Google: la Commission européenne plie devant les menaces américaines

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Pierre-Henri Thomas
Pierre-Henri Thomas Journaliste

Maroš Šefčovič, le commissaire européen au Commerce, a bloqué l’amende que Google aurait dû se voir imposer lundi par l’Europe pour avoir faussé la concurrence dans le marché publicitaire après une enquête de quatre ans.

Selon le site spécialisé MLex, une sanction antitrust de l’Union européenne contre Google, qui devait être adoptée ce lundi et qui concernait des pratiques abusives dans le secteur de la publicité en ligne (adtech), a été suspendue à la dernière minute. Cette intervention est attribuée à l’opposition du commissaire européen slovaque au Commerce, Maroš Šefčovič, qui a bloqué la décision de la commissaire à la Concurrence, Teresa Ribera. Le cabinet de la Présidente de la Commission, Ursula von der Leyen, aurait également appuyé sur le frein. Andreas Schwab, député européen allemand du Parti populaire européen (PPE, centre-droit), affirme en effet que l’amende est « bloquée » par le cabinet de la présidente depuis le mois de mai.

Andreas Schwab ajoute que  « la Commission européenne doit appliquer les règles de concurrence de manière indépendante de toute pression politique ».  Cela ne semble pas avoir été le cas : le commissaire slovaque aurait agi en coordination avec des pressions émanant du Département de la Justice américain (DOJ), qui avait demandé un report pour éviter d’aggraver les négociations commerciales, notamment sur les tarifs douaniers.

Pressions grandissantes

« Cette décision de surseoir à une sanction contre Google intervient alors que les craintes grandissent en Europe face à l’intensification des pressions de Trump, après la conclusion en juillet d’un accord commercial déséquilibré, explique de son côté le site Politico. Donald Trump menace en effet d’« imposer des droits de douane supplémentaires substantiels » et de cesser de vendre des technologies et des puces aux pays dont les règles numériques sont jugées discriminatoires à l’égard des entreprises américaines. »

L’enquête de la Commission européenne porte sur des soupçons de conflit d’intérêts de Google dans la chaîne de la publicité en ligne, initiée en 2021. La sanction, qui aurait été la première grande amende pour abus de domination contre une entreprise tech américaine sous la direction de Teresa Ribera, n’est pas abandonnée, mais il n’y a pas de date de reprise claire de l’enquête. Interrogé mardi, un porte-parole de la Commission a indiqué que « l’enquête est toujours en cours ».

La justice américaine, elle, continue

Le plus paradoxal dans cette affaire est que Google fait l’objet de poursuite aux États-Unis pour les mêmes motifs. Le Département américain de la Justice (DOJ, avec plusieurs États américains, a accusé Google d’abuser de sa position dominante dans la recherche en ligne en concluant des accords exclusifs avec des fabricants de smartphones (comme Apple) pour faire de son moteur de recherche la valeur par défaut. Un juge fédéral avait statué l’an dernier que Google avait enfreint la loi antitrust, qualifiant son comportement de monopolistique.

La justice est aujourd’hui en train d’examiner quelles sanctions elle imposera. Par ailleurs, dans le cas qui préoccupe les autorités européennes, à savoir la publicité en ligne, le DOJ a également déposé une plainte contre Google pour son contrôle du marché de la publicité numérique et de l’utilisation par Google de sa position dominante pour étouffer la concurrence. Ce procès est soutenu par plusieurs États américains et il est toujours en cours.

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