Loop Earplugs : ces plugs d’oreilles belges qui ont conquis le monde

Maarten Bodewes et Maarten O © DR
Myrte De Decker Journaliste TrendsStyle.be

Loop Earplugs est une entreprise belge spécialisée dans les bouchons d’oreilles. Elle a connu une année record avec un triplement de son chiffre d’affaires, de ses bénéfices et de ses effectifs. Elle pourrait même devenir la première licorne de Belgique dans le domaine des biens de consommation.

L’année 2023 a été une nouvelle année faste pour la start-up anversoise. L’entreprise a vendu 5,2 millions de paires de bouchons d’oreille l’année dernière, pour un chiffre d’affaires de 126,5 millions d’euros. C’est trois fois plus que les 42 millions de l’année précédente. Le bénéfice d’exploitation a augmenté pour atteindre 13,3 millions d’euros. “Nous sommes dans une phase d’hypercroissance”, explique O. “Il est donc très difficile de s’aventurer dans des prévisions annuelles”. Pourtant, les chiffres ont dépassé les rêves et les attentes les plus fous.

Pour expliquer cette réussite, le duo met en avant un certain nombre de facteurs comme leur esprit d’entreprendre, des campagnes de marketing d’un genre nouveau et l’innovation en matière de produits. L’entreprise expérimente et teste beaucoup de nouveaux produits. Et si un produit est moins bien accueilli, il passe rapidement à la trappe.

L’entreprise mise également sur ce qu’on appelle du marketing de performance (soit corréler la rémunération des prestataires en fonction de leur performance NDLR) et fait régulièrement appel à des influenceurs. « Ils racontent une histoire authentique et comment nos bouchons d’oreille ont fait la différence dans leur vie”, explique M. O. “C’est plus convaincant que ce que nous faisons nous-mêmes et que tout ce que nous pourrions faire pour vanter les mérites de nos produits.

Cela n’empêche pas l’entreprise, pour atteindre un nouveau groupe de consommateurs, de lancer en parallèle sa toute première campagne publicitaire, notamment sur des panneaux d’affichage à New York et à Londres.

Toujours dans cette optique d’élargir son public, elle ajoute de nouveaux produits à sa gamme en proposant des collections saisonnières, des produits pour enfants (Engage Kids) ou encore le Switch, un nouvel écouteur 3-en-1. Il s’agit du produit le plus cher de Loop. Lancé en octobre, il a déjà été vendu à 175 000 exemplaires. Afin de poursuivre cette dynamique d’innovation, Loop débloque cette année 20 millions d’euros pour investir dans la recherche et le développement.

L’attention croissante portée à notre hygiène auditive a aussi participé au développement de la marque. L’importance de préserver et protéger son ouïe comme on le ferait avec nos yeux rentre dans les mœurs. Tomorrowland, avec lequel Loop a établi un partenariat depuis 2022 en est un bel exemple. Car si le festival de musique électronique n’a eu que deux week-ends de fête en 2023 contre trois l’année précédente, l’effet sur le chiffre d’affaires a été immédiat. “Cela montre que la collaboration se développe et que la sensibilisation aux dommages auditifs augmente. L’ambition est également de continuer à construire là-dessus cette année”, affirme-t-on.

Le succès de la marque doit aussi beaucoup au fait que l’on met de plus en plus l’accent sur une certaine hygiène sonore. Notre ouïe et l’importance de la protéger sont progressivement reconnues. On en prend soin comme on le ferait pour notre vue ou notre odorat. Cela est déjà apparu clairement à Tomorrowland, avec lequel Loop a conclu un partenariat depuis 2022. Le festival de danse n’a organisé que deux week-ends de fête en 2023, contre trois l’année précédente. Pourtant, les ventes ont augmenté. « Cela montre que la collaboration se renforce, mais aussi que de plus en plus de gens sont conscients des risques que cela fait courir à leur système auditif. L’ambition est donc de continuer à construire là-dessus cette année”

Des prix en cascade

L’histoire de la croissance de Loop ressemble à un conte de fées.

Et ce compte doit beaucoup au fait que leurs bouchons d’oreille sont particulièrement esthétiques. Ils se distinguent par un design à la fois chic et discret. C’était d’ailleurs l’objectif dès le départ. L’idée était de rendre les bouchons d’oreille sexy pour que tout le monde ait envie de les porter. Pas question donc de se cantonner aux horribles bouchons fluorescents. “On peut nous comparer aux lunettes de soleil”, explique Bodewes. “À l’origine, elles n’étaient portées que par les pilotes et les stars de cinéma. Certains les portaient contre la lumière vive du soleil dans le ciel, d’autres contre les projecteurs sur le plateau de tournage. Ce n’est que plus tard qu’elles sont rentrées dans les mœurs. C’est ce à quoi nous aspirons avec nos bouchons d’oreille : faire en sorte que la protection auditive devienne monnaie courante”.

Entre-temps, l’entreprise accumule les distinctions. Une fois de plus, elle figure dans le classement Fast50 de Deloitte, remporte le premier Flanders International Business Award, est désignée Start-up de l’Année par EY, remporte des prix de design et a récemment obtenu le Henry van de Velde Award.

Ces reconnaissances sont belles, mais ce qui rend le patron le plus fier c’est l’enthousiasme de ses équipes et le fait que “98 % déclarent être très fiers de travailler pour nous ».

Un environnement de travail agréable

Le nombre d’employés est passé de 94 en 2022 à près de 236, fin de l’année dernière. À la fin de ce mois, l’entreprise atteindra les 250 employés. “Chaque trimestre, nous recevons environ dix mille demandes”, déclare Bodewes. “Cela montre que les gens ressentent qu’on se développe et que travailler pour nous est agréable.” L’entreprise continue de miser sur les “risky bets”, où les employés disposent d’un budget pour essayer de nouvelles choses. Pendant les mois d’été, il y a aussi les “Summer Fridays”, où les employés ont l’après-midi libre. Les employés peuvent aussi travailler depuis l’étranger pendant un mois.

Pour pérenniser sa croissance rapide, Loop a également débauché quelques talents de haut niveau auprès de multinationales. La direction a été élargie avec deux vice-présidents : Chris Lander (produit), qui travaillait auparavant chez Amazon, et Rob Weston (marketing), qui lui travaillait auparavant chez Asda et Marks & Spencer. Vera-Maria Glahn renforce les troupes en tant que directrice de Studio. Ces embauches illustrent une fois de plus à quel point l’entreprise est internationale. 60 % du chiffre d’affaires provient de l’Amérique du Nord, suivie du Royaume-Uni et de l’Australie. “Nous mettons l’accent sur le caractère international”, déclare O. “Nous communiquons uniquement en anglais, ce qui est bon pour atteindre le marché anglo-saxon, mais aussi les marchés belge et néerlandais.”

Cela n’empêche pas Loop de rester enraciné en Belgique. L’entreprise a bénéficié de subventions pour l’innovation. Cependant, il y a aussi quelques obstacles. “Entreprendre en Belgique est complexe”, déclare O. “Nos employés belges coûtent et de loin les plus chers. Pour faire baisser le coût du travail, il y a les avantages supplémentaires, comme les voitures de société. Mais ces avantages supplémentaires coûtent aussi beaucoup d’argent et ne se retrouvent que dans notre droit du travail.”

Mais cela n’entravera pas les ambitions de croissance de Loop. La start-up vise à dépasser les 200 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2024 et à atteindre un bénéfice opérationnel de 10 %. Une partie du budget de recherche et développement est consacrée à la mise en œuvre de l’intelligence artificielle dans l’entreprise. Cela doit augmenter la productivité des employés, permettre de prendre de meilleures décisions stratégiques et innover là où cela n’était pas possible auparavant.

L’entreprise souhaite continuer à explorer les marchés existants, mais aussi à s’étendre. En 2023, elle a posé pour la première fois le pied en Chine avec cinq employés permanents pour l’expansion et a lancé la boutique en ligne japonaise. “Nous prévoyons que les ventes sur le marché asiatique vont tripler à quintupler”, déclare O. “Ce ne sera pas notre plus grand marché de croissance, mais nous sommes déterminé à y creuser notre trou.”

Une Licorne ?

Apprécient-ils leur liberté financière qui leur permet de refuser des investisseurs ? Voilà une question qui fait scintiller les yeux des fondateurs de Loop Earplugs, Dimitri O et Maarten Bodewes. « C’est agréable de pouvoir répondre confortablement par la négative aux questions des entrepreneurs qui ont de l’argent”, s’amuse Dimitri O. Et c’est vrai qu’au démarrage, en 2016, même les investisseurs chevronnés regardaient Loop avec scepticisme. Comment une entreprise de bouchons d’oreilles pouvait-elle connaître le succès ? Bodewes et O n’étaient-ils pas naïfs de penser qu’ils avaient un produit phare entre les mains ou qu’ils réaliseraient un chiffre d’affaires d’un million d’euros ? Ceux-là doivent aujourd’hui s’en mordre les doigts. Loop est en bonne position pour devenir la première licorne (une start-up valant plus d’un milliard de dollars) de Belgique dans le domaine des biens de consommation directs. L’année dernière, l’horizon pour atteindre cet objectif a pourtant été reporté de trois à cinq ans. “C’est certainement une étape que nous cherchons à franchir, mais ce n’est pas un but en soi. Nous continuons à investir dans de nouveaux produits et à élargir nos marchés et segments de clients. C’est une philosophie importante pour nous afin de construire une entreprise durable. Cependant, en nous basant sur les modèles d’évaluation qui reposent sur la croissance, le chiffre d’affaires et les bénéfices, nous sommes effectivement sur la bonne voie pour atteindre cette étape dans un futur proche »

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