Une personne qui a suivi son rêve, qui a fait des sacrifices pour atteindre le sommet, et qui sait gérer le stress qui accompagne cela. Le jeune Belge Toumani Camara est tout cela. De quoi inspirer managers et entrepreneurs.
Sur la liste des orateurs de la Trends Summer University figuraient principalement des entrepreneurs, des politiciens et des universitaires. Mais il y avait aussi un intrus. Toumani Camara (25 ans) a grandi à Watermael-Boitsfort en tant que fils d’une mère célibataire. À l’âge de 16 ans, il a quitté notre pays pour aller étudier en Floride et poursuivre une carrière dans le basketball. Cet été, il a achevé sa deuxième saison au sein de la célèbre ligue américaine NBA avec les Portland Trail Blazers. Il a immédiatement été élu comme l’un des 10 meilleurs défenseurs de cette compétition de très haut niveau.
TRENDS-TENDANCES. Comment devient-on l’un des meilleurs défenseurs au monde ?
TOUMANI CAMARA. L’ironie, c’est que je n’aimais pas défendre autrefois. Enfant, je détestais ça. Jusqu’à ce que mon entraîneur me dise : “Si tu n’aimes pas ça, tu ne pourras jamais bien défendre.” Ce fut un tournant. Dans le sport de haut niveau, tout repose sur le caractère, la persévérance et les efforts que l’on est prêt à fournir pour atteindre quelque chose. Dans quelle mesure es-tu prêt à mettre ton corps en jeu sur le terrain ? En dehors du terrain, je suis très calme. Mais sur le terrain, je peux dépenser mon énergie. Devenir un bon défenseur a été un défi, mais maintenant, c’est un rôle qui me convient.
La NBA est connue pour son intensité. Comment gérez-vous cela ?
L’intensité est énorme. Nous jouons 82 matchs par an. Il y a des périodes où nous sommes 15 jours loin de chez nous et où nous devons disputer 10 matchs pendant cette période. Nous passons d’hôtel en hôtel e nous vivons dans notre valise. Mais j’adore ce jeu et mon rêve était de jouer en NBA. On est prêt à faire beaucoup pour ça.
N’est-ce pas mentalement éprouvant ?
Il s’agit de renforcer sa résilience. Lors de ma première saison en NBA, j’ai connu pas mal de hauts et de bas. Ce n’est pas anormal, chaque sportif connaît des hauts et des bas dans une carrière ou une saison. Ce qui importe, c’est d’essayer d’aplanir ces hauts et ces bas et d’atteindre un niveau constant. Ni trop haut, ni trop bas, mais aussi constant que possible. C’est un processus d’apprentissage.
Et comment y parvenez-vous ?
En introduisant de la régularité dans ce que je fais. C’est pourquoi je crée des routines : manger sainement, dormir suffisamment, bien récupérer. Mais aussi faire d’autres choses, en dehors du sport. Si je ne faisais que du basket chaque jour, même si j’aime ce jeu, j’en aurais peut-être marre à un moment donné. Alors, il y a un risque de traîner les pieds pour aller à l’entraînement. C’est pourquoi je consacre régulièrement du temps à d’autres choses. J’aime dessiner, je m’intéresse à l’art, la musique ou le cinéma. Ou je vais me promener avec ma compagne et le chien. Ce genre d’habitudes m’aide à me mettre dans le bon état d’esprit. Et ce qui m’aide le plus, c’est de rester toujours positif.
Avez-vous toujours rêvé de jouer en NBA ?
Oui, quand j’étais petit, ma chambre était remplie d’affiches de LeBron James et Dwayne Wade. Je rêvais de Miami et de Los Angeles. Mais j’ai compris qu’en venant de Belgique, ce ne serait pas facile de réaliser ce rêve. Les recruteurs NBA ne viennent sûrement pas voir des matchs de basket entre, disons, Woluwe et Schaerbeek.
Est-ce pour cela que vous avez quitté notre pays à 16 ans ?
Il faut de la visibilité, pour qu’on te remarque. Je suis allé étudier et jouer au basket en Floride, et depuis 2019, j’évoluais dans le basketball universitaire américain. J’ai travaillé très dur pour atteindre mon objectif. En même temps, j’ai su m’entourer des bonnes personnes, ce qui m’a permis d’avoir des opportunités.
J’ai su m’entourer des bonnes personnes, ce qui m’a permis d’avoir des opportunités.
Qu’avez-vous ressenti en foulant le terrain pour la première fois avec des stars mondiales absolues comme LeBron James et Stephen Curry ?
La première fois, c’est difficile de ne pas être intimidé par leur renommée et leur réputation. En plus, LeBron James est en réalité encore plus grand que ce qu’il paraît à la télévision. Et Curry est encore plus rapide que ce que l’on voit à l’écran. C’est un moment “waouh”, mais ça ne dure pas plus de deux ou trois minutes. Après ça, c’est simplement de la compétition. À la fin de la journée, mon objectif est de gagner le match et de faire en sorte que ces gars marquent le moins possible.
Y a-t-il d’autres athlètes, dans d’autres sports, que vous admirez ?
J’ai beaucoup de respect pour les sportifs individuels, comme les joueurs de tennis ou de golf. Ils doivent porter toute la pression mentale seuls. Les basketteurs ou les footballeurs jouent en équipe et peuvent toujours chercher du soutien auprès de leurs coéquipiers. Cela fait une vraie différence de pouvoir compter sur son équipe.
Comment Portland soutient-il ses joueurs ?
Nous avons une équipe très jeune, le deuxième effectif le plus jeune de la NBA. Et dans une compétition comme celle-là, énormément de choses nous tombent dessus. Il y a des gars de 18 ans qui gagnent parfois déjà un million de dollars. S’ils ne sont pas bien encadrés, il y a un risque que cela tourne mal. C’est pourquoi les équipes NBA prévoient énormément d’accompagnement. À Portland, il y a plein de gens pour nous aider, jusqu’à un psychologue. La philosophie est claire : faire en sorte que les joueurs aient le moins de soucis possible en dehors du terrain. Ils doivent pouvoir se concentrer sur le basketball. Maximiser le talent et l’effort des joueurs sur le terrain.
Maintenant que vous avez été élu comme l’un des meilleurs défenseurs de la NBA, les attentes augmentent. Comment gérez-vous cela ?
Je compare un peu ça au monde de l’entrepreneuriat : il ne faut pas se contenter de là où vous êtes. Il faut placer la barre plus haut pour soi-même et essayer de devenir encore meilleur. C’est un objectif personnel que je me fixe : ne jamais être satisfait, toujours rester ouvert à de nouvelles choses, être prêt à apprendre, et travailler dur pour s’améliorer.
Savez-vous déjà ce que vous ferez après votre carrière en NBA ?
J’espère encore jouer une quinzaine d’années et, avec un peu de chance, construire une belle carrière. Mais je suis quelqu’un d’ouvert à de nouvelles expériences. Le monde de l’entrepreneuriat m’attire beaucoup. C’est pourquoi je voulais être ici, à la Trends Summer University. Je rencontre de nouvelles personnes, j’entends des choses intéressantes. J’essaie d’être une éponge qui absorbe autant que possible.
Quel genre d’entrepreneur voudriez-vous devenir ?
J’espère pouvoir redonner quelque chose à la société et à la Belgique. Ce pays est vraiment dans mon cœur. Je veux aussi faire quelque chose pour les jeunes en Belgique. J’ai eu des opportunités, ce qui n’est pas donné à tout le monde. Construire une école aux États-Unis pour des jeunes Belges, où ils peuvent étudier et jouer au basket, comme je l’ai fait. Pourquoi pas ? Ce projet est quelque part dans ma tête.
profil
• Né en 2000 à Bruxelles.
• Part à 16 ans en Floride pour y étudier et jouer au basket.
• A d’abord étudié le management sportif, puis la philosophie.
• A joué au niveau universitaire jusqu’en 2023, lorsqu’il a été drafté par les Phoenix Suns.
• Déménage en 2024 chez les Portland Trail Blazers.
• Lors de sa deuxième saison, il est élu dans la All-Defensive Second Team de la NBA.