Lionel Desclée, portrait de l’étoile montante du “retail”
Il fait partie de ces Belges qui brillent à l’international. A 42 ans, Lionel Desclée s’apprête à revenir du Japon, où il a dirigé pendant trois ans la filiale locale du numéro un mondial de la distribution, Walmart. Mais où va bien pouvoir rebondir celui qui rêve de “réaliser des choses extraordinaires avec des gens ordinaires”?
Retour au bercail pour Lionel Desclée. A 42 ans, ce visage bien connu du retail belge, dont beaucoup, dans le milieu, saluent la carrière brillante, s’apprête à rentrer du Japon avec son épouse et ses trois enfants en ce début juillet. C’est pour lui la fin d’une mission de trois ans à la tête de Seiyu, filiale japonaise du numéro un mondial de la distribution Walmart. Le groupe a en fait finalisé cette année la cession de son enseigne locale au géant américain du capital-investissement KKR, qui a pris une participation majoritaire de 65% alors que le spécialiste japonais de l’e-commerce Rakuten entrait, lui, au capital de la chaîne à hauteur de 20%, Walmart conservant les 15% résiduels.
Walmart m’a fait des propositions pour les Etats-Unis, mais j’ai décidé de rentrer en Europe.
Nous sommes en 2018 lorsque Lionel Desclée est recruté par le leader mondial de la grande distribution. Quatre patrons viennent alors de se succéder en cinq ans à la tête de Seiyu. Autant dire que la situation est compliquée. Walmart ne parvient pas à vendre sa filiale. Cela tombe bien: notre homme aime les défis! “Etant optimiste par nature, j’étais très excité à l’idée d’améliorer les performances de la chaîne”, dit-il. Cette dernière jouissait d’une mauvaise perception de la part des clients. Elle devait être repositionnée en tant qu’enseigne locale orientée prix bas. “Il fallait améliorer la fraîcheur des produits, accélérer sur l’e-commerce et, de manière générale, repositionner Seiyu favorablement sur le long terme.”
Dès son arrivée à bord, Lionel Desclée en est persuadé: faire entrer au capital de Seiyu des actionnaires locaux aux côtés de Walmart a tout son sens. “C’est ce que j’ai proposé au groupe, dit-il. Avec l’aspiration d’entrer en Bourse à terme. Nous avons amélioré la part de marché de la chaîne, renforcé l’engagement des employés et augmenté le résultat net de 40% en deux ans. A partir du moment où les actionnaires changent et que l’opération est un succès, mon mandat prend fin.”
Carrière internationale
Lionel Desclée a toujours rêvé d’une carrière internationale. “Quand j’étais jeune, j’ai d’abord voulu être médecin, puis diplomate, raconte-t-il. Après une licence en sciences économiques à l’UCL et un master en financial management à la Vlerick Business School, il débute sa carrière chez ING, où il ne restera que deux ans. Nous sommes en 2005 lorsque le jeune homme met un premier pied dans le retail, au sein du Groupe Delhaize. Il fera partie de la tribu des Lions pendant 12 ans. Dès le début, il se tourne vers l’international et travaille dans les filiales européennes du groupe de distribution, en Roumanie et en Grèce. L’objectif est alors de créer des synergies à différents niveaux. En 2007, notre interlocuteur revient au pays pour occuper pendant trois ans le poste de director business planning & investments chez Delhaize Belgique. Il deviendra ensuite responsable de Tom&Co, la chaîne de produits pour animaux encore aux mains de Delhaize à l’époque.
En 2012, le voilà qui repart à l’étranger pour devenir pendant deux ans vice president finance & business planning de Delhaize America. Et comme une expérience internationale précède toujours un retour au bercail pour notre retail man, Lionel Desclée revient au pays en 2014, fait son entrée au comité de direction de l’enseigne au lion, et devient senior vice-president des magasins franchisés et de l’immobilier en Belgique.
Rachat de Tom&Co
La suite est connue. Le Groupe Delhaize est racheté par le géant néerlandais Ahold. L’enseigne décide alors de se délester de Tom&Co, et c’est… Lionel Desclée qui la rachète avec son acolyte Thierry le Grelle, un ancien de la banque Lazard. Ce dernier devient CFO de l’animalerie, alors que Lionel Desclée prend les commandes opérationnelles. Il restera CEO de Tom&Co pendant deux ans. “Il a fallu le temps de ‘déconnecter’ entièrement l’entreprise de Delhaize, explique-t-il. Lorsque Tom&Co a été totalement indépendant et que l’entreprise continuait à bien se développer en Belgique, en France et au Luxembourg, un chapitre important se terminait. J’ai décidé de continuer dans un rôle plus stratégique au sein du board et de céder mon siège de CEO à Thierry.”
C’est que notre homme vient d’être contacté par Walmart. Sa soif de défis se fait ressentir. Et surtout, son envie d’ailleurs. S’il reste actionnaire et membre du conseil d’administration de Tom&Co, Lionel Desclée accepte donc la proposition qui lui est faite de se rendre au Japon pour prendre la tête de Seiyu. Il déménage alors avec toute sa famille. “Le retail est un petit monde, explique-t-il. Plusieurs personnes étaient passées de Delhaize à Walmart au fil des ans (on pense notamment à l’ancien CEO de Delhaize Belgique entre 2011 et 2014, Dirk Van den Berghe, Ndlr). C’est ainsi que les premiers contacts ont été établis.”
Au Japon, Lionel Desclée s’enrichira d’une culture qu’il ne connaissait pas du tout. “Celle-ci est basée sur des valeurs partagées par tous, explique le quadra. Le collectif passe avant l’individu, la culture de l’effort et du travail parfaitement exécuté est très importante. Au niveau du retail proprement dit, l’Asie est un continent très intéressant, beaucoup plus avancé en matière de digital et d’automatisation.” Autant de compétences que notre interlocuteur va pouvoir exploiter dans la suite de son parcours. De quoi rêve-t-il, justement? Dans un premier temps, de retrouver sa famille et ses amis. “Walmart m’a fait des propositions pour les Etats-Unis, mais j’ai décidé de rentrer en Europe pour des raisons familiales, explique le manager. Je me donne l’été pour réfléchir aux différentes options. Dans l’immédiat, je vais me consacrer aux boards dont je fais partie, notamment chez bpost, où je viens d’entrer comme administrateur indépendant. Pour la suite, j’ai une passion pour le consumer business. Le retail est une magnifique plateforme, mais cela pourrait aussi être chez un fabricant.” Une multinationale de l’agroalimentaire? “Pourquoi pas? Mais cela pourrait aussi être plus local. Je ne me ferme aucune porte. Ce que j’aime, c’est avoir un impact positif sur la société. Le tout est à présent de trouver la meilleure plateforme permettant d’atteindre cet objectif.”
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