Pour Thomas Nouws (Jacob’s Conceptstore): “Il n’y a que le ciel comme limite”
Il y a trois ans, l’Anversois Thomas Nouws vendait des papillons naturalisés et disposait de 7.000 euros d’économies. Aujourd’hui, il gère 24 boutiques de produits artisanaux en Flandre et à Bruxelles mais a aussi les yeux tournés vers le sud du pays et l’étranger.
Thomas Nouws, 24 ans, s’étonne parfois de la rapidité avec laquelle tout s’est enchaîné. “J’ai ouvert 13 magasins en novembre-début décembre 2022. Ça a été particulièrement chaud, et je ne recommencerai pas!”, commente-t-il. Mais le jeune homme n’est pas du genre à se reposer sur ses lauriers: il aime entreprendre, s’atteler à des choses nouvelles, initier des collaborations. Il travaille donc aujourd’hui d’arrache-pied à l’ouverture du 25e Jacob’s Conceptstore, qui sera la première boutique de la marque en Wallonie, dans un lieu non encore divulgué. Il souhaite également s’implanter à Paris d’ici l’été.
Nous espérons inaugurer la première boutique parisienne cet été.’’
Thomas Nouws
Que Thomas Nouws devienne un entrepreneur à succès n’était pas écrit dans les astres. Lui qui étudiait pour devenir professeur de musique s’adonnait pendant ses loisirs à la taxidermie des papillons. C’est en écoulant ses produits sur de petits marchés anversois qu’il a fait la connaissance d’autres artisans. “Je me suis dit: il y a des périodes totalement creuses. Nous pourrions peut-être nous organiser autrement. La plupart des concept stores ont des loyers et des frais de personnel élevés. Le fournisseur n’a en outre aucun contrôle sur la manière dont son produit est présenté. Je voulais faire évoluer le principe’’, synthétise-t-il. Son idée: accueillir sous un même toit 25 à 30 fabricants de produits artisanaux, ce qui permet de compresser le loyer de chacun. En contrepartie, il prend une commission d’un tiers environ sur les ventes. “Cela peut paraître élevé mais tous les frais – administration, aménagement, loyer et informatique – sont couverts’’, se défend-il.
Succès immédiat
Ouvert dans la Hoogstraat à Anvers au début de l’année 2020, le premier Jacob’s Conceptstore a connu un succès immédiat. “Les touristes affluaient”, décrit le jeune homme. Puis vint la crise sanitaire. Les 7.000 euros d’économies risquaient de partir en fumée. La création d’une boutique en ligne et le soutien de quelques amis ont été d’une aide précieuse. “J’ai appris que parfois, il faut pouvoir se contenter de moins, mais j’ai aussi pu en profiter pour songer à l’avenir. A l’époque, je n’envisageais pas d’avoir plus d’un magasin. Mais comme les personnes avec qui je travaillais remettaient en cause le principe du loyer, j’ai changé de tactique: j’ai proposé que chaque participant tienne la boutique une fois par mois. Celui-ci ne paie alors pas de loyer et on économise sur les frais de personnel. Ce jour de présence peut être mis à profit pour réapprovisionner les stocks, inviter ses meilleurs clients, etc. Le principe a si bien fonctionné que les ouvertures se sont enchaînées.’’
Nouveaux locaux
Le compteur atteint aujourd’hui 24 boutiques. A Anvers, elles ont fleuri sur le Meir et dans le shopping Stadsfeestzaal, puis à Saint-Nicolas, Malines, Alost, Courtrai, Mol, Hasselt, etc. Mais aussi à Bruxelles, dans le centre commercial Anspach et au Westland d’Anderlecht. Il n’y en a pas deux les mêmes. “Pour chacune, nous cherchons des produits locaux, de préférence artisanaux. Nous travaillons avec des responsables régionaux qui assurent la prospection et écument les réseaux sociaux en quête de candidats. Instagram est particulièrement utile car on y trouve beaucoup de jeunes créateurs et d’artisans.”
La variété est donc au rendez-vous. “Les bijoux et les cartes postales se vendent comme des petits pains. Certains entrepreneurs proposent des produits un peu plus difficiles, comme des impressions sur linoléum ou des sérigraphies. Peu importe: nous voulons que tout le monde, de l’étudiant entrepreneur au retraité amateur, puisse se lancer et se sentir à l’aise. C’est très varié mais c’est aussi comme ça qu’on attire un large public. Les gens viennent pour découvrir de nouvelles choses.”
La bonne surprise, c’est que la chaîne ne cartonne pas seulement pendant les périodes de fêtes. “On note bien sûr une accélération à ce moment-là, mais les chiffres sont dans l’ensemble assez stables. Ensuite, nous veillons à proposer des produits à des prix abordables, pas seulement des bijoux relativement coûteux. Le ticket moyen est de 23 euros. Nous avons achevé le dernier exercice sur un chiffre d’affaires de 3,5 millions d’euros. Cette année, nous visons 7,5 millions d’euros rien que pour les magasins existants.’’ Car pour Thomas Nouws, l’aventure n’est pas terminée: “Je veux développer et élargir le concept. Dans le commerce de détail, il est toujours possible de faire mieux. Pour Jacob’s Conceptstore, il n’y a en principe que le ciel comme limite”.
Même si les choses semblent s’être emballées, Thomas Nouws travaille en réalité d’une manière très structurée: “Des responsables régionaux passent au crible les collaborateurs potentiels. Pour Paris, nous avons pris contact avec un millier de personnes. Nous avons déjà rencontré plus de 150 candidats. Dès que nous aurons trouvé les locaux adéquats, nous pourrons ouvrir. Nous espérons inaugurer la première boutique cet été encore.’’ Après la capitale française, Thomas Nouws souhaite étendre son concept aux Pays-Bas, mais Barcelone, Cologne et Berlin sont également sur sa liste.
Style maison
Thomas Nouws s’attelle à professionnaliser le concept. Un ingénieur architecte conçoit un aménagement et un mobilier propres à la marque. L’objectif est de disposer d’un style reconnaissable partout, exclusivement réalisé avec des marques et des entreprises belges. La trésorerie et l’appli qui la gère sont optimisées, elles aussi. Des informations sur les ventes sont envoyées en temps réel aux artisans, qui peuvent de la sorte suivre l’évolution des chiffres et assurer le réapprovisionnement. Thomas Nouws souhaite en outre recréer, dans un entrepôt central, un magasin où seront organisées des démonstrations à l’intention des nouveaux entrepreneurs qui apprendront, par exemple, ce que c’est que de tenir une boutique et qui pourront s’entraîner à réussir de beaux emballages. “Un petit plus pour les 650 personnes qui travaillent déjà avec nous!”, commente le CEO.
Thomas Nouws a jusqu’à présent financé les expansions à l’aide de prêts modestes, rapidement remboursables. Il a également eu recours au prêt WinWin qui autorise les particuliers domiciliés en Région flamande à financer des start-up en échange d’un avantage fiscal. “Le système peut être mis en place en une semaine à peine”, salue notre interlocuteur. Qui n’aurait par ailleurs rien contre la montée d’un investisseur au capital.
Thomas Nouws ne craint-il pas d’être dépassé? “Je sais que je n’ai pas de formation en économie, mais je pense qu’il faut avant tout oser. Si j’avais commencé par obtenir un diplôme de gestion et si j’avais tout calculé jusque dans les moindres détails, je n’aurais peut-être pas osé me lancer. Aujourd’hui, je suis entouré de suffisamment de gens compétents, notamment dans l’informatique et la finance. Avec mon culot et ma persévérance, c’est une combinaison qui paie.”
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