Recycle, un “concept store” autour de la circularité du vélo
Pierre Cuvelier a deux passions: le vélo et l’économie circulaire. Propriétaire d’une société active dans l’événementiel, il a mis la pandémie à profit pour lancer un “concept store” particulier: ReCycle. Il donne, certes, une seconde vie aux vélos d’occasion mais entend mettre l’économie circulaire en lumière de multiples manières.
Avec un associé, Pierre Cuvelier dirige depuis une dizaine d’années Vertigo Events. Une agence B to B créatrice d’événements qui se veut la plus verte de Belgique. Du catering à la gestion des déchets en passant par l’engagement d’être CO2 neutre, tout est conçu dans un esprit de durabilité. Ce n’est donc pas une surprise de le retrouver derrière un concept store basé en plein centre de Waterloo, axé sur la circularité du vélo et appelé ReCycle.
“Vous vous doutez bien que ces derniers mois, Vertigo n’a pas beaucoup travaillé, confie Pierre Cuvelier. Mais l’agence était saine et disposait de cash-flow. Nous avons donc fait le gros dos. Mais j’ai mis ce trou à profit pour une lancer une idée qui me trotte dans la tête depuis longtemps et qui allie deux de mes passions: le vélo et l’économie circulaire. ReCycle est un magasin de vélos pas comme les autres. Si le marché de l’occasion fonctionne dans de nombreux secteurs, pourquoi pas dans celui du cycle? J’aime le Re devant Cycle, c’est le Re de recycler évidemment mais aussi de relooker, réparer, rénover, réutiliser, récupérer, réhabiliter, etc.”
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Achat, vente et réparation
Avec son fils Antoine et Benoît Hofer, un ancien de la Banque of New York Mellon, aujourd’hui mécanicien diplômé (un préalable obligé en Belgique pour ouvrir un atelier de réparation), Pierre Cuvelier a imaginé un magasin de seconde main qui remplit un vide abyssal. Avec la pandémie, le marché du vélo n’a jamais été aussi florissant. Mais aussi tendu. Il est compliqué d’acheter du neuf, de trouver des pièces et les délais de réparation dans les magasins se comptent souvent en semaines. ReCycle achète et vend tous types de vélo destinés aux petits comme aux grands et acceptables pour toutes les bourses. ReCycle accepte aussi de réparer tous les vélos, même ceux qui ne sortent pas de son atelier. “Nous faisons de l’achat-vente de vélos, poursuit Pierre Cuvelier. Il y a deux systèmes. Soit nous payons le vélo de suite. Soit, en cas de modèle un peu particulier, nous le prenons en dépôt. Toujours dans ce dernier cas, nous déterminons un prix d’achat et faisons les réparations nécessaires à charge du vendeur. Nous déterminons un prix de vente et prenons alors 30% de marge. Dans tous les cas, nous certifions le vélo. Nous garantissons à l’acheteur qu’il va pouvoir l’utiliser en toute sécurité et répondrons présents en cas de problème. Le vélo d’occasion est aussi une belle opportunité pour les familles. Pas besoin d’acheter du neuf à chaque fois que le fiston a pris des centimètres. J’ai même des familles qui m’ont demandé si je n’envisageais pas de mettre une sorte d’abonnement en place.”
180.000 euros
L’investissement consenti (travaux, fonds de roulement, etc.) pour lancer ReCycle.
Depuis son ouverture, le 16 avril dernier, ReCycle a vendu une quarantaine de vélos réhabilités et en a acheté ou pris en dépôt une septantaine. Sans compter la collecte organisée préalablement à l’ouverture.
“Nous avons fait appel à la population, explique Pierre Cuvelier. Un magasin qui ouvre sans rien à vendre, cela fait mauvais genre ( rires). Nous avons eu une trentaine de vélos, c’était inespéré. Depuis, il y a un bel équilibre entre les entrées et les sorties. Nous sommes d’ailleurs en avance sur notre business plan. Nous ne vendons que des vélos dits musculaires d’occasion. Pour les électriques, pour lesquels il y a une forte demande, nous proposons du neuf. Il y a plusieurs raisons à cela: l’occasion y est encore fort rare et les clients sont dubitatifs. Ils se demandent si le précédent propriétaire a bien utilisé la batterie. Cela peut se comprendre. Nous vendons aussi des cargo bikes neufs. Ils permettent aux familles de se passer d’une voiture dans le ménage.”
“Parmi les projets que nous avons, il y a notamment l’électrification de vieux vélos, renchérit Benoît Hofer. Il existe plusieurs solutions dont j’étudie la faisabilité. C’est une solution intéressante pour les gens qui aimeraient prolonger leur pratique du vélo mais ne se sentent plus capables de pédaler tout le temps et n’ont pas envie de se séparer d’une bicyclette qu’ils adorent.”
Un ancien Facq
ReCycle est installé en face de la maison communale de Waterloo dans ce qui était auparavant un Facq. Le magasin loue l’arrière (400 m2) et le parking fermé. Les 800 m2 restants (avec accès direct à la chaussée de Bruxelles) sont devenus un Kruidvat. Ce grand parking est un plus pour ReCycle. Il autorise l’acheteur à essayer son vélo en toute sécurité. Il a aussi permis d’installer un Bike Wash pour nettoyer son vélo après une longue balade, même le dimanche. ReCycle entend créer une véritable communauté de passionnés. Ce qui, à Waterloo, n’était pas forcément gagné d’avance.
“Oui, nous nous sommes posé la question, sourit Pierre Cuvelier. Le public de Waterloo est-il sensibilisé à la circularité? Au vélo? La réponse est oui. La commune, qui a gagné un appel d’offres de la Région wallonne pour plus de mobilité verte, s’est montrée très enthousiaste. La police va créer une brigade cycliste. Même si elle doit acheter via appel d’offres, elle aimerait bien que nous nous occupions de l’entretien.”
Place à l’art
Bien sûr, ReCycle vend tous les équipements liés à la pratique du vélo mais également la maroquinerie à base de chambres à air recyclées de Bicloo. Le concept store entend aussi mettre en évidence dans son espace les artistes inspirés par le vélo et/ou le recyclage. Depuis l’ouverture, Tamara Greindl (www.tamaragreindl.com) y a exposé des objets décoratifs réalisés au départ de bouteilles d’eau en plastique. Jos Desmedt (www.streetsofjodet.com), un artiste belge multiforme (à la fois bluesman, écrivain, compositeur et photographe primé) a accroché au mur une jolie collection de photos noir et blanc qui montrent des vélos dans le monde entier. D’autres artistes devraient suivre dont Monsieur Bicycle (www.monsieurbicycle.be) qui expose de façon très originale des anciens vélos de collection et du Tour de France ou ce triathlète qui, à ses heures perdues, confectionne de jolies lampes au départ de vieux pignons de vélo. Enfin, dans l’esprit communauté, ReCycle entend organiser des balades de groupe et proposer des ateliers participatifs qui permettent aux clients de réparer leurs freins, leur dérailleur ou leur chaîne en cas de problème pendant une sortie. Très impliqué dans son projet, Pierre Cuvelier se verrait bien l’essaimer dans toute la Wallonie. “Nous avançons encore à vue, conclut-il. Les marges sur les vélos d’occasion sont plus faibles que sur le neuf. Et pour atteindre la rentabilité, on va devoir faire du volume. Va-t-il falloir augmenter le neuf en électrique pour répondre à la demande? Nous verrons bien. L’un dans l’autre, ReCycle, c’est 180.000 euros d’investissement. Pour les travaux, la sécurité des lieux (ça se vole bien un vélo…), les fonds de roulement, etc. Ce type de concept store est quasi inexistant en Wallonie. Alors oui, je suis ouvert à de futurs associés pour ouvrir d’autres ReCycle. Pourquoi pas à Namur ou à Liège? Cela aurait l’avantage de mieux répondre à la demande en s’échangeant les vélos au gré des besoins des clients et des sensibilités locales.”
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