Fraîchement auréolé du titre de “L’Entrepreneur inspirant de l’année 2025”, Sydney Funck veut faire de son agence de “branding” Nemesis un véritable acteur de changement. Portrait d’un trentenaire ambitieux.
Dans la mythologie grecque, Némésis est la déesse de la vengeance et de la justice divine. Pour punir l’orgueil excessif des hommes qui ont tendance à se prendre pour des dieux, elle s’abat sur les mortels avec un châtiment terrible censé rétablir l’équilibre. “Elle est brutalement honnête et prend ses décisions sans aucun ego, ce qui correspond à nos valeurs, tranche d’emblée Sydney Funck, cofondateur et CEO de la société belge Nemesis. Mais si nous avons choisi ce nom, c’est aussi pour une autre raison : nous voulons être le Nemesis du secteur des agences de branding pour détruire l’ancien monde et construire le nouveau.”
Le décor est planté. Au fil du temps, l’acception du nom Némésis s’est en effet enrichie d’une notion d’adversaire implacable et souvent victorieux qui entend bousculer l’ordre établi. Résolument disruptif, Sydney Funck compare d’ailleurs sa quête entrepreneuriale au pari d’Elon Musk qui, avec sa marque Tesla, a forcé le changement sur le marché automobile.
“Notre ambition est de faire de Nemesis la meilleure agence de branding du monde, surenchérit le patron trentenaire. Créer ou repenser une marque, cela ne consiste pas à dessiner un nouveau logo. Ce n’est pas du design, c’est d’abord du change management. C’est amener de la clarté en interne pour lui donner une cohérence en externe. C’est repartir de zéro et créer une nouvelle religion.”
“Créer ou repenser une marque, cela ne consiste pas à dessiner un nouveau logo. Ce n’est pas du design, c’est d’abord du ‘change management’.”
Des rêves de cinéma
À 36 ans, Sydney Funck voit grand, très grand. Le CEO de Nemesis a décroché ce mois-ci le titre de “L’Entrepreneur inspirant de l’année 2025” dans un événement au nom similaire (La Nuit des Entrepreneurs inspirants, organisée au WEX de Marche-en-Famenne) et son aventure pourrait peut-être inspirer une fiction, à l’instar du film The Social Network qui retrace les débuts de Facebook, lancé par Mark Zuckerberg.
Cela tombe bien, Sydney Funck adore le cinéma, et il voulait d’ailleurs en faire son métier. Mais l’adolescent a raté l’examen d’entrée à l’IAD et s’est donc rabattu sur des études de communication à Louvain-la-Neuve. Nous sommes au début des années 2010 et le jeune homme n’a pas délaissé ses rêves de mises en scène pour autant. Durant son parcours à l’UCLouvain, qui l’a doté d’un master en relations publiques, Sydney Funck a surtout découvert l’entrepreneuriat à travers le programme de formation INEO (ex-CPME) dédié à la création d’entreprise. Sur le campus, l’étudiant a ainsi lancé sa première société, Aroe, à la fois marque de vêtements personnalisables, label de musique et organisateur de soirées festives (Les Esotériques à Louvain-la-Neuve).
“J’ai vite compris que je n’allais pas réaliser des films, mais que j’allais réaliser des projets, sourit Sydney Funck, que ce soit dans l’événementiel, le design, la musique ou d’autres formes créatives. Durant ma dernière année de master, j’ai fait un stage en relations publiques chez TBWA qui m’a plu, mais là aussi, j’ai compris que ce n’était pas pour moi et qu’il y avait surtout moyen de développer un nouveau modèle d’agence.”
Bousculer le secteur
Diplôme en poche, le jeune Brabançon ne se lance pas immédiatement dans l’aventure en solitaire et accepte en 2016 une première offre d’emploi chez Stanley/Stella, une entreprise spécialisée dans la personnalisation de vêtements durables avec laquelle il collaborait déjà à l’UCLouvain. Cette expérience dans le retail dure deux ans et nourrit davantage la réflexion de Sydney Funck sur l’importance de l’image de marque.
L’homme multiplie les contacts et les rencontres (notamment chez Apple), peaufine peu à peu sa vision personnelle du branding et lance, en 2018, La Base, son propre label de vêtements. Mais le succès textile n’est pas au rendez-vous et, secoué par le constat sans appel de sa compagne – “Pourquoi tu ne te vends pas, toi ?” – Sydney Funck revient alors à son désir originel de créer sa propre agence de branding avec deux complices, Yaël Pinchart et Johan Wouters.
En novembre 2020, Nemesis voit officiellement le jour avec l’ambition affirmée de révolutionner le secteur, portée par ce slogan : Helping brands finding clarity (Aider les marques à trouver de la clarté).
Une approche qui se veut holistique
“Contrairement aux agences de branding classiques qui, à 99%, sont portées par des designers et ne parlent qu’au département marketing de leurs clients, nous refusons cette approche réductrice pour nous adresser directement au CEO, détaille Sydney Funck. Notre approche se veut holistique et intègre le change management. Concrètement, cela veut dire qu’on rassemble tout le monde, qu’on écoute tout le monde individuellement et qu’on lit tout ce qui a été écrit sur la boîte. Cela prend beaucoup de temps, en moyenne trois à quatre mois. Mais ça permet de comprendre l’écart qu’il peut y avoir entre ce qui est vécu au sein de l’entreprise et ce qui est dit ou perçu, en interne comme en externe. Et cela justifie surtout que l’on soit trois fois plus cher que les autres agences (sourire) !”
Un brin provocateurs, les dirigeants de Nemesis n’hésitent d’ailleurs pas à ruer dans les brancards pour rebattre les cartes de l’entreprise et forcer la mise à nu du top management, en organisant notamment un “ambition dinner” (un dîner de l’ambition) au domicile du CEO “audité”. Histoire de l’inviter à se livrer davantage autour d’un bon plat préparé par Yaël Pinchart, fan de cuisine absolu…
En mode “remote”
Beaucoup plus qu’une simple opération cosmétique, ce travail de fond mené par Nemesis débouche sur des valeurs à redécouvrir, à préciser ou à définir, et forcément, sur une nouvelle identité de marque à ancrer dans le quotidien des employés. En cinq ans d’existence, l’agence a mené ses missions de “rebranding / change management” auprès d’une soixantaine de clients avec, à chaque fois, “un impact positif sur les ventes, la réputation et le recrutement”, affirme Sydney Funck, qui cite notamment l’exemple de la société de gestion de courrier GMS, devenue Sent sous leurs pinceaux, et dont le chiffre d’affaires a doublé en un an à peine grâce à cette “remise à jour”.
Établie en Région bruxelloise, Nemesis possède aussi une antenne à Dubaï depuis l’année dernière, avec cette particularité de travailler en “culture remote” (sic). Les trois cofondateurs sont belges, mais la quinzaine de collaborateurs réguliers travaillent aux quatre coins de la planète, de la Suède au Brésil, en passant par l’Italie et l’Afrique du Sud. “Notre ambition est clairement internationale, conclut le CEO, avec l’objectif de parier en priorité sur des boîtes à haut potentiel.”
Portée par un chiffre d’affaires de 1,3 million d’euros en 2024, Nemesis devrait élever ses revenus à 1,6 million cette année, avant de viser beaucoup plus haut… Si déesse le veut.
Suivez Trends-Tendances sur Facebook, Instagram, LinkedIn et Bluesky pour rester informé(e) des dernières tendances économiques, financières et entrepreneuriales.