Votre employeur peut-il restreindre l’usage de votre smartphone ?
L’utilisation de TikTok a été bannie des smartphones et des ordinateurs des fonctionnaires fédéraux et flamands. Une telle interdiction pourrait-elle être promulguée dans une entreprise privée ? Melissa Menschaert, Legal Expert chez Partena, nous éclaire sur le sujet.
Il est utile dans ce contexte de faire la distinction entre la situation où le smartphone (ou l’ordinateur portable) est la propriété de l’employeur et celle où le travailleur en est le propriétaire.
« En cas de mise à disposition par l’employeur d’un appareil pouvant être utilisé à des fins professionnelles et/ou privées, l’employeur reste en principe le propriétaire de l’appareil. En d’autres termes, l’employeur peut donc interdire l’installation et l’utilisation de certaines applications. Cette interdiction doit figurer dans le règlement de travail. L’employeur peut, par exemple, décider de bloquer ou de ne pas bloquer l’accès à l’application TikTok. S’il ne bloque pas l’accès, il peut imposer des règles supplémentaires concernant l’utilisation de l’application. Il peut, par exemple, fixer la plage durant laquelle les applications peuvent être utilisées, décider qui y a accès, imposer des restrictions en matière de partage de photos prises au travail, … », explique Melissa Menschaert.
Si le travailleur est le propriétaire de l’appareil, la situation est différente.
« Pendant les heures de travail, l’employeur peut interdire ou restreindre l’utilisation de certaines applications installées sur les appareils privés. En effet, pendant ces heures, le travailleur est à la disposition de l’employeur, ce qui signifie qu’il ne dispose pas librement de son temps. Une telle interdiction ou restriction doit figurer dans le règlement de travail. Dans ce cadre, il est également important de préciser les objectifs et les raisons de l’interdiction ou de la restriction. En cas de non-respect des règles imposées par l’employeur, les mesures prévues au règlement de travail peuvent être appliquées au travailleur (avertissement ou mise en demeure). L’employeur n’a toutefois aucune autorité vis-à-vis de ses travailleurs quant à l’installation d’applications sur leur propre appareil. L’employeur ne peut donc pas d’interdire à ses travailleurs d’utiliser des applications figurant sur leur propre smartphone », précise Melissa Menschaert
L’employeur peut-il contrôler l’utilisation d’un smartphone ou d’un ordinateur portable de l’entreprise ?
L’employeur peut vérifier si le travailleur respecte les directives fixées par le règlement de travail. L’usage et le contrôle sont régis par la CCT n° 81. Cette CCT permet à l’employeur de contrôler, dans certaines limites, l’usage d’un appareil mis à la disposition des travailleurs.
« Néanmoins, la CCT souhaite également respecter le droit à la protection de la vie privée des travailleurs en fixant des règles selon lesquelles l’employeur a son mot à dire dans ce débat. La CCT stipule que l’employeur peut effectuer des contrôles dans la mesure où ces contrôles poursuivent une finalité légitime (p. ex. la protection des intérêts de l’entreprise, mais aussi la sécurité ou le bon fonctionnement technique des systèmes informatiques en réseau de l’entreprise). Cette ingérence dans la vie privée des travailleurs doit toutefois être réduite au minimum. Seules les données nécessaires au contrôle peuvent être recueillies. En outre, afin que le contrôle puisse être considéré comment transparent, les travailleurs doivent avoir été suffisamment informés de tous les aspects de ce contrôle », détaille Melissa Menschaert.
Et qu’en est-il du contrôle de l’utilisation d’un appareil privé par un employeur ?
« Comme il n’est pas possible d’effectuer ce type de contrôle pour des raisons de respect de la vie privée, le travailleur ne pourra être sanctionné que s’il est pris en flagrant délit. Cela n’est toutefois pas facile à prouver ».
Le travailleur, dans sa relation avec son employeur, doit faire preuve de prudence en ce qui concerne l’utilisation d’applications installées sur son propre appareil.
Melissa Menschaert conclut : « Les travailleurs doivent garder à l’esprit que la communication effectuée via une application est susceptible d’être considérée comme publique. Ils doivent donc veiller à ne pas nuire aux intérêts de l’employeur et à ne pas partager des informations confidentielles de l’entreprise ou de l’employeur. En effet, il est possible que le droit à la liberté d’expression soit soumis à certaines restrictions mais cela ne veut pas dire que l’employeur peut confisquer l’appareil privé et accéder aux applications qui y sont installées. »
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