Télétravail: et les “winners” sont…
De plus en plus d’entreprises et d’administrations font le choix d’un modèle hybride mêlant durablement télétravail et présence au bureau. Une évolution qui fera de nombreux perdants et gagnants en Bourse!
Depuis le mois dernier, le télétravail n’est plus obligatoire en Belgique (même s’il reste recommandé) ou en France notamment. Toutefois, le retour au bureau à 100% est loin d’être acquis. En effet, le télétravail imposé durant la crise sanitaire a permis d’apaiser les craintes de nombreuses entreprises en matière d’organisation ou de productivité. Elles sont ainsi désormais de plus en plus nombreuses à adopter une stratégie de télétravail à long terme.
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Le modèle hybride
De Microsoft à HSBC, première banque européenne, en passant par le géant pharmaceutique Novartis, nombre d’entreprises veulent instaurer un modèle hybride mêlant travail au bureau et à distance. Le modèle fait aussi des émules dans la fonction publique. Chez nous, la ministre Petra De Sutter veut autoriser le télétravail deux jours par semaine dans le secteur public. Aux Etats-Unis, l’administration Biden veut encourager 2 millions de fonctionnaires fédéraux à continuer à télétravailler (partiellement). Selon une étude de Global Workplace Analytics, le gouvernement américain pourrait économiser 11 milliards de dollars par an avec un système de travail à distance à mi-temps.
Structurellement, le modèle hybride est considéré par beaucoup comme la solution idéale permettant de maintenir des contacts et une culture d’entreprise tout en profitant des avantages du télétravail. Du côté des entreprises, les motivations sont diverses, allant de la nécessité de rester attractives pour les jeunes talents aux baisses de coûts en passant par la réduction de l’empreinte carbone (voir le tableau “Les économies d’un jour de télétravail” ci-dessous).
Le télétravail est aussi plébiscité par les salariés. Selon une enquête de Prudential Survey, 87% des employés américains veulent ainsi pouvoir continuer à télétravailler après la crise sanitaire. En Belgique, ils sont 84% selon un sondage similaire de BDO. La principale motivation est de mieux gérer l’équilibre entre vie professionnelle et privée en réduisant les pertes de temps dues aux déplacements. Mais d’autres arguments sont aussi avancés comme le fait de pouvoir résider plus loin dans un lieu plus agréable ou avec une pression immobilière moins forte.
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Moins de bureaux
Un recours structurel au télétravail changerait évidemment aussi la configuration des bureaux. Il est de plus en plus question d’espaces partagés, l’abandon des postes attitrés permettant de réduire les besoins à l’occupation réelle au jour le jour. HSBC est particulièrement ambitieux en la matière: il a annoncé vouloir réduire de 40% ses espaces de bureaux dans le monde au cours des prochaines années, dont potentiellement la moitié, soit plus de 300.000 m2, dès cette année.
Dans son étude pour la Belgique, BDO estime “qu’une entreprise qui autorise deux jours de télétravail par défaut a besoin de 30% de postes de travail en moins en moyenne. Par conséquent, sur le long terme, les espaces de bureaux vont diminuer de 35% dans le monde”.
Les dernières enquêtes auprès des entreprises sont pourtant moins inquiétantes pour les propriétaires de bureaux. Dans le dernier sondage de CBRE auprès des grandes entreprises américaines, seuls 9% ont déclaré vouloir réduire fortement leurs espaces de bureaux au cours des trois prochaines années, contre 39% en septembre 2020.
Une évolution qui peut toutefois s’expliquer. Tout d’abord, le maintien de mesures de distanciation a évidemment un impact tant que la pandémie n’est pas entièrement finie. Ensuite, l’évolution vers un télétravail structurel et la reconfiguration des espaces de bureaux est un processus de longue haleine. L’écrasante majorité des entreprises (72% contre 45% en septembre 2020) anticipent ainsi plutôt une modeste réduction de leurs espaces de bureaux.
Pour les sociétés immobilières actives dans les bureaux, comme Befimmo qui est le dernier acteur belge coté entièrement centré sur ce segment, les perspectives sont donc moins catastrophiques, mais elles n’en demeurent pas moins assez difficiles.
Voyages d’affaires
Le travail à distance a également un impact sur le tourisme d’affaires. HSBC, ABN Amro ou Lloyds Banking ont déjà évoqué une réduction de moitié de leurs voyages d’affaires par rapport à l’avant-pandémie.
Le secteur le plus exposé est évidemment l’aérien. Selon une étude de PWC, le tourisme d’affaires peut représenter jusqu’à 75% des revenus sur certaines lignes internationales (long- courrier). Les compagnies historiques sont à ce niveau plus exposées que les low cost, plus dépendantes du tourisme de loisirs et du court- et moyen- courrier.
Le secteur hôtelier est aussi exposé. Aux Etats-Unis, la fédération du secteur a évalué que 40% de sa clientèle étaient en voyage pour des raisons professionnelles.
Vidéoconférences et communications
Comme illustré dans le tableau plus haut, le télétravail peut déboucher sur de nombreuses économies, notamment au niveau des transports. Mais cela demande aussi certains investissements qui s’inscrivent souvent dans une perspective de flexibilité du poste de travail et ne dépendent pas forcément de l’ajout d’une journée de télétravail par semaine. C’est notamment le cas des solutions de visioconférence, tant nécessaires pour le travail à distance que pour limiter les déplacements professionnels.
Il est toutefois clair que la généralisation du télétravail a donné un coup de fouet aux solutions payantes. Le nombre d’entreprises (de plus de 10 employés) clientes de Zoom Video Communications a ainsi sextuplé à près d’un demi-million entre la fin 2019 et mars 2021. Récemment, Zoom a acquis la start-up allemande Kites, spécialiste de la traduction automatique et instantanée (sur la base de l’intelligence artificielle) afin de développer (améliorer pour l’anglais) des visioconférences multilingues.
Une opération hautement stratégique alors que Zoom voit de nombreux concurrents fourbir leurs armes, à commencer par Microsoft (Skype, Teams) et Alphabet (Google Meet) engagés aussi dans le sous-titrage et la traduction automatisée.
Slack Technologies (ticker Work sur la Bourse de New York) s’érige aussi de plus en plus en concurrent sérieux pour le leadership de Zoom. Les solutions de Slack ont l’avantage d’intégrer toute la communication: messagerie, appels audio et vidéo entre collaborateurs, vidéoconférences, partage de fichiers avec une grande sécurité – le point faible de Zoom.
On notera toutefois que les analystes sont désormais plus prudents, tant par rapport à Zoom que Slack, en raison des valorisations extrêmes de respectivement 83 fois et 320 fois les bénéfices prévus pour l’exercice en cours, selon le consensus de Reuters.
Sécurité numérique
Dans sa feuille de route du déploiement du travail à distance, Microsoft insiste aussi sur la sécurité numérique. Les salariés se connectent depuis différents types de réseaux (pas forcément protégés) ou d’appareils (notamment personnels) offrant des opportunités aux malfaiteurs tentant de voler des données ou d’installer des rançongiciels.
Selon Gartner, le marché de la cybersécurité va croître de 12,4% à plus de 150 milliards de dollars en 2021. Cela englobe toutefois de nombreux acteurs, comme l’équipementier réseaux Cisco ou la SSII française Atos, des spécialistes historiques comme Symantec (Norton) ou McAfee, des entreprises offrant des solutions d’authentification telles que DocuSign et de nouveaux acteurs, notamment actifs dans la sécurité du cloud comme FireEye.
L’option d’un ETF permet de regrouper toutes ces entreprises en un seul investissement, comme l’iShares Digital Security UCITS (très diversifié avec plus de 120 valeurs ; Bourse de Francfort ; ISIN: IE00BG0J4C88 ; frais annuel de 0,40%) ou le L&G Cyber Security UCITS (Bourse de Francfort ; ISIN: IE00BYPLS672 ; frais annuels de 0,75%) au portefeuille resserré (57 valeurs) mais avec un très bon historique de performance (rendement annuel moyen d e 22% sur cinq ans).
“Cloud computing”
Enfin, le télétravail devrait donner un coup d’accélérateur au développement du cloud computing. Cela permet en effet d’utiliser des logiciels et d’avoir accès à des fichiers de n’importe quel appareil n’importe où dans le monde.
Selon Gartner, le marché devrait croître de 23% en 2021 à 332 milliards de dollars et de 20% en 2022 à près de 400 milliards de dollars. Les leaders incontestés sont Amazon AWS (part de marché mondiale de 32%), Microsoft Azure (19%) et Alphabet Google Cloud (7%) selon Canalys. Derrière, on retrouve de nombreux plus petits acteurs.
L’ETF First Trust Cloud Computing UCITS (Euronext Amsterdam ; ISIN: IE00BFD2H405 ; frais annuels de 0,60%) permet d’investir de façon diversifiée (avec un poids comparable pour les géants et les spécialistes) dans ce secteur en plein développement.
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