Les jobs d’étudiant et les flexi-jobs frappés par la crise… mais tout n’est pas si noir
Pour les étudiants jobistes, les flexi-jobistes et les intérimaires, l’été pourrait être moins ensoleillé que prévu. D’après les experts du marché de l’emploi, les secteurs de l’horeca et de l’événementiel continueront à souffrir tout particulièrement des répercussions de la crise sanitaire.
Les jobs d’étudiant sont, pour beaucoup de jeunes, une source importante de revenus. D’après une étude récemment menée par l’agence d’intérim Randstad, les étudiants jobistes ont gagné un peu plus de 2.600 euros en moyenne en 2018. L’ONSS, l’Office national de sécurité sociale, a recensé cette année-là plus de 544.000 étudiants jobistes, un record. ” Les secteurs qui recourent le plus souvent aux étudiants sont l’horeca, le commerce de détail, la fonction publique et le non-marchand, énumère Jan Denys, spécialiste du marché de l’emploi chez Randstad. La plupart d’entre eux sont caissiers, employés administratifs, magasiniers ou ouvriers de production. ”
Pour cet été, les prévisions sont moroses. Alors que durant les vacances de Pâques 2019, Randstad avait employé 18.000 étudiants sous contrat intérimaire, ils n’ont pas été plus de 6.000 (soit une chute de 65 %) cette année. Chez les intérimaires non jobistes, le recul, à Pâques 2020 toujours, a franchi la barre des 40 %.
” Il est, depuis, de 45 % dans les deux segments “, calcule Paul Verschueren, directeur research & economic affairs chez Federgon, la fédération des prestataires de services RH. L’expert s’attend à voir trois éléments jouer en la défaveur des étudiants cet été : ” Le premier est la conjoncture économique, qui pourrait demeurer chancelante un temps encore ; un tel contexte incite les entreprises à freiner le recrutement de travailleurs temporaires. Le deuxième est l’annulation de tous les grands événements et festivals, traditionnellement pourvoyeurs d’énormément d’emplois pour les jeunes. Le troisième, enfin, est le fait qu’une proportion très élevée d’entreprises n’ont pas encore décidé de réintégrer leurs bureaux, ce qui complique également la position des étudiants. ”
Lueur d’espoir
Federgon pronostique une régression de quelque 30 % du travail étudiant cet été. Paul Verschueren n’exclut toutefois pas toute lueur d’espoir : ” Le confinement a aussi généré des jobs, surtout dans les secteurs du commerce de détail et de la distribution, nuance-t-il. Non seulement à cause du surcroît d’activité lui-même, mais aussi parce que les grands magasins, les services de livraison à domicile et les centres d’appel se sont, par la force des choses, dotés de nouvelles fonctions, celles qui consistent à désinfecter les chariots de supermarché, par exemple, ou à répondre aux divers numéros d’appel créés à la suite du confinement. Il n’est pas impossible que ces secteurs continuent à avoir besoin de main-d’oeuvre cet été, même si cette accélération ne suffira pas à compenser le tassement dans les autres “.
Si un pourcentage élevé de Belges décident de ne pas partir à l’étranger cet été, l’offre de jobs d’étudiant dans l’horeca et dans les parcs d’attractions pourrait s’intensifier.” Paul Verschueren, Federgon
Principal fournisseur d’emplois d’étudiants, l’horeca concentre pour l’heure toutes les incertitudes. Il semble vouloir opérer un redémarrage hésitant, mais les inconnues demeurent nombreuses. ” Si un pourcentage élevé de Belges décident de ne pas partir à l’étranger cet été, l’offre de jobs d’étudiant dans l’horeca et dans les parcs d’attractions pourrait s’intensifier “, espère notre interlocuteur.
Impossible par ailleurs de savoir si les autres formes de travail flexible souffriront dans les mêmes proportions. Les employeurs qui ont besoin de main-d’oeuvre supplémentaire le week-end, par exemple, peuvent depuis plusieurs années faire appel aux flexi-jobs, lesquels sont toutefois soumis à une réglementation beaucoup plus stricte que le travail étudiant. Les flexi-jobistes coûtent en outre légèrement plus cher. Et ils ne peuvent être employés que dans deux secteurs : l’horeca et le commerce de détail.
” Nous avons assisté, au quatrième trimestre de 2019, à une augmentation subite du nombre de flexi-emplois dans le commerce, indique Paul Verschueren. Ces jobs se concentraient auparavant surtout dans l’horeca, où leur nombre est depuis plusieurs mois, à l’évidence, proche de zéro. Il n’est pas impossible que le secteur commercial compense aujourd’hui partiellement cette chute. Les flexi-jobistes y sont généralement recrutés pour des durées plus longues et pour assurer des horaires plus réguliers. Je ne crains pas d’assister à leur remplacement massif par des étudiants cet été, au prétexte que ceux-ci coûtent un peu moins cher. ”
Assouplissement
Le net assouplissement dont a fait l’objet il y a quelques années la législation sur le travail étudiant a rendu cette formule beaucoup plus intéressante pour les employeurs. Les jeunes peuvent désormais travailler 475 heures par an. Les journées de deux ou trois heures ne sont plus comptabilisées comme des journées complètes et celles de plus de huit heures sont autorisées. L’application student@work facilite le décompte des heures pour l’étudiant. Les cotisations de sécurité sociale sont limitées à 5,43 % à charge de l’employeur, à 2,71 % à charge de l’étudiant (cotisations dites ” de solidarité “). Enfin, tous les secteurs sont ouverts aux étudiants, à condition qu’ils soient âgés de 16 ans au minimum.
Les flexi-jobistes ont pour eux, entre autres avantages, celui de l’expérience. Le système est en effet accessible aux travailleurs plus âgés, y compris aux retraités qui souhaitent arrondir leurs fins de mois. La principale condition à l’acquisition de ce statut veut qu’à moins d’être retraitée, la personne travaille à 4/5e temps au moins pour un autre employeur. Le calcul est effectué sur le trimestre de référence T-3. Imaginons que quelqu’un soit candidat à un flexi-job en janvier : cette personne devra avoir travaillé à 80 % au moins aux mois d’avril, mai et juin précédents.
Si toutes ces conditions sont réunies, le flexi-job, par définition très souple, est une solution de rechange intéressante au travail étudiant, même si celui-ci demeure légèrement plus avantageux. L’employeur s’acquitte, sur le salaire du flexi-jobiste, d’une cotisation réduite de 25 %, ce qui est nettement plus élevé que la cotisation de solidarité. Et le statut de flexi-jobiste est financièrement extrêmement intéressant, puisque les rémunérations perçues dans ce cadre sont exonérées d’impôts et de cotisations de sécurité sociale.
Indépendamment de la chute enregistrée durant les vacances de Pâques, la demande, dans plusieurs secteurs, s’est avérée supérieure à la normale. Bonne nouvelle pour les étudiants qui y sont très actifs : les heures travaillées entre le 1er avril et le 30 juin ne seront pas prises en considération pour le calcul du quota. En outre, la rémunération payée pour ces heures sera exonérée du précompte professionnel. En temps normal, tout dépassement du maximum autorisé donne lieu, sur cette tranche, au prélèvement des cotisations de sécurité sociale ordinaires, voire, pour les parents, à la perte du droit aux allocations familiales.
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