Inno, la fin d’un modèle vieux de 125 ans ?

© BELGA

Le magasin multimarques Inno a placé la moitié de son personnel en chômage temporaire. Les raisons invoquées sont la guerre en Ukraine et la pandémie, mais d’autres difficultés structurelles se cachent derrière cette décision.

La chaîne de magasins multimarques Inno a annoncé la semaine dernière avoir mis au chômage la moitié de son personnel – le groupe compte un peu plus de 1000 salariés – à travers son réseau de 16 magasins belges. La mesure court jusque la fin juin comme le permettent les mesures gouvernementales prises pour faire face à la crise sanitaire.

“Depuis lundi, 50% du personnel de vente essentiellement (hors hôtesses des marques) est donc confronté à ce chômage temporaire. Côté cadres, chefs de rayon, premières vendeuses, le chômage temporaire frappe 25% et même les directeurs y sont soumis“, explique Ghislaine Marie, déléguée CNE Liège à la RTBF. Cette mesure frappe les 16 magasins du groupe et la centrale. A Liège, ce chômage temporaire de plusieurs mois touche une soixantaine de personnes.

L’entreprise invoque la crise sanitaire et la guerre en Ukraine, mais aussi la mobilité dans les centres urbains. A Liège notamment les travaux du tram posent des difficultés d’accès au centre-ville. Le report vers les centres commerciaux de périphérie a également fait changer les habitudes des consommateurs. Ces derniers fréquentent moins souvent les grandes artères commerçantes et réduisent leurs dépenses pour faire face à la flambée des coûts de l’énergie. Tout cela pèse sur les ventes et le chiffre d’affaires du groupe allemand Kaufhof à qui le groupe belge GB Inno a cédé la chaîne en 2001.

Dans les centres-villes, nous constatons que les gens restent à l’écart à cause du Covid. Ils évitent toujours de s’asseoir trop près les uns des autres. À cela s’ajoutent l’inflation et la hausse des prix de l’énergie, qui rendent les consommateurs plus prudents dans leur comportement d’achat”, explique Martine Baetslé, responsable de la communication externe au magazine spécialisé Gondola.

Guerre en Ukraine, crise Covid mais pas que…

Selon les observateurs du secteur, la crise du covid et la guerre en Ukraine ne sont qu’une partie de l’explication des difficultés que rencontre l’entreprise. Inno a complètement raté le train de l’e-commerce. Comme l’explique le journal économique L’Echo, la chaine a ouvert et fermé à deux reprises son site web, le relançant l’an dernier pour la troisième fois. En 2020, quand la pandémie a paralysé tout le secteur et poussé les consommateurs à acheter massivement en ligne, elle était dépourvue d’une offre en ligne digne de ce nom.

Autre problématique : Inno cherche à se réinventer depuis des années. Le magasin multimarques a une image vieillissante, au positionnement flou, entre marques accessibles et plus haut de gamme. Elle n’arrive pas à attirer la jeune génération des 18-24 ans davantage attirée par les enseignes de fast fashion comme H&M ou les webshops tel que Zalando ou Shein.

Consciente de ses lacunes, Inno a profité de la crise pour relooker certains de ses magasins sur un nouveau concept dans lequel on trouve plusieurs univers différents, chacun avec sa propre atmosphère, en plus d’autres services. À Liège, Anvers et Bruxelles, par exemple, on trouve du café, des smoothies frais et des jus de fruits, rapporte Gondola Magazine.

Reste que niveau financier, les résultats du groupe ne sont pas des plus encourageants. Entre 1974 et 1997, Inno n’a été bénéficiaire qu’une seule année, rapporte L’Echo. La situation financière ne s’est guère améliorée depuis que le groupe belge GB Inno a cédé à la chaîne au groupe allemand Kaufhof en 2001. Après la crise financière de 2008, qui a vu Inno plonger dans le rouge à nouveau, les exercices oscillent entre bénéfices et pertes, commente le journal francophone. L’an dernier, la chaîne était même sur le point de fermer son magasin à Hasselt, avant d’y renoncer.

Malgré ce climat morose, tout le personnel sera remis au travail pour fêter les 125 ans du groupe la semaine du 2 mai. Un anniversaire qui aura certainement un gout un peu amer.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content