Les employés sont plus souvent absents depuis la crise sanitaire

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Les employés se sont déclarés plus souvent malades en 2021 que lors des années précédentes. Mais toutes les absences ne sont en aucun cas dues à une infection au coronavirus. Ceux qui travaillent à domicile semblent faire face à des problèmes de nuque et de dos, et leur bien-être mental semble également sous pression.

Deux années de crise sanitaire commencent à laisser des traces un peu partout. Les prestataires de services RH SD Worx et Acerta ont récemment publié des études concernant les absences pour maladie en 2021. SD Worx a conclu que les employés belges ont été plus souvent absents en 2021 que les années précédentes. Acerta arrive aux mêmes conclusions et calcule qu’un employé a été absent en moyenne 6,5 jours l’année dernière. Au cours des cinq dernières années, ce chiffre n’avait jamais été aussi élevé.

Télétravail

Que l’absentéisme soit plus élevé pendant une pandémie est relativement logique. Mais toutes les absences ne sont pas dues à une infection au coronavirus ou à la quarantaine qui l’accompagne. Le télétravail, qui isole socialement, joue-t-il aussi un rôle ? “Il ne faut pas déduire des chiffres d’absences de courte durée en hausse que le télétravail en est forcément la cause”, affirme Lode Godderis, le directeur général d’Idewe, le plus grand service externe de prévention et de protection au travail. “En période de télétravail intensif, les courtes périodes d’absence diminuent effectivement. Après tout, il est plus confortable de travailler chez soi avec des symptômes légers que de se rendre au bureau. En fait, nous constatons surtout des tendances que nous avons toujours observées : les jeunes employés sont plus souvent absents pour de courtes périodes, l’absentéisme de longue durée concerne plutôt les employés plus âgés.” Environ la moitié des travailleurs à domicile souffrirait aussi de problèmes de cou et de dos. “Un bureau à domicile ergonomique reste un défi”, confirme Lode Godderis.

Dans les secteurs où le télétravail est difficile, l’absentéisme est nettement plus élevé. En d’autres termes, les effets du coronavirus s’appliquerait davantage aux bleus de travail qu’aux cols blancs. Kim Van Houtven, consultante senior en ressources humaines chez SD Worx, interprète l’augmentation de l’absentéisme de manière plutôt laconique : “L’absentéisme a augmenté, mais n’a pas explosé. Cette situation met les entreprises sous pression, surtout si elles ne peuvent pas se rabattre sur le travail à domicile.”

Miet Vanheegen, d’Acerta, pense que le fait que les jeunes employés, en particulier, se soient faits plus souvent porter pâle l’année dernière s’explique en grande partie par les problèmes de garde des enfants en âge scolaire. “Il est logique que nous ayons des chiffres élevés en matière de congés de maladie en 2021”, explique-t-elle. “Contrairement à 2020, la plupart des secteurs étaient ouverts et les chiffres d’infection ont atteint un pic important. Cela s’est forcément traduit dans les chiffres d’absence. Nous avons constaté une augmentation particulièrement marquée dans la tranche d’âge des trentenaires et des quadragénaires. Ce groupe comprend de nombreux parents dont les enfants sont forcément en âge de scolarité.”

Des problèmes de dos et/ou de nuque peuvent survenir à cause du télétravail si l'employé ne dispose pas d'un bureau ergonomique.
Des problèmes de dos et/ou de nuque peuvent survenir à cause du télétravail si l’employé ne dispose pas d’un bureau ergonomique.© iStock

Bien-être mental

La crise sanitaire de la Covid-19 et ses politiques de limitation de certaines libertés ont joué un rôle évident sur le bien-être mental des employés. La neuvième enquête de santé covid-19 réalisée par Sciensano a récemment révélé qu’un Belge sur trois se disait insatisfait de sa vie. Cela se ressent forcément jusque sur le lieu de travail.

Koen Van Hulst dirige le département psychosocial de Mensura. Cette équipe comprend 52 psychologues auxquels les employés des clients de Mensura peuvent s’adresser pour une discussion confidentielle s’ils rencontrent des problèmes sur le plan mental. “Nous constatons une augmentation du nombre de conversations en rapport avec la crise sanitaire”, dit-il. “En 2021, nous avons reçu 17 % de demandes supplémentaires”. Cette augmentation est frappante car le nombre de demandes d’appel reste généralement plus ou moins le même. En outre, les raisons des consultations semblent de plus en plus être en lien avec ce qu’il se passe en dehors du travail. “Nous constatons qu’une combinaison d’aspects liés au travail et à la vie privée joue un rôle de plus en plus important”, indique M. Van Hulst. “En soi, ce n’est pas surprenant, car les personnes qui travaillent à domicile doivent aussi composer avec les autres personnes qui restent assises à la maison. Cela peut forcément affecter certains employés. Il s’agit souvent de personnes qui sont sous pression depuis un certain temps, mais pour qui la nouvelle méthode de travail instaurée à cause de la crise sanitaire a été la goutte d’eau qui a fait déborder le vase.”

Lode Godderis observe également des avantages du travail hybride pour le bien-être mental. Les chiffres recueillis par Idewe montrent que les employés pratiquant un régime de travail hybride possèdent un risque plus faible d’épuisement professionnel et éprouvent plus de plaisir dans leur travail. “Certains éléments du travail à domicile ont un effet positif sur la santé mentale”, conclut-il. “Une plus grande autonomie et une plus grande flexibilité dans vos horaires de travail sont des exemples classiques. Lorsque les entreprises ont recours à ce procédé, l’on constate un impact positif.”

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Mais la distance accrue entre les collègues et la direction peut aussi poser un éventuel problème. “La manière dont le télétravail est organisé a un impact important sur le ressenti des personnes”, explique Lode Godderis. “La tendance à conclure des i-deals (idiosyncratic deals, ndlr), où l’on décide au cas par cas de ce que l’employé et le manager attendent l’un de l’autre, est prometteuse. Une bonne politique de travail à domicile reste cependant nécessaire parce que les gens aiment comparer leurs situations. Une certaine équité est donc nécessaire pour que le modèle fonctionne.”

En outre, le nouveau mode de travail hybride a également pour effet bénéfique (du moins pour les employeurs) que les employés travail davantage. Dans le passé, ils se déplaçaient pour aller travailler. Ce temps était souvent considéré comme faisant partie de la journée de travail, mais maintenant que le trajet est éliminé, les gens travaillent simplement une heure et demie de plus. Mais attention, cela peut parfois aussi conduire à des épuisements. “Trouver l’équilibre entre ce que l’on peut faire et ce que l’on doit faire devient un sérieux défi”, prévient Koen Van Hulst. “Ces derniers temps, les employés ont aussi dû prendre en compte tous les changements de règles et de mesures, et pas seulement au travail. Les trentenaires ayant des enfants en bas âge, par exemple, subissaient une pression supplémentaire car ils n’étaient pas seulement employés et parents, mais aussi enseignants quand ils devaient assurer le suivi des devoirs à domicile. On constate que pour certains d’entre eux, il est désormais plus difficile de rétablir un équilibre dans leur vie.”

Affections physiques

Ellen De Vleeshouwer, directrice générale chez AG Health Partner, souligne qu’il ne faut pas non plus négliger l’impact physique et social de la corona. Son entreprise aide d’ailleurs les employeurs à améliorer le bien-être social et physique de leurs employés. “Je remarque parfois que l’on se concentre trop sur le mental”, dit-elle. “Bien sûr, cela peut aider si les employeurs soutiennent leurs employés mentalement, mais nous ne devons pas oublier que de nombreux employés télétravaillent encore à la maison dans des conditions ergonomiques sous-optimales. Par exemple, les réunions virtuelles consécutives ne sont pas seulement mauvaises pour la résilience mentale, mais elles ont aussi des conséquences physiques. Lorsque vous passez d’une réunion de Zoom à une autre, vous n’avez pas le temps de vous lever, d’étirer votre dos ou de prendre l’air. Nous avons constaté dans nos contacts avec les entreprises que cela pose souvent des problèmes. Les employeurs doivent trouver un moyen d’intégrer les initiatives de bien-être dans un modèle hybride “, poursuit Ellen De Vleeschouwer.

Télétravailler avec parfois les enfants à la maison et leurs devoirs à tenir à l'oeil a été un défi compliqué pour de nombreux parents en cette période de crise sanitaire.
Télétravailler avec parfois les enfants à la maison et leurs devoirs à tenir à l’oeil a été un défi compliqué pour de nombreux parents en cette période de crise sanitaire.© iStock

Les problèmes de dos et de cou figurent parmi les principales causes d’absence de longue durée. Le lieu de travail a connu une demi-métamorphose ces des deux dernières années avec le télétravail qui prenait le dessus sur le présentiel. Mais le bureau à domicile n’a en aucun cas réduit les plaintes relatives aux problèmes de nuque et de dos. “Nous constatons que la hauteur de la chaise de bureau, un aspect de base facile à régler, n’est pas correctement ajustée chez 90 % des personnes qui travaillent à domicile. Cela s’explique évidemment par le fait que les gens doivent souvent partager leur bureau à domicile avec leur partenaire et leurs enfants. Et tout le monde n’est pas conscient de l’importance d’une bonne hauteur de la chaise de bureau.”, explique Lode Godderis. Les conclusions d’Idewe montrent également que dans la moitié des cas, la table de travail n’est pas correctement positionnée. “Nous estimons que le télétravail entraîne une légère augmentation de 15 % des plaintes relatives à la nuque et au dos”, affirme le directeur général d’Idewe. “La nuque et le dos ont toujours été des causes importantes de maladies de longue durée. Nous estimons qu’environ la moitié des travailleurs à domicile souffrent de problèmes de nuque et de dos. Un poste de travail à domicile ergonomique reste un défi.”

Un certain nombre d’employeurs font des efforts considérables en organisant des séances d’information, voire en envoyant un spécialiste qui examine le bureau du domicile. “Certains employeurs y parviennent mieux que d’autres”, estime Ellen De Vleeshouwer. “Ils prennent le pouls en effectuant des enquêtes et prennent ensuite des mesures supplémentaires comme la réduction de la durée des réunions. Outre les composantes physique et mentale, la composante sociale joue également un rôle dans la prévention du burn-out. Une pression de travail élevée devient plus supportable s’il y a un vrai soutien de la part des collègues et des superviseurs. Le travail hybride met sous pression ce filet de sécurité que constitue la connexion naturelle dans dans le bureau. Vous devez également vous demander comment numériser cette politique de bien-être des employés : une corbeille de fruits au travail est bonne pour l’ambiance, mais vous ne pouvez pas en distribuer à tout le monde chez eux. La formation ne peut plus être organisée dans des salles de réunion sur le lieu de travail. Il faut trouver un moyen d’intégrer ces initiatives de bien-être dans un modèle hybride.”, conclut celle qui est directrice générale chez AG Health Partner.

Comment éviter les défaillances par effet corona ?

La transparence. Les employeurs doivent également être capables d’improviser en matière de travail à domicile. En étant transparent à ce sujet, les employés ont la possibilité de faire des remarques qui permettent aux entreprises de s’ajuster. Maintenant tous les jobs ne correspondent pas non plus de la même manière au nouveau modèle de travail.

Contacts informels. Depuis la crise sanitaire, le maintien du contact social entre employés par des moyens numériques est l’une des tâches importantes de la direction. En cas d’échec, les employés deviennent plus frustrés et ont l’impression de ne pas être vus.

Temps de déconnexion. La ministre de la Fonction publique Petra De Sutter (Groen) n’oblige pas les fonctionnaires à répondre à leur téléphone en dehors des heures de travail. Cela pourrait être un exemple de directives de télétravail des employeurs privés. “Même avant la crise du Covid, il y avait un problème de déconnexion du travail”, explique Koen Van Hulst de Mensura. “Les personnes qui continuent à travailler par e-mail ou par téléphone et oublient que notre cerveau a parfois besoin de repos. Tout le monde se précipite de réunion en réunion, mais oublie de prendre le temps entre celles-ci. Neurologiquement, nous avons besoin de ce temps d’arrêt. La période de Covid n’a fait qu’aggraver la situation. À l’avenir, il sera important de mettre l’accent sur ce point.”

Tenir compte des équilibres individuels. Comme chaque employé est différent, il est bon de tenir compte de la situation familiale individuelle lors du télétravail. Dans le même temps, un cadre de télétravail est nécessaire. Lode Godderis de l’Idewe : “Les accords individuels sont possibles dans ce cadre, mais l’individu ne doit pas briser l’équilibre du cadre.”

Garder un oeil sur le bureau. Pendant les différents lockdowns, de nombreuses entreprises se sont concentrées sur les télétravailleurs, mais ont oublié qu’il y avait aussi des employés qui n’avaient pas d’autres choix que de travailler sur place et parfois dans des conditions difficiles. Ils ne doivent pas non plus se sentir oubliés.

Selon Acerta, un employé a été absent en moyenne 6,5 jours l’année dernière.

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