L’hypercroissance 
de Loop Earplugs

Loop Earplugs a connu une année record. Le chiffre d’affaires, les bénéfices et les effectifs de l’entreprise ont triplé depuis 2023. 
Cette année, elle vise à franchir la barre des 200 millions d’euros 
de chiffre d’affaires. “Le statut de licorne est une étape que nous visons, mais pas un objectif en soi”, précise la start-up anversoise.

Une question fait scintiller les yeux des fondateurs de Loop Earplugs, Dimitri O et Maarten Bodewes : apprécient-ils leur liberté financière qui leur permet de refuser des investisseurs ? “C’est agréable de pouvoir répondre ‘non’ à de telles questions de la part d’entrepreneurs qui ont de l’argent”, s’amuse Dimitri O.

2023 a été une nouvelle année faste pour la start-up anversoise. L’entreprise a vendu 5,2 millions de paires de bouchons d’oreille l’année dernière, soit un chiffre d’affaires de 126,5 millions d’euros. C’est trois fois plus que les 42 millions de l’année précédente. Le bénéfice d’exploitation a augmenté pour atteindre 13,3 millions d’euros. “Nous sommes dans une histoire d’hypercroissance, explique Dimitri O. Il est donc très difficile de s’aventurer dans des prévisions annuelles.” Pourtant, les chiffres ont dépassé les rêves et les attentes les plus fous.

Pour expliquer cette réussite, le duo met en avant un certain nombre de facteurs, notamment l’esprit d’entreprise, les nouvelles campagnes de marketing et l’innovation en matière de produits. Par exemple, l’entreprise choisit résolument d’expérimenter beaucoup et de tester de nouveaux produits. Si un produit est plutôt mal accueilli, il est tout aussi rapidement ­abandonné.

L’entreprise fait également appel à des influenceurs. “Ils racontent une histoire authentique, comment nos bouchons d’oreille ont fait une différence dans leur vie, poursuit Dimitri O. Cela convainc davantage que si nous vantions les mérites de nos produits.”

Néanmoins, pour la première fois, l’entreprise a également lancé une campagne de marque avec des publicités, par exemple sur des panneaux d’affichage à New York et à Londres, afin d’atteindre de nouveaux groupes de consommateurs.

L’entreprise le fait également avec de nouveaux produits, tels que les collections saisonnières, l’Engage Kids et le nouvel écouteur 3-en-1, le Switch. Il s’agit du produit le plus cher de Loop, qui s’est déjà vendu à plus de 175.000 exemplaires depuis son lancement en octobre. Afin de poursuivre cette dynamique d’innovation, Loop débloque cette année 20 millions d’euros pour investir dans la recherche et le développement.

Enfin, l’accent est mis sur notre hygiène sonore. Notre ouïe et l’importance de la protéger sont progressivement reconnues au même titre que, par exemple, notre vue ou notre odorat. Cela s’est déjà manifesté à Tomorrowland, avec lequel Loop a conclu un partenariat depuis 2022. Le festival ne s’est déroulé que sur deux week-ends en 2023, contre trois un an plus tôt. Pourtant, les ventes y ont augmenté. “Cela indique que le partenariat se développe et que la sensibilisation aux dommages auditifs augmente. L’ambition est de poursuivre sur cette lancée cette année encore”, assure-t-on.

TOMORROWLAND « Nos protections contribuent à la magie de l’événement. »© PG

Lauréat du prix

L’histoire de la croissance de Loop ressemble à un conte de fées. Bien entendu, le fait que les bouchons d’oreille soient également esthétiques n’est pas étranger à cette réussite. C’était d’ailleurs l’objectif dès le départ : se débarrasser des horribles bouchons fluorescents et les rendre sexy pour que tout le monde ait envie de les porter.

“Comparez-nous aux lunettes de soleil, explique Maarten Bodewes. A l’origine, elles n’étaient portées que par les pilotes et les stars de cinéma. Contre la lumière vive du soleil dans le ciel, ou contre les projecteurs sur les plateaux de tournage. Ce n’est que plus tard que d’autres professions en ont compris les avantages, puis le grand public. C’est l’objectif que nous poursuivons avec nos ­bouchons d’oreille : faire de la protection auditive une pratique courante.”

Entre-temps, l’entreprise enchaîne les récompenses. Elle figure déjà dans le Fast50 de Deloitte, a remporté le premier Flanders International Business Award, a été élue start-up de l’année par EY, a gagné des prix de design et en janvier, a reçu le prix Henry van de Velde. Des reconnaissances appréciables.

Un travail agréable

Le nombre d’employés a presque triplé, passant de 94 en 2022 à 236 à la fin de l’année dernière. Et d’ici la fin du mois, l’entreprise comptera 250 employés. Pour soutenir son hypercroissance, Loop a également recruté des talents de haut niveau dans des multinationales. La direction s’est enrichie de deux vice-présidents : Chris Lander (produit), qui a travaillé chez ­Amazon, et Rob Weston (marketing), qui a travaillé chez Asda et Marks & Spencer. Vera-Maria Glahn a aussi rejoint les troupes en tant que directrice de studio. Ces recrutements illustrent une fois de plus le caractère international de l’entreprise: 60 % des ventes proviennent de l’Amérique du Nord, suivie du Royaume-Uni et de l’Australie.

Cela dit, Loop reste enracinée dans notre pays. Mais il y a aussi des obstacles. “Faire des affaires en Belgique est complexe, rappelle Dimitri O. Nos employés belges sont de loin ceux qui coûtent le plus cher. Et puis, il y a les extras, comme les voitures de fonction. Ces avantages coûtent également beaucoup d’argent et n’existent que dans notre droit du travail.”

Mais cela n’arrêtera pas les ambitions de croissance. La start-up veut franchir la barre des 200 millions d’euros de chiffre d’affaires d’ici à 2024 et réaliser un bénéfice d’exploitation de 10 %. Une partie de son budget de recherche et développement sera consacrée à la mise en place de l’intelligence artificielle dans l’entreprise. Elle devrait permettre d’accroître la productivité des employés, de prendre de meilleures décisions politiques et d’innover là où ce n’était pas encore possible.

L’entreprise veut continuer à explorer les marchés existants, mais aussi s’étendre. En 2023, elle posera pour la première fois le pied en Chine avec cinq employés permanents pour l’expansion et lancera sa boutique en ligne japonaise. “Nous nous attendons à ce que les ventes sur le marché asiatique soient multipliées par trois, voire cinq, déclare Dimitro O. Ce ne sera pas notre marché de croissance le plus important, mais nous sommes prêts à y revendiquer notre place également.”

Licorne

Lors de son lancement en 2016, les investisseurs chevronnés avaient regardé Loop avec pitié. Comment un fabricant de bouchons d’oreille pouvait-il casser la baraque ? Maarten Bodewes et Dimitri O n’étaient-ils pas naïfs de penser qu’ils avaient un produit en or entre les mains ou qu’ils allaient réaliser un chiffre d’affaires d’un million d’euros ? Ceux-là peuvent maintenant s’en mordre les doigts. Il semble que Loop devienne la première licorne (start-up valant plus d’un milliard de dollars, Ndlr) de Belgique dans le domaine du matériel direct au consommateur. L’année dernière, l’entreprise ­prévoyait encore un horizon de trois à cinq ans pour atteindre cet objectif.

“C’est certainement une étape que nous visons, mais ce n’est pas un but en soi. Nous ­continuerons à investir dans de nouveaux produits et à élargir nos marchés et nos segments de clientèle. C’est une philosophie importante pour nous afin de construire une entreprise durable. Mais si l’on considère les modèles d’évaluation courants basés sur la croissance, le chiffre d’affaires et le bénéfice, nous sommes en bonne voie pour atteindre cette étape dans un avenir proche.”