FemTech Hackathon : quand l’innovation belge s’écrit enfin au féminin

Juliette Malherbe
Juliette Malherbe, cofondatrice et CEO de High Her. © D.R.
Vincent Genot
Vincent Genot Coordinateur online news

Le 28 novembre prochain, BeCentral accueillera la plus grande FemTech Hackathon jamais organisée en Belgique. Son objectif : combler le gouffre qui sépare encore la recherche technologique des besoins spécifiques des femmes.

À peine 1 % des investissements mondiaux en recherche et développement ciblent explicitement les besoins des femmes. C’est à partir de ce constat qu’est née l’idée d’une FemTech Hackathon, un marathon créatif qui se tiendra le 28 novembre à BeCentral, à Bruxelles. Cent développeurs, designers, entrepreneuses et chercheurs d’idées y passeront douze heures à imaginer ce que pourrait être une technologie vraiment pensée pour la moitié de l’humanité.

L’événement, le plus grand du genre jamais organisé en Belgique et sans doute en Europe, est porté par un nouveau collectif baptisé Fem Futures Collective. Derrière ce nom, trois organisations belges déjà actives dans le champ de la tech inclusive : Clusity, High Her et FutureKind. Ensemble, elles veulent créer un écosystème capable de transformer les projets nés de la hackathon en véritables entreprises.

Juliette Malherbe, cofondatrice et CEO de High Her,  estime que la FemTech se situe à la croisée de deux univers encore largement masculins : la technologie et le capital-risque. Les freins, selon elle, sont multiples. D’abord, les femmes demeurent minoritaires dans les filières STEM (sciences, technologies, ingénierie et mathématiques ) même si leur présence y progresse lentement. Celles qui s’y engagent quittent d’ailleurs plus souvent le secteur que leurs homologues masculins. Le phénomène se prolonge du côté du financement : le capital-risque investit majoritairement dans des entreprises technologiques, ce qui perpétue le déséquilibre. À cela s’ajoute un obstacle moins visible mais tout aussi déterminant : le manque d’accès aux réseaux de financement. « C’est aussi ce que nous faisons avec High Her, explique-t-elle : donner de la visibilité aux différents moyens de financement existants et renforcer les connexions entre entrepreneuses et investisseurs. »

Quatre domaines où les inégalités persistent

L’ambition de cet évènement est claire : faire émerger des solutions concrètes, économiques et sociales, autour de quatre domaines où les inégalités persistent. La santé d’abord — mentale, physique, hormonale — soutenue par le partenaire Partena. Le sport ensuite, où les innovations en matière d’équipement ou de performance restent largement calibrées pour les hommes. Le commerce de détail, avec Delhaize, qui veut repenser l’expérience d’achat ou les produits eux-mêmes. Enfin, la finance et l’assurance, via Belfius, pour imaginer des services plus équitables et accessibles. « Avec High He, nous accompagnons déjà des projets liés à la santé. Par exemple, une start-up travaille sur des espaces immersifs dédiés à la santé mentale dans les hôpitaux et maisons de repos afin de réduire la prise de médicaments grâce à un environnement sensoriel apaisant, précise Juliette Malherbe. Il y a aussi des projets dans le textile, notamment des vêtements techniques pour le trail féminin, ou dans l’écologie, comme Greenzy, un composteur domestique. D’autres se concentrent sur la nutrition pré- et postnatale, toujours autour de la santé des femmes. »

La hackathon réunira des équipes pluridisciplinaires formées à l’avance selon les compétences et intérêts de chacun. Elles seront accompagnées par des mentors issus de la tech et de l’entrepreneuriat féminin. En fin de journée, chaque groupe défendra son prototype devant un jury composé de dirigeantes et d’investisseuses internationales, parmi lesquelles Dr. Annemieke de Groot, Anastasia Luyckx ou Ivana Butorac. Mais l’enjeu dépasse cette unique journée de novembre. Les organisatrices insistent sur la nécessité d’un suivi : les projets lauréats bénéficieront d’un accompagnement financier et stratégique pour franchir le cap de la start-up. High Her offrira un coaching intensif et des ateliers de vente, Clusity un accès à son réseau professionnel, et plusieurs partenaires du secteur privé suivront le développement des concepts les plus prometteurs. Il y aura différents prix pour aider les équipes à avancer : un accompagnement commercial, financier, mais aussi la création d’une communauté autour de leurs idées. « En 2026, nous voulons accompagner durablement les start-ups issues de cette première édition », assure Juliette Malherbe.

Les femmes prennent 80 % des décisions d’achat

Aujourd’hui, la FemTech, ce segment qui englobe les technologies liées à la santé, à la parentalité ou au bien-être féminin, ne représente qu’une fraction infime de l’investissement global, alors qu’elle touche potentiellement la moitié des consommateurs. Pour Juliette Malherbe, c’est précisément là que réside le potentiel. « Les femmes prennent 80 % des décisions d’achat, et pourtant très peu de produits sont conçus pour elles. Il y a donc un potentiel économique énorme. Un bon exemple, c’est Guud Woman , fondée par Morgane Leten, qui sera d’ailleurs dans notre jury. Leur gamme de compléments alimentaires, pensés pour les besoins féminins, s’est classée quatrième au Fast 50 de Deloitte. C’est la preuve qu’il existe une vraie demande et un marché solide pour les innovations centrées sur les femmes. »

À quelques semaines de l’événement, les inscriptions se poursuivent jusqu’au 15 novembre. Ouverte aux femmes comme aux hommes, la hackathon entend rassembler une centaine de participants autour d’un même objectif — repenser la technologie à travers les besoins et les expériences féminines. Le rendez-vous du 28 novembre s’annonce comme une tentative de rupture, un laboratoire d’avenir où les femmes ne seraient plus un simple « segment » de l’innovation, mais l’une de ses forces motrices.

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