La Région bruxelloise relance le droit de gestion publique des logements inoccupés
Le parlement bruxellois a adopté à une large majorité – majorité + PTB et les Engagés – le projet de réforme du droit de gestion publique de logements. Celui-ci permet, depuis 2003, aux communes et CPAS notamment de prendre temporairement en gestion un logement inoccupé ou insalubre afin de le rénover et de le mettre en location à un loyer réduit pour une période de 9 ans.
Le droit de gestion publique peut s’exercer de manière volontaire, avec l’accord du propriétaire du bien ou de manière forcée, lorsque le propriétaire est négligent.
Il existe sur le papier depuis près de 20 ans, mais dans les faits, il a été jusqu’ici très peu appliqué.
Partant du postulat que dans de nombreux cas, la vacance de logement s’inscrit en opposition au droit à un toit, dans un secteur du logement en crise dans la capitale, la secrétaire d’Etat au logement, Nawal Ben Hamou (PS), a déposé en conséquence au parlement un projet de réforme visant à lever les obstacles au droit de gestion publique.
A commencer par l’établissement d’un inventaire centralisé, à l’échelle de la Région, des logements présumés inoccupés, après un contrôle sur place.
Concrètement, le projet d’ordonnance propose une clarification de la procédure pour que chaque étape de celle-ci soit non seulement accessible pour les opérateurs de gestion publique mais aussi compréhensible pour les propriétaires susceptibles d’être visés par cette mesure.
Le droit de gestion publique ne tombe pas du jour au lendemain. Ce n’est qu’après un comportement infractionnel répété et téméraire que le titulaire d’un droit réel sur le logement visé par la mesure se retrouve dessaisi de la gestion de son bien.
Désormais, seuls une commune, un CPAS, une régie communale autonome, la Régie foncière de la Région de Bruxelles-Capitale et le Service public régional de Bruxelles pourront activer le dispositif.
Le propriétaire ne pourra reprendre la gestion de son bien de manière anticipée qu’après le remboursement intégral du solde des frais engagés par l’opérateur public dans le cadre de la prise en gestion publique (procédures et travaux de rénovation) et après la signature d’un bail par un premier locataire au barème A(gence)I(mmobilière)S(ociale).
De cette façon l’objectif du droit de gestion publique de remettre le bien sur le marché est garanti. Pendant toute la durée de la gestion publique, le loyer est conforme au montant de loyer AIS.
Même en cas de reprise anticipée du bien, le loyer est plafonné pendant une période de 9 ans à dater de la prise en gestion.L’avance aux communes pour le coût des travaux de rénovation d’un bien pris en gestion publique sera doublée: elle passera de 50.000 à 100.000 euros.
La répartition du produit des amendes pour “inoccupation” de bien sera également revue afin d’alimenter le Fonds “Droit de Gestion Publique” qui dispose déjà d’un solde de 5 millions d’euros: 75% seront versés dans le Fonds et 25% seront versés à la commune sur le territoire de laquelle se situe le bien inoccupé pour qu’elle puisse développer sa politique en matière de logement.
Bruxelles Logement mettra une équipe de soutien de personnes expertes en la matière (juristes, architectes, gestionnaires de travaux, etc.) à disposition des communes et des CPAS.
Chaque commune disposera en outre d’un équivalent temps plein financé par la Région pour remettre ces logements sur le marché locatif.
Il ne s’est trouvé personne, lors du débat pour s’opposer au principe du droit de gestion publique de biens laissés à l’abandon, pas même dans l’opposition où le texte a reçu le soutien du PTB et des Engagés.
Le MR, par la voix de Vincent De Wolf, s’est montré plus méfiant. Il a déposé plusieurs propositions d’amendements, toutes rejetées, pour mieux protéger le droit de propriété. Pour le député-bourgmestre d’Etterbeek, il eût ainsi fallu laisser un délai plus long pour permettre aux parties concernées de négocier une sortie d’inoccupation avant d’entrer dans le processus de gestion publique.
Il s’est également demandé si la Région avait réellement la volonté d’aider les propriétaires avant de les sanctionner.
Mathias VandenBorre (N-VA) est allé un cran plus loin dans la critique: sous le couvert d’un légitime souci de centralisation, la réforme traduit une “vision communiste” de la problématique en accordant un pouvoir excessif aux gestionnaires immobiliers publics, a-t-il dit.
Tout vient à point à qui sait attendre, a ironisé dans la foulée Françoise De Smedt (PTB). Pour l’élue d’extrême gauche, le texte constitue une avancée, même s’il importe avant tout de construire plus de logements sociaux dans la capitale.