Trop de travailleurs ne veulent plus travailler le week-end

Rien que sur Bruxelles, 6.000 postes sont à pourvoir dans le secteur de l’horeca. (Photo by ERIC LALMAND/BELGA MAG/AFP via Getty Images) © BELGA MAG/AFP via Getty Images

Depuis la pandémie, l’équilibre vie privée-vie professionnelle est devenu une raison majeure pour quitter ou rejoindre un employeur. Il suppose une solide dose de flexibilité de la part des entreprises. Cet équilibre passe, chez de plus en plus de Belges, par le désir de ne plus travailler le week-end dans des secteurs où c’est une tradition ou une nécessité. Horeca, soins de santé et commerce en tête. Décryptage.

Après avoir vainement cherché du personnel qualifié pour notre atelier, nous sommes contraints, avec beaucoup de regrets, de fermer le dimanche. À partir du 22 septembre, la boulangerie sera fermée le dimanche et le lundi. Nous vous remercions de votre compréhension.” Créée en 1961 par Remy et Josée Defreyne, la boulangerie-pâtisserie Defreyne est une véritable institution dans le quartier De Wand, dans le nord de Bruxelles. Installée aujourd’hui à Strombeek-Bever, aux triples confins de Grimbergen, Vilvorde et Laeken, elle n’ouvre donc plus le dimanche malgré les énormes files que l’on devait endurer ce jour-là avant d’être servi. Malgré l’affluence, la même décision radicale avait été prise quelques mois plus tôt par la Boulangerie Vereecke, à Evere. Pourtant, une boulangerie qui n’ouvre pas le dimanche, c’est comme un fleuriste qui resterait fermé le jour de la Fête des Mères.

Ces exemples ne sont pas isolés. Nombreuses sont aujourd’hui les boulangeries-pâtisseries qui ont décidé de ne pas lever leurs volets le dimanche, pourtant le meilleur jour de la semaine. Après avoir subi de plein fouet les folles envolées des prix énergétiques qui les avaient forcé à réduire la voilure, les boulangers ne trouvent aujourd’hui plus le personnel qualifié qui a envie de passer son samedi soir à faire des bâtards ou à servir des clients le dimanche. Sans oublier les stagiaires qui renoncent face à la dureté d’un métier qui n’a rien d’une émission de télé-réalité.

Trouver de la main-d’œuvre est un gros challenge pour un secteur qui se réduit rapidement. En Wallonie, chaque semaine, deux boulangeries ferment définitivement leurs volets. Il n’en reste plus que 900 disposant de leur propre atelier de production. Dans ce contexte compliqué et stressant, où les patrons doivent travailler beaucoup plus pour compenser le manque de personnel, fermer le dimanche est une façon de préserver leur qualité de vie et celle de leurs salariés et, donc, de garder lesdits salariés.

Effet covid

Ce désamour pour le travail du week-end est une des conséquences de la pandémie, où il y a eu un retour à l’essentiel et où de nombreux Belges se sont rendus compte qu’en réalité, tout pouvait être différent, notamment le travail et la place qu’on lui accorde dans nos vies. Aujourd’hui, un emploi qui est peu compatible avec une vie sociale normale n’a plus la cote. Ce phénomène s’ajoute à un contexte de pénurie de main-d’œuvre généralisée.

“Mais où sont-ils tous passés ? s’interroge Simon Pirard, le patron de la maison homonyme, où l’on est caviste de père en fils depuis trois générations. Je viens de fermer définitivement mon espace vin de Grez-Doiceau, faute de trouver du personnel pour remplacer ma gérante en congé maladie de longue durée. C’est bien simple, je n’ai pas reçu le moindre CV suite à mes multiples annonces. Deux facteurs jouent : la connaissance du vin et le travail du samedi qui ajoute une touche de complexité supplémentaire. J’ai compensé moi-même avec un de mes employés de la maison mère à Genappe, mais c’est ingérable sur le long terme. À Genappe, où le cadre est tout juste, je cherche un caviste avec les mêmes horaires qu’à Grez-Doiceau, un livreur et un préparateur de commandes. Je n’ai reçu qu’un seul CV! J’ai un ami entrepreneur dans le jardinage qui cherche aussi et ne trouve pas davantage…”

Je n’ai pas reçu le moindre CV suite à mes multiples annonces.
Simon Pirard

Simon Pirard

Caviste

Nous l’avons déjà écrit à de multiples reprises : la pénurie de main-d’œuvre ou de profils qualifiés est un risque majeur pour notre économie et pour son expansion. À sa petite échelle, Simon Pirard vit la même chose et s’interroge. “J’ai peur de voir un de mes employés partir. Avec mon papa qui, à 70 ans, est, heureusement pour moi, encore actif, nous nous interrogeons sur l’avenir de notre maison. Pourquoi ne pas réduire la voilure ? En faire moins avec moins de personnel. Alors oui, il y a aura moins de croissance, moins de clients servis et un chiffre d’affaires en baisse mais ne vais-je pas y trouver un meilleur équilibre, voire une meilleure rentabilité horaire, tout en réduisant mon stress ? Le magasin franchisé à Gerpinnes marche très bien. On pourrait continuer dans cette voie-là et, en plus, travailler avec des commerciaux indépendants multi-cartes pour les clients professionnels. Nous ne gérerions plus que les livraisons. Si l’indépendant décide de ne pas ouvrir ou de ne pas prospecter, c’est son affaire et plus la mienne. C’est vraiment dommage d’en arriver là alors que nous avons du travail et des perspectives. Mais si je ne trouve pas de personnel alors qu’il y a tant de chômeurs, que puis-je faire ?”

L’horeca souffre

Où sont-ils tous passés ? C’est aussi la question que se pose le secteur horeca. Rien que sur Bruxelles, 6.000 postes sont à pourvoir ! Depuis une bonne année, on ne compte plus les restaurants qui réduisent les services pour contenir les coûts de personnel et gérer la pénurie de candidats. Nombreux sont ceux qui, petits comme grands, ont décidé de ne plus ouvrir le samedi et/ou le dimanche.

“Je ferme Coincoin et Bloem Farine, deux de mes adresses, le week-end alors que je suis certain que ce seraient mes deux jours les plus rentables, assure Mathieu Léonard, président de la Fédération Horeca Bruxelles. Je le fais pour garder mon personnel et lui assurer du bien-être. Mais aussi pour mon propre confort. Sans quoi, je passerai mon temps à recruter du personnel pour compenser les départs. Il y a une pénurie de main-d’œuvre qualifiée, à laquelle se greffe un dégoût pour le travail pendant le week-end… Par contrat, je dois ouvrir Plouf dans le centre sportif de Woluwe-Saint-Pierre sept jours sur sept. Deux jours par semaine, j’assure du service. Je n’ai pas le choix. Mais pendant ce temps-là, je ne gère pas mon entreprise de 100 personnes comme il faut. Travailler sept jours sur sept et gagner 5 euros net de l’heure ? Non, merci.”

Je ferme deux de mes adresses le week-end, alors que ce seraient mes deux jours les plus rentables.
Mathieu Léonard

Mathieu Léonard

Horeca Bruxelles

Lors de la réception qui a suivi la présentation du guide Gault & Millau, la semaine dernière au Palais 10 de Brussels Expo, nombreux sont les restaurateurs qui nous ont confié leur désarroi face à la situation très compliquée. Tel ce sommelier d’un étoilé hainuyer qui est désormais seul en salle pour gérer 50 couverts. Il ne s’en sort que grâce aux étudiants et aux flexi-jobs. Ses jeunes collègues salariés sont partis rejoindre des maisons qui n’ouvraient pas le week-end ou seulement le samedi soir. Tel cet autre restaurateur hainuyer bien coté qui craint de perdre son employée de salle qui souhaite avoir un enfant et dont le mari pousse pour qu’elle cherche un job socialement moins contraignant. Tel encore ce chef étoilé qui va perdre un de ses sommeliers à son service depuis 15 ans. Il a trouvé l’amour et va changer de secteur pour ne plus travailler ni le soir ni le week-end.

Un choix de vie

“On ne peut pas reprocher aux gens de ne plus avoir envie de travailler dans notre secteur, poursuit Mathieu Léonard. C’est un choix de vie. L’horeca a sa part de responsabilité là-dedans. Quand le covid est arrivé, ceux qui étaient payés partiellement au noir se sont retrouvés avec des demi-chômages. Ils se sont enfuis et je les comprends. Nous poussons pour la généralisation de la blackbox qui a contribué à assainir le milieu. On n’en serait sans doute pas là aujourd’hui si tout le monde avait été payé légalement. Soit. La génération Z, qui a connu le covid pendant ses études, est perdue pour nous. Les centres de formation et les écoles hôtelières sont quasi vides. À nous de rendre nos métiers attractifs à nouveau.”

Ce désamour pour le travail du week-end dans l’horeca ou dans le commerce, a un côté très paradoxal. Les parkings des supermarchés ouverts le dimanche n’ont jamais semblé aussi remplis. Depuis son passage en franchise et l’ouverture, très majoritaire, de ses points de vente le dimanche, Delhaize fait du mal à Colruyt et à Carrefour. Or, pour faire tourner ces magasins, il faut du personnel qui accepte de travailler le dimanche… Dans une remarquable étude publiée la semaine dernière, nos confrères du Standaard parlaient de la Flandre qui était devenue le royaume de l’horeca, avec des milliers de cafés et de terrasses qui ont envahi les centres-villes. Selon Statbel, ces 10 dernières années, les options de restauration ont augmenté de 20 %. Dans le même temps, 5,5 % des boulangeries artisanales ont disparu, 14,5 % des boucheries et 9,4 % des marchands de fruits et légumes. Sur la même période, nos dépenses dans l’horeca ont grimpé de 45,4 % pour atteindre 1.287 euros par an par personne, soit deux fois plus que l’inflation ! Dans le Standaard, Yves Segers et Ignace Glorieux, professeurs, respectivement à la KULeuven et à la VUB, confirment tous deux que les jeunes n’ont jamais autant fréquenté l’horeca et qu’ils y dépensent bien plus dans l’ensemble que leurs aînés (“Ils dépensent aujourd’hui plus dans leurs sorties et expériences que dans le matériel au sens large”, selon Segers). Ils ajoutent que la digitalisation de nos sociétés qui permet de travailler, de faire ses achats et de regarder ses séries à l’infini sans quitter son canapé, les fait plus sortir qu’avant. Ils n’ont jamais autant fréquenté l’horeca mais ils ne veulent plus y travailler…

“Les chiffres de SDWorx qui parlent de 25 % de CDI en plus entre 2013 et 2023, c’est l’arbre qui cache la forêt, assène Mathieu Léonard. Dans notre CP 302, on trouve, outre les fast-foods et autres snacks, les parcs d’attraction, l’événementiel, et d’ici la fin de l’année, les travailleurs du sexe! Ce n’est pas dans les milliers de PME qui font du bon, du local et de l’artisanal qu’on a créé ces 25 % de CDI en plus. Même si, clairement, la blackbox a permis de créer des CDI supplémentaires. Sur quasiment la même période, Actiris évoque une chute de 10 % de l’emploi ouvrier dans l’horeca bruxellois. Les restos artisanaux subissent aujourd’hui les effets de l’envolée de tous les coûts et souffrent parce qu’ils n’osent pas répercuter leur coût-vérité sur le client. Moi, je dis qu’il faut cesser cela. Il faut faire payer au client le juste prix. Patrick Bontinck, le patron de visit.brussels, disait récemment qu’un resto à Bruxelles coûte 25 % plus cher qu’à Paris et que ce n’est pas normal. Il a raison. Nous, on aimerait pouvoir engager une main-d’œuvre stable à temps plein et en CDI. Cela nous coûte une énergie de malade pour assurer nos services. On aimerait pouvoir recruter en donnant plus de net au départ du brut. Mais tout ce que les gouvernements mettent sur la table, ce sont des primes, dont certaines liées à la formation fonctionnent pas mal, ou des baisses de TVA. Que du court-terme ! On pourrait faire une exception pour un secteur qui forme et dont les horaires sont source de pénibilité. On aimerait une vraie réforme structurelle de la fiscalité sur le travail qui profite aussi aux entreprises et pas qu’aux particuliers. D’après ce que j’en sais, ce n’est pas le chemin pris dans les négociations fédérales. À titre personnel, j’ai l’impression d’être le dindon de la farce vu les promesses faites par certains. Nous ne nous sommes pas démenés comme des fous pour amener cette majorité au pouvoir et ne pas avoir de réforme structurelle. On va le regretter si on ne fait rien.”

Pharmacien fait désormais partie de la liste des métiers en pénurie. © Getty Images/Maskot

Soins de santé

La semaine dernière, le non-marchand a manifesté dans les rues de Bruxelles. Ce secteur, très vaste, regroupe les métiers liés aux soins de santé, au social, à l’enseignement, etc. Il réclame du temps pour tenir le coup sur l’ensemble d’une carrière. Il souhaite des conditions de travail acceptables et cela passe évidemment par une revalorisation de ces métiers et donc plus de moyens. Par exemple, tant dans les maisons de repos que dans les établissements de soin, la pénurie de main-d’œuvre infirmière dégrade les conditions de travail. Cela pousse les travailleurs en arrêt maladie à se réorienter dans des secteurs moins usants. Revaloriser le métier à tous les points de vue est une nécessité si l’on veut à nouveau attirer les jeunes dans les filières d’enseignement, où la chute des inscriptions est violente. Une surcharge de travail, un salaire qui ne reflète pas le côté essentiel du métier porté aux nues pendant le covid, ainsi que des gardes de nuit et de week-end: cela n’est pas très attractif pour les jeunes d’aujourd’hui. Dans le réseau Epicura et ses trois sites hospitaliers majeurs à Ath, Baudour et Hornu, le personnel infirmier (infirmières, aides-soignantes, assistants logistiques et brancardiers) correspond à 1.150 emplois temps plein (ETP) dont 650 à 700 infirmières. Le cadre n’est jamais rempli…

“Il nous manque entre 20 et 25 ETP en permanence, soupire Dominique Gainvorste, la directrice du département infirmier d’Epicura. Il y deux périodes propices au recrutement : juin à septembre et février. Elles correspondent aux diplomations. Entre les deux, nous ne faisons que perdre du personnel. Soit via une réduction du temps de travail qui est très fréquente dans le milieu, un écartement prophylatique et, évidemment, via des réorientations de carrière. Il y a suffisamment d’infirmières en Belgique mais elles ne sont pas toutes, loin s’en faut, dans les soins de santé. Le politique devrait sérieusement se demander pourquoi et où elles sont parties ! Dans le cadre des réorientations, c’est souvent le travail de nuit et le week-end qui joue. Les gens ont du mal à combiner boulot et vie de famille. Ils se tournent souvent vers l’ONE ou la médecine scolaire, voire dans des secteurs complètement différents. Depuis le covid, ce phénomène de réorientation a pris beaucoup plus d’ampleur. Et, sans forfanterie aucune, je suis encore parmi les mieux loties en francophonie. Nos sites éclatés qui permettent de limiter les déplacements, la relative petite taille de l’institution qui permet une ambiance familiale et un accès plus facile à la ligne hiérarchique nous aident beaucoup.”

L’absentéisme, ce fléau

L’absentéisme de moyenne et longue durée, un fléau dans les soins de santé, n’aide évidemment pas à assurer une charge de travail normale. Même s’il est très modéré dans le département infirmier d’Epicura (5 %), Dominique Gainvorste n’a, vu le contexte, pas d’autre choix que de se tourner vers la main-d’œuvre étrangère pour remplir ses cadres.
“Nous travaillons avec des agences comme Moving People. C’est très réduit chez nous en comparaison avec les autres institutions : 20 ETP. Je suis extrêmement stricte sur les profils, notamment sur la connaissance du français. Ce personnel vient d’Italie, du Portugal et du Liban principalement. Cela m’a surpris au départ que des jeunes Italiennes ou Portugaises veuillent travailler chez nous avant que je ne découvre que l’accès à la profession hospitalière y est très compliqué et les salaires encore plus bas que chez nous. Un autre phénomène est aussi à l’œuvre : des infirmières libérales de plus de 50 ans reviennent en hôpital, partiellement du moins, pour sécuriser leur fin de carrière. C’est une aubaine mais il demeure fondamental de revaloriser le métier. Le ministre a causé beaucoup de mal avec la nouvelle classification Ific qui privilégie les tâches accomplies au diplôme. Autrement dit, des infirmières classiques qui travaillent en service d’urgence sont payées la même chose que leurs collègues qui, elles, ont la spécialisation ad hoc qui a nécessité un an d’études en plus. Ce n’est pas très motivant…”

Il nous manque entre 20 et 25 ETP en permanence.
Dominique Gainvorste

Dominique Gainvorste

Epicura

Le secteur des pharmacies n’est pas épargné par le désamour du travail le week-end. Tant du côté des indépendants que de celles en coopérative (Multipharma, Familia, etc.). Pharmacien fait hélas partie de la liste des métiers en pénurie que le Forem met à jour chaque année. Comme dans de nombreux autres secteurs, la sortie de pandémie a modifié le regard porté sur le travail et revisité l’équilibre vie privée-vie professionnelle. Pour les pharmacies, les gardes et l’ouverture du samedi ont poussé de nombreux pharmaciens diplômés et autres métiers connexes vers l’industrie pharmaceutique qui offre des horaires plus compatibles. Mais le souci ne s’arrête pas à la difficulté d’attirer du personnel. Il en va aussi de la pérennité des officines. Les filières universitaires, fortement féminines, enregistrent de fortes baisses d’inscription (si on enlève les Français qui squattent nos auditoires, c’est encore pire). En vrac, les raisons données par les écoliers évoquent des horaires peu flexibles et plus compliqués en officine, les gardes de nuit en semaine et le week-end, l’ouverture du samedi et un sentiment d’insécurité.

Le secteur du transport aimerait pouvoir proposer des flexi-jobs pour solutionner le problème des samedis. © Getty Images

Conduire le week-end

Dans le secteur du transport aussi, les choses ne sont pas simples. Chauffeur de poids lourd est un métier en pénurie depuis longtemps. En outre, l’âge moyen des chauffeurs en activité est très élevé et les départs en pension vont s’accélérer dans les prochaines années. La pénurie va donc s’aggraver. Le désamour pour la profession vient, comme pour tous les autres secteurs, du fait qu’elle n’est guère compatible avec une vie sociale ou familiale.

“C’est un métier bien payé mais avec de longues heures, confirme Philippe Degraef, directeur de la Febetra, la fédération belge des transporteurs et des prestataires de services logistiques. Et si vous travaillez pour la grande distribution, il faut aussi livrer le samedi et parfois le dimanche. C’est dur à trouver de nos jours un jeune chauffeur qui accepte cela. C’est un métier moins physique qu’avant vu les appareils pour charger et décharger et il pourrait attirer plus de femmes. En plus de l’émigration économique qui n’a pas bonne presse surtout en Flandre où l’on préfère parler d’activation des chômeurs, nous aimerions pouvoir proposer des flexi-jobs. Cela pourrait solutionner le problème des samedis, notamment. Nous l’avons demandé mais nous n’avons pas été retenus dans la dernière réforme. Nous allons réitérer la demande au prochain gouvernement fédéral.”
Pas facile d’évoquer le sujet du transport le samedi (et le dimanche) dans la grande distribution, tant le sujet semble tabou. Il n’y a, de fait, pas si longtemps que plusieurs enseignes ont connu des gros soucis logistiques et d’approvisionnement de leurs rayons. Très impliqué dans la défense professionnelle, Didier Michel, le président de la Febetra Hainaut et le CEO du groupe familial TFM, situé dans le Garocentre à Houdeng, ne tourne, lui, pas autour du pot. “Nous assurons l’approvisionnement, entre autres, des magasins Trafic et Medi-Market. Avec des livraisons fréquentes le samedi. À l’heure actuelle, Trafic représente trois camions tous les samedis. Ce n’est pas toujours facile d’assurer mes engagements le week-end. Dire le contraire, ce serait mentir. Nous essayons d’organiser des tournantes et il y a aussi des volontaires puisque c’est mieux payé le samedi. Le travail en amont du dispatching est crucial : il faut gérer finement les obligations de sécurité et les désidératas des chauffeurs pour satisfaire les clients le week-end. Si vous vous ratez le samedi, le client s’en souvient le lundi. Il faut 45 heures de repos en suivant par semaine. Donc si vous avez conduit le samedi jusqu’à 15 heures, vous ne pouvez pas repartir le lundi matin.” TFM emploie 250 chauffeurs, ainsi que 50 magasiniers, dans la partie logistique appelée Michel Logistics. Depuis cinq ou six ans, il manque systématiquement entre cinq et dix chauffeurs.

Le métier de chauffeur de poids lourd est bien payé mais avec de longues heures.
Philippe Degraef

Philippe Degraef

Febetra

“Nous vivons une période très pénible, conclut Didier Michel. Il y a 100 faillites par mois dans le secteur. Le nombre d’entreprises de transport a dramatiquement chuté de 12.000 à 8.500. Recruter me prend un temps fou car je fais cela moi-même. Je ne vais pas confier un camion à n’importe qui. Depuis le début de l’année, je n’ai reçu que trois candidatures spontanées. Une seule a débouché sur un contrat. Quand je reçois des candidats, je pose énormément de questions pour que les choses soient claires dès le début. L’une d’elles a trait au travail le week-end. Dans 90 à 95 % des cas, j’essuie un refus.”

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