L’huile d’olive bientôt un produit de luxe ? La pénurie en Europe fait exploser les prix
L’approvisionnement en huile d’olive en Europe s’épuise fortement à cause des conditions climatiques extrêmes. Le prix au litre a explosé en une année.
L’huile d’olive est-elle en passe de devenir un produit de luxe ? En Espagne, les bouteilles sont désormais protégées dans les vitrines antivols des supermarchés, à l’instar de bouteilles de vin onéreux ou de champagne, rapporte le quotidien français Le Monde.
L’Europe est en effet presque à court de ses réserves d’huile d’olive. Les pays producteurs sont confrontés à des pénuries, après que des conditions météorologiques extrêmes – dont des vagues de chaleur et des orages de grêle – ont fortement endommagé les récoltes et cela, pour la deuxième année consécutive.
Les producteurs sont même forcés d’importer de l’huile d’olive d’Amérique du Sud, pour répondre aux demandes de livraison. Ils se voient ainsi obligés de combler le manque avant l’arrivée de la récolte de cette année, qui commence traditionnellement en octobre, car les approvisionnements en gros sont épuisés dans toute l’Europe. “Aujourd’hui, il est presque physiquement impossible d’acheter de l’huile d’olive. Elle est épuisée“, confirme Walter Zanre, le directeur général de la filiale britannique de Filippo Berio, au journal The Guardian.
La “pire récolte du siècle”
L’Espagne qui produit à elle seule la moitié de l’approvisionnement mondial en huile d’olive est confrontée à une grave pénurie. Selon les analystes du groupe de données sur les matières premières Mintec, les producteurs ne détiennent actuellement qu’environ 115.000 tonnes d’huile d’olive disponible en stock en Espagne, contre une utilisation mensuelle d’environ 60 000 tonnes, rapporte The Guardian. La sécheresse dont souffre ce pays du sud de l’Europe a réduit la récolte d’olives à peau de chagrin. Avec à peine 673.000 tonnes lors de la récolte 2022-2023, la production a chuté de 55 % par rapport à la récolte précédente. Le pays pouvait compter sur 1,3 million de tonnes environ les années passées.
A cette récolte minime “très en deçà” des normes historiques – la « pire du siècle » comme ne cessent de répéter les agriculteurs – s’ajoutent les hausses des prix de l’électricité, des carburants et des fertilisants, qui ont fait bondir leurs frais fixes. Certains producteurs se disent au bord de la faillite.
Une production mondiale en chute libre
Ailleurs en Europe, les prévisions ne sont pas bonnes non plus. Les incendies de forêt et les températures estivales élevées menacent l’industrie ancienne des olives un peu partout dans la région méditerranéenne, et notamment en Grèce, en Italie, au Portugal, ainsi qu’en Turquie et au Maroc. On s’attend à ce que la Grèce produise seulement 200.000 tonnes cette année, soit un tiers de moins que l’année dernière, en raison de la chaleur extrême et des problèmes d’infestation par la mouche des fruits. La Tunisie, la Turquie et la Syrie ont même récemment cessé d’exporter de l’huile. Elles cherchent avant tout à protéger une denrée locale des prix élevés à l’échelle internationale.
Quant à l’Italie, ses espoirs de produire jusqu’à 350.000 tonnes ont aussi été douchés par la sécheresse, rapporte The Guardian. Dans les Pouilles, de récentes chutes de grêle ont fait tomber les fruits mûrs des arbres. Les producteurs italiens ont également été touchés par la maladie bactérienne surnommée “l’ébola de l’olive” – Xylella fastidiosa – qui a tué 6 millions d’arbres au cours des dernières années.
Dans ce contexte alarmant, la production mondiale devrait chuter à 2,4 millions de tonnes selon le Conseil oléicole international, moins que la récolte de l’année dernière et bien en deçà de la demande mondiale d’environ 3 millions de tonnes. Pour les années à venir, les perspectives sont incertaines en raison du changement climatique, anticipant des conditions plus chaudes, plus sèches et plus extrêmes dans tout le pourtour méditerranéen.
Des prix “monstrueux”
Le déséquilibre entre l’offre et la demande a entraîné des hausses de prix très importantes, dont les producteurs bénéficient mais qui font mal aux consommateurs. Les craintes de pénuries ont fait grimper en flèche les prix de gros. Le coût de l’huile d’olive extra vierge d’Andalousie, dans le sud de l’Espagne, a atteint 8,45 euros par kg ce mois-ci. Ce qui représente plus du double du prix de l’année dernière et le prix le plus élevé jamais enregistré en 20 ans.
« Les prix sont monstrueux », confirme Roberto Sanchez, 70 ans, devant les étals d’un grand magasin Carrefour de la banlieue de Madrid. « Auparavant, la même bouteille me coûtait moins de 5 euros. Dernièrement, elle est montée à 12 euros. Là, je vais faire des provisions parce qu’il y a une offre spéciale à 10 euros”, explique ce consommateur espagnol, interviewé par Le Monde.
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