Compacte, verte, sans voiture, la ville idéale pour le climat
Avec 70% de citadins attendus en 2050, les villes sont vitales dans la lutte contre le réchauffement climatique, selon les scientifiques qui esquissent le portrait idéal d’une ville “compacte”, verte et dans laquelle on se déplace à pied.
Les zones urbaines représentent déjà environ 70% des émissions mondiales de gaz à effet de serre, note le nouveau rapport des experts climat de l’ONU (Giec) publié lundi.
Et avec l’urbanisation galopante dans ce XXIe siècle qui “sera le siècle urbain”, avec près de 7 milliards de citadins en 2050, ces émissions pourraient exploser si rien n’est fait pour décarboner les villes existantes et organiser différemment celles qui sortiront de terre.
“Bien que l’urbanisation soit une tendance mondiale souvent associée à l’augmentation des revenus et de la consommation”, et donc potentiellement des émissions, “la concentration des gens et des activités est une opportunité pour améliorer l’efficacité des ressources et décarboner à grande échelle”, insiste le Giec.
Parce qu’à niveau de consommation égal, un habitant des villes requiert moins d’énergie que son voisin des campagnes, “grâce à la plus grande densité qui permet le partage des infrastructures et des services, et des économies d’échelle”.
Partant de ce principe, le Giec dessine le portrait d’une ville future bas-carbone qui serait d’abord “compacte”, c’est-à-dire avec une densité relativement élevée sans s’étaler à l’infini, limitant les trajets entre domicile, travail et services.
“Des grandes villes organisées autour de plus petites communautés”, commente Diana Reckien, de l’université néerlandaise de Twente, qui a participé à un rapport précédent du Giec. “Quatre pâtés de maison, avec seulement des petites rues, un marché ou un parc au milieu, et tous les services, alimentation, médecin, coiffeur…”, explique-t-elle à l’AFP.
Et ensuite, de quartier en quartier “un système de transport efficace” et abordable, plaide-t-elle, prenant Berlin en exemple ces dernières années. Le but ultime: “limiter au maximum les voitures et réduire la nécessité pour tous les foyers de posséder une voiture”.
Autres couleurs primordiales de cette palette urbaine bas-carbone: le vert et le bleu.
Forêts urbaines, arbres dans les rues, toitures et façades végétalisées, surfaces perméables, points d’eau… Ces “infrastructures vertes et bleues” peuvent non seulement aider les villes à absorber du carbone, mais aussi à l’adaptation aux impacts du réchauffement.
Plus de végétation permet par exemple de réduire les effets des îlots de chaleur urbains qui rendent les villes bétonnées encore plus suffocantes lors des canicules, qui se multiplient.
Pour des générations
“Les villes doivent combiner des efforts d’atténuation et les efforts d’adaptation qui peuvent créer des bénéfices locaux visibles”, plaide Tadashi Matsumoto, expert à l’OCDE, pas impliqué dans le rapport.
“Si vous parlez aux citoyens seulement de mesures pour réduire les émissions, ils pourraient ne pas voir ça comme une priorité, mais si vous leur parlez inondations ou îlot de chaleur urbain, ça peut devenir leur problème”, dit-il à l’AFP. Et ainsi les convaincre plus facilement.
Il est important que les gens “sachent pourquoi les choses sont faites, et comment cela peut améliorer leur vie. D’autant que c’est souvent payé par leurs impôts”, poursuit Diana Reckien, qui voit les villes comme un “lieu idéal d’expérimentation”.
Mais pour devenir réelles, ces futures villes bas-carbone n’ont pas toutes les mêmes défis à relever, note le rapport du Giec qui distingue trois catégories de zones urbaines.
Les “villes établies” devront remplacer ou moderniser le bâti existant, tout en encourageant l’évolution des modes de transports et l’électrification du système énergétique urbain.
Les “villes à croissance rapide” devront planifier pour maintenir de courtes distances entre domicile et travail.
Et enfin les villes nouvelles ou émergentes, en partant de zéro, ont “un potentiel sans égal de devenir bas-carbone ou neutre”.
“Une part importante des infrastructures urbaines qui seront en place en 2050 ne sont pas encore construites”, insiste le Giec, évoquant le potentiel des zones d’habitations informelles où vivent plus de 880 millions de personnes.
Alors il faut le faire bien du premier coup pour éviter d’avoir à tout réaménager plus tard. “La façon dont ces nouvelles villes de demain seront conçues et construites verrouillera les comportements énergétiques urbains pour des décennies, voire des générations”.
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