L’acquisition ratée d’Ageas

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Sebastien Buron
Sebastien Buron Journaliste Trends-Tendances

L’échec du rachat de l’assureur britannique Direct Line pose de nombreuses questions quant à l’avenir du groupe d’assurance belge.

Raté. Le rachat de Direct Line par Ageas ne se fera finalement pas. Malgré une offre de prix alléchante le valorisant à près de 4 milliards d’euros, l’assureur britannique a rejeté les avances de son homologue belge, qui a donc décidé de jeter le gant. 

Pas grave rétorque en substance Hans De Cuyper interrogé par L’Echo : “Notre projet reste intact, assure le CEO d’Ageas. Nous avions déjà dit à l’époque que nous voulions rééquilibrer nos activités en Asie et en Europe, où nous souhaitons ajouter un troisième moteur de croissance au groupe.”

Via le rachat de Direct Line, Ageas espérait pourtant se doter d’un relais de croissance en Europe via un renforcement de ses activités outre-Manche et l’intégration d’un acteur important sur le marché de l’auto. Avec comme objectif de “construire le premier assureur non-vie du Royaume-Uni”, mentionne Hans De Cuyper.

Opération insensée

Qualifiée par certains de totalement insensée, la tentative avortée du rachat de Direct Line suscite pas mal d’incompréhension de la part des observateurs. Pourquoi ? D’abord parce que celle-ci ne semblait guère plaire au Chinois Fosun, premier actionnaire d’Ageas avec 10 % du capital, qui se serait montré réticent quant à son opportunité. De nature à couper le fil conducteur avec l’Etat chinois, l’opération n’aurait pas non plus été sans conséquence pour la SFPI (Société fédérale de participations et d’investissement) qui, en rachetant début 2022 à l’assureur chinois Ping An les 6,3 % qu’il détenait dans Ageas, est entrée au capital du premier assureur du pays. Et ce, à la demande d’ailleurs du management pour apporter un ancrage belge à la société. Or, avec le rachat de Direct Line, la SFPI se serait vue diluée à l’issue de l’opération, celle-ci se faisant pour partie en cash pour partie via l’émission de nouvelles actions. Une opération dont on peut par ailleurs s’interroger quant à son bien-fondé, dans la mesure où elle visait à racheter un acteur qui affiche de mauvais résultats sur un marché ultra-concurrentiel, soulignent les analystes. 

Bouleversements à venir

Si le dossier Direct Line est désormais clos, il est clair que l’avenir Ageas l’est nettement moins. Plusieurs questions se posent en effet quant au futur de la maison mère d’AG Insurance. Quid d’abord de la gouvernance ? Certains évoquent un entre-soi où le management emmené par Hans De Cuyper et le président du Conseil d’administration Bart De Smet auraient tout à dire au sein des organes de décision. Il faut savoir en effet que Fosun et la SFPI, qui serait dit-on folle de rage, ne disposent d’aucun représentant au sein du CA. Les choses vont-elles changer ? Ce n’est pas impossible vu l’acte posé par Ageas alors que le groupe est non seulement un gros employeur en Belgique mais aussi un gros preneur d’obligations de l’Etat belge.

Quid enfin de l’actionnariat ? On le sait, Ageas fait ces derniers temps l’objet de spéculations en sens divers quant à de grandes manœuvres. Selon Bloomberg, le groupe bancaire français BNP Paribas lorgnerait la participation d’environ 10 % détenue par Fosun, qui voudrait vendre ses parts, parce qu’il aurait aussi paraît-il des doutes quant au modèle déployé par Ageas. 

Par ailleurs, le nom d’Ageas fait également l’objet de rumeurs d’OPA, notamment de la part de l’assureur italien Generali mais aussi du consortium d’investisseurs BE Group. Le rachat de Direct Line était-il dès lors un mouvement défensif visant à contrer un éventuel rachat hostile ? Seule certitude : l’épisode Direct Line ne sera pas sans conséquence à long terme sur d’autres variables du premier assureur du pays.

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