

Cieltje Van Achter (N-VA) n’a pas dit autre chose, mais c’est à ses yeux suffisant pour non pas s’abstenir, comme l’a fait le MR, mais pour rejeter le texte. Pour elle, le projet du ministre n’est “pas réaliste, voire irréfléchi et inéquitable”. Ainsi, les objectifs d’éradication des passoires énergétiques nécessiteront des contrôles sans savoir si l’administration sera en mesure de les effectuer.

Bruno Bauwens (PTB) a qualifié le texte déposé par Alain Maron d'”aussi déconnecté que scandaleux”. Pour lui, il y a lieu de se demander comment ceux qui n’ont pas de moyens vont rénover leur logement. L’élu de la formation d’extrême gauche, a proposé de recourir à un système de tiers payant comme en Allemagne. Via ce procédé, une banque publique prête de l’argent et le propriétaire rembourse l’emprunt progressivement sur les économies d’énergie réalisées.

Le problème des co-propriétés

Dans la majorité, on a préféré voir le verre à moitié plein.

“Le réchauffement climatique n’est pas une lubie. Les inondations en Wallonie. l’ont démontré, comme actuellement la sécheresse la plus importante de l’histoire de la ville de Barcelone, même en hiver….. Les objectifs nous sont imposés par la directive européenne”, a rappelé Martin Casier (PS). 

Pour lui, l’alliance bruxelloise pour le Climat, Rénolution, doit monter en puissance. L’enjeu est que la transition soit juste, ce qui nécessitera sans doute de quitter le système des primes, fût-ce partiellement. L’élu socialiste a plaidé pour une organisation de rénovation par quartiers, par les pouvoirs publics. 

Comme celui-ci, Marie Nagy a dit rester inquiète pour les copropriétés. qui concernent 40% du bâti. Pour elle, l’option prise par l’Europe en la matière est “très productiviste”, et ne prend pas en considération la question des matériaux et des comportements. L’échéance fixée pour les passoires énergétiques d’ici 2033 et les logements crédités d’un PEB D et E d’ici 2045, nécessitent d’organiser 29.700 chantiers par an.

Cela impose donc d’avoir une vision consolidée de l’effort à fournir. L’élue amarante a enfin regretté que les amendes se profilent à l’horizon alors que l’on assistera à un goulet d’étranglement à tous les niveaux: financier, administratif, urbanistique, ou encore de l’emploi.

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