Les entreprises sont-elles prêtes à faire face à une nouvelle vague de Covid-19?
Il y a plus de trois ans, l’apparition du coronavirus et la crise sanitaire qui allait en découler ont pris par surprise entreprises et travailleurs. Aujourd’hui, les cas de Covid se multiplient à nouveau. Mais, est-ce que notre économie est prête à en absorber le choc en cas de nouveau confinement?
En cette période de rentrée scolaire, alors que les élèves retournent à l’école et à l’université, alors que les employeurs rappellent leurs collaborateurs au bureau, les cas de Covid-19 augmentent à nouveau un peu partout dans le monde. Deux nouvelles variantes – BA.2.86 (Pirola) et EG.5 (Eris) – ont déjà fait leur apparition et ce y compris aux États-Unis et au Royaume-Uni. Et la Belgique n’est pas épargnée puisqu’entre le 20 et le 26 août, 1.660 nouvelles contaminations au Sars-CoV-2 ont été dépistées en moyenne par jour, en hausse de 35% par rapport à la semaine précédente, indiquait l’Institut de santé publique Sciensano.
Ainsi, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) s’inquiète de « tendances préoccupantes » concernant le Covid-19, à l’approche de l’hiver. Bien que les données sur le Covid soient limitées parce que de nombreux pays ont cessé de les communiquer, « nous constatons toujours des tendances inquiétantes concernant le Covid-19 à l’approche de la saison hivernale dans l’hémisphère nord », a déclaré le chef de l’OMS, Tedros Adhanom Ghebreyesus. « Les décès augmentent dans certaines régions du Moyen-Orient et d’Asie, les admissions dans les unités de soins intensifs sont en hausse en Europe et les hospitalisations augmentent dans plusieurs régions », a-t-il déclaré.
Mais pourquoi cette inquiétude à l’approche de la période hivernale ? «C’est inquiétant car nous allons connaître des mois plus froids dans certains pays: les gens auront tendance à passer plus de temps ensemble à l’intérieur, et les virus qui se transmettent par voie aérienne comme le Covid en profiteront », précise-t-il encore.
De plus, souligne la BBC sur son site internet, l’augmentation du nombre de cas soulève la question suivante : que se passera-t-il si nous sommes à nouveau confrontés à une crise sanitaire de grande ampleur ?
Si on reconfinait ?
Le confinement de 2020 a particulièrement inquiété les chefs d’entreprise, car lors de l’arrivée en force de la pandémie, les entreprises n’étaient absolument pas préparées. La situation d’urgence les a poussés à prendre des décisions rapides qui ont eu des répercussions majeures dans plusieurs domaines : leurs finances, la santé et la sécurité des travailleurs, sans oublier à plus grande échelle l’économie du pays. De nombreuses entreprises ont pu opter pour le télétravail, d’autres ont dû fermer boutique… parfois définitivement, rappelle la BBC.
Aujourd’hui, les entreprises se demandent si, en cas d’un nouveau pic épidémique, leurs employés hésiteront à retourner au bureau et si les consommateurs abandonneront à nouveau magasins, restaurants et hôtels.
Mais aujourd’hui, nous avons un avantage de taille contre ce virus: avec plus de trois ans d’expérience en matière de pandémie, “nous disposons d’outils pour atténuer les conséquences de Covid-19 sur la population”, déclare Rachael Piltch-Loeb, chercheuse à l’école de santé publique T.H. Chan de l’université Harvard, au site d’information britannique. Les travailleurs essentiels resteront toutefois en première ligne, et comme certains chefs d’entreprise adoptent une ligne dure en matière de politique de retour au bureau, la prochaine vague de Covid n’affectera pas toutes les entreprises ou tous les travailleurs de la même manière.
Un plan solide et une bonne communication
L’incertitude qui plane est effrayante. Mais aujourd’hui, après avoir fait face, au cours des dernières années, à plusieurs vagues de fermetures et à des changements de cap dans la lutte contre le virus, la plupart des entreprises et des employés disposent d’un plan d’action pour travailler. Même si une prolifération de contaminations force les travailleurs à rester chez eux ou modifie la façon de fonctionner des entreprises, le choc ne sera pas tout à fait le même qu’en 2020. D’après ce que Mme Piltch-Loeb a déclaré à la BBC, il est important de souligner que “les entreprises se sont adaptées à des environnements de travail différents… La façon de travailler a changé pour la majorité de la main-d’œuvre”. Depuis la crise sanitaire, les entreprises ont mis en place des politiques de télétravail et des modalités opérationnelles de crise. Dans certains cas, ajoute-t-elle, elles ont également mis à jour ou ajouté une politique en matière de congés de maladie et de congés parentaux.
En fait, les employeurs sont mieux préparés que par le passé à faire preuve de souplesse. De nombreux employés savent maintenant comment télétravailler, d’ailleurs beaucoup le font encore, même après la levée des restrictions sanitaires. L’essentiel de l’infrastructure nécessaire aux entreprises pour fonctionner à distance est déjà en place; les entreprises n’auront pas à se démener pour maintenir la continuité de leurs activités.
Selon Francesca L. Beaudoin, professeur et titulaire de la chaire d’épidémiologie à l’université Brown, aux États-Unis, “alors que le nombre des contaminations augmente, les entreprises qui ont une certaine mémoire institutionnelle seront en mesure de mieux s’en sortir”, retransmet le média britannique. Elle ajoute que celles qui pensent et se projettent au-delà de la prochaine vague de Covid-19 seront également les mieux placées pour réussir. Quant à Elissa Perry, psychologue et professeur de psychologie et d’éducation au Teachers College de l’université de Columbia, aux États-Unis, elle ne pense pas que l’augmentation du nombre de contaminations cet automne entraînera le même niveau de perturbation qu’en 2020 et 2021, en particulier pour les entreprises qui sont capables de faire preuve de flexibilité et de souplesse.
Pourquoi ? car les chefs d’entreprise sont aujourd’hui plus à l’écoute de leurs employés, tant sur le plan physique que psychologique. “Nous avons constaté les nombreuses conséquences des confinements, non seulement sur la santé physique des travailleurs, mais aussi sur leur bien-être social et émotionnel”, explique Mme Perry. Aujourd’hui, plutôt que d’essayer uniquement de protéger les employés contre le virus, comme ils le faisaient initialement, “les employeurs essaient de trouver un équilibre entre le risque physique et le risque émotionnel”.
Mais gare à l’épuisement
Cependant, Mme Piltch-Loeb estime que la situation peut être différente pour les travailleurs essentiels et ceux qui occupent des emplois en première ligne.
Si l’infrastructure peut être mise en place pour faire face à une augmentation du nombre de cas de Covid, et si les rôles quotidiens ne changeront pas beaucoup, certains travailleurs risquent de ne pas s’en sortir aussi bien que ceux qui travaillent dans les bureaux. “En cas de nouvelle fermeture et confinement, il y a de fortes chances que ces travailleurs soient épuisés”, dit-elle, ajoutant selon la BBC, qu’ils sont nombreux à ne s’être pas encore remis du premier confinement.
En outre, les entreprises et les services qui ont continué à fonctionner au plus fort de la pandémie ont vu leurs effectifs diminuer et éprouvent encore des difficultés à recruter. Les effectifs étant déjà limités, “un autre confinement où les services essentiels seraient chargés de fonctionner comme d’habitude serait un défi”, déclare Mme Piltch-Loeb au site britannique. “Nous devrions compter à nouveau sur les mêmes personnes – un groupe déjà épuisé et, dans certains cas, au bord du burn out. »
Mme Perry fait également remarquer qu’il est difficile de savoir exactement comment certains secteurs s’en sortiront en cas de nouvelle vague, car leurs travailleurs occupent des emplois différents de ceux qu’ils occupaient au début de la pandémie en mars 2020. Elle cite le cas des personnes qui luttent contre un Covid long et qui “pourraient avoir une réaction totalement différente de ceux qui n’ont pas connu cette expérience”. De même, les travailleurs dont la santé mentale a été fragilisée par le confinement et qui continuent de se battre contre cela, il est difficile de prédire comment un nouveau changement sur leur lieu de travail les affecterait.
Nager ou couler
Qu’un nouveau confinement soit ou non à l’ordre du jour, l’augmentation actuelle du nombre de contaminations offre aux entreprises deux options : couler ou nager. Les employés savent désormais ce qu’est une bonne – et une mauvaise – gestion de crise, et ils attendront de leurs patrons des signaux clairs pour les guider à travers une nouvelle vague de l’épidémie.
Selon Mitchell Lee Marks, psychologue et consultant en développement commercial, les entreprises qui ont bien géré, par le passé, la communication liée au Covid-19 doivent continuer à le faire. Quel que soit le secteur d’activité, les travailleurs attendent des messages clairs “venant d’en haut”, souligne la BBC. Et celles qui, par le passé, ont mal communiqué, ont l’occasion de rattraper leurs erreurs. Quoi qu’il en soit, les entreprises qui ne fournissent pas suffisamment de conseils en cas de crise risquent de perdre leurs employés au profit d’entreprises qui les soutiendront mieux pendant une nouvelle période d’incertitude.
En outre, Mme Piltch-Loeb souligne que les employeurs ont un rôle à jouer quant à l’impact d’une nouvelle vague d’infections sur la santé mentale. Selon elle, si certains travailleurs peuvent bénéficiers de conseils psychologiques ou de jours de repos, cet accès n’est pas “universel” dans toutes les professions. Face aux difficultés des travailleurs, il est important que les entreprises apportent le plus de soutien possible et encouragent les employés à profiter de ces avantages.
Malgré l’incertitude qui plane sur l’avenir, les experts estiment que les entreprises et les travailleurs seront probablement en mesure de s’adapter rapidement aux défis qui se présenteront, qu’il s’agisse de Covid-19 ou d’autres problèmes. Ces dernières années ont été une épreuve du feu, ce qui a permis à de nombreuses entreprises d’apprendre énormément et de mettre en place des plans qui les aideront à aller de l’avant.
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