Pas de Diamond Valley en Flandre

Longtemps promise, mais jamais opérationnelle : à Lommel, en Campine, ce qui aurait du être la plus grande fabrique de diamants de synthèse d’Europe vient de fermer ses portes.
Partant du constat que seuls 2% des diamants naturels étaient susceptibles d’applications industrielles, Vikram Shah, dont la famille est active dans le diamant depuis trois générations, pensait avoir découvert un nouveau créneau et rêvait de combler cette lacune en produisant des diamants de synthèse. Depuis 1797 en effet, les scientifiques savent qu’un diamant n’est finalement qu’une variété cristalline du carbone, que des chercheurs de General Electric sont finalement parvenus à reconstituer en laboratoire.
Depuis, le processus s’est industrialisé, mais nécessitant des températures extrêmement élevées, il est énergivore et, surtout, ne supporte aucune interruption de courant. Pareille garantie étant difficile à obtenir dans l’Inde des années 2010, Vikram Shah se tourne vers l’Europe et découvre à Hasselt un laboratoire (Imo-imomec) spécialisé dans les matériaux avancés, ainsi qu’à Lommel, un zoning appelé à abriter le plus grand parc solaire du Benelux avec 303.000 panneaux et 2.200 km de câbles. Des contacts se nouent.
Ambition alléchante
En 2016 est constituée Heyaru Engineering, avec pour ambition de devenir la plus importante fabrique de diamants synthétiques d’Europe. Les diamants produits dans cette future Diamond Valley, selon ses promoteurs, seraient ensuite taillés en Inde.
Enthousiasmée, la Flandre accorde à l’entreprise naissante un soutien stratégique de 2 millions d’euros, la Société de reconversion du Limbourg (LRM) entre en 2019 dans le capital de l’entreprise, dont elle devient actionnaire à hauteur de 11,49% aux côtés des investisseurs initiaux, Heyaru Technology FZE et Da Vinci International Holdings, tous deux basés à Dubaï.
L’année suivante, Heyaru produit son premier diamant 100% limbourgeois et prend place parmi les cinq candidats au Foreign Investment of the Year Trophy annuellement décerné par Flanders Investment & Trade, agence chargée de promouvoir l’entrepreneuriat international comme élément dans le développement socio-économique de la Flandre. Un investissement de 262 millions d’euros, générateur de 150 emplois, avait en effet été annoncé en 2018 déjà.
Mais l’argent n’est jamais venu, tout comme au demeurant les centaines de réacteurs promis.
En 2023, Heyaru n’est parvenu à produire que 55.000 carats, soit 11 kilos de diamants.
Onze kilos à peine
En 2023, Heyaru n’est parvenu à produire que 55.000 carats, soit 11 kilos de diamants, pour un chiffre d’affaires d’à peine 8,5 millions d’euros. Une misère dans un marché en pleine expansion et de plus en plus concurrentiel.
Ces retards répétés entre annonces et réalisations ont fini par agacer, tant le bourgmestre que les banques. Le premier, qui se demande aujourd’hui si le projet de Heyaru était bien réaliste, reproche à l’entreprise d’avoir réservé – sans jamais l’avoir utilisée – une quantité d’électricité si importante qu’elle a de facto empêché d’autres sociétés de s’installer dans le zoning industriel.
Les secondes ont perdu patience et saisi le tribunal d’entreprise de Hasselt qui vient de prononcer la faillite de la société.
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Guillaume Capron
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