Eric Georges (Club Med): “Les Belges nous font confiance pour voyager à nouveau”
Eric Georges, directeur général du Club Med Benelux, aborde pour Trends Tendances les conséquences de la crise sanitaire sur le premier fournisseur de vacances haut de gamme “tout compris”, les nouvelles habitudes de voyage des Belges et les défis pour les prochaines saisons à venir sur lesquelles planera encore l’ombre du Covid-19.
Quel bilan dressez-vous de ces derniers mois marqués par la crise sanitaire?
Le bilan pour le premier semestre 2021 est clairement mauvais pour la période hivernale. Les raisons sont claires : aucun de nos 14 resorts dans les Alpes françaises n’a pu ouvrir, car les remontées mécaniques étaient fermées sur ordre du Gouvernement français. Une première dans l’histoire du Clud Med ! Alors que début 2020, on avait encore pu accueillir nos clients quelques mois – de décembre à début mars – avant que la pandémie ne survienne. Seul notre resort de Saint Moritz en Suisse a pu accueillir des vacanciers. Le manque à gagner en chiffre d’affaires s’élève à 260 millions d’euros sur le premier semestre. L’aide de l’État français compensant à hauteur de 10 millions. Au printemps, la situation s’est un peu améliorée, avec la réouverture en mai et juin de quelques resorts au soleil. Cet été était beaucoup plus réjouissant, on a pu accueillir à nouveau les vacanciers dans 41 resorts sur 51 que compte notre réseau. On a atteint la full capacité mais avec 30% de capacité en moins.
Le bilan pour le premier semestre 2021 est clairement mauvais pour la période hivernale. Les raisons sont claires : aucun de nos 14 resorts dans les Alpes françaises n’a pu ouvrir
Des resorts sont-ils encore fermés à l’heure actuelle ?
Aux Antilles, la situation sanitaire est toujours délicate et nous ne pouvons pas encore rouvrir pour le moment, mais nous prévoyons l’ouverture le 23 octobre.
De quoi mettre à mal le Clud Med ?
Non, car nous avons les reins solides. Avec notre actionnaire chinois principal Fosun, nous sommes entrés dans la crise en très bonne santé financière, avec une structure saine. Cela nous permet, malgré les pertes financières, de bien nous en sortir, grâce notamment à notre stratégie de montée en gamme.
Vous êtes responsable du Benelux. Les habitudes des Belges, ont-elles évolué depuis la crise ?
La France reste la destination numéro un des Belges. Cet été, nos destinations à la montagne ont eu un énorme succès. En seconde place, on trouve la Sicile, avec notre club de Cefalú, et ensuite, la Turquie alors que géopolitiquement, on pensait que cette destination aurait été moins prisée. On sent que nos clients ont besoin de grand espace, de reconnexion avec la nature, entre amis ou en famille, avec des groupes intergénérationnels, sur un mode de vie saine. Nous observons que c’est plus qu’une tendance, ce type de vacances s’ancre dans les habitudes des Belges depuis deux saisons déjà.
Une autre tendance qui se dégage, et c’est assez nouveau, ce sont les réservations qui se font de plus en plus en last minute. On a pour le moment beaucoup de demandes pour la fin du mois de septembre, début octobre. On sent que les gens ont besoin de changer d’air, non seulement suite au confinement, mais aussi vu la météo maussade de cet été en Belgique.
On sent que nos clients ont besoin de grand espace, de reconnexion avec la nature, entre amis ou en famille, sur un mode de vie saine.
Vous sentez que vos clients sont plus confiants pour voyager ?
Oui, les réservations reprennent, que ce soit pour les vacances au ski ou au soleil. Le taux de réservation des Belges est revenu à celui d’avant crise. Nos clients fidèles sont aussi en confiance, car ils savent comment vont se passer leurs vacances, que nous avons une politique de prévention du Covid efficace et renforcée dans nos resorts: les horaires des restaurants sont élargis, il n’y a plus de grand buffet, nous multiplions les animations et les activités à plusieurs endroits pour que moins de personnes se regroupent. Nous avons aussi une politique d’annulation de dernière minute flexible en cas de soucis liés au Covid.
Vous continuez à investir, notamment dans des stations de ski. Est-ce encore défendable à l’heure du réchauffement climatique ?
Oui, nous misons sur les stations de ski à l’avenir. Nous inaugurons d’ailleurs cet hiver un nouveau resort à La Rosière dans les Alpes françaises, à la frontière avec l’Italie ainsi qu’au Québec, à Charlevoix en décembre. En 2022, un nouveau club verra le jour à Tignes. Le respect de l’environnement a toujours fait partie de l’esprit du Club Med. La nature est au coeur de l’ADN du groupe depuis sa création par le Belge Gérard Blitz, il y a 70 ans. Nous avons des normes de qualité durables strictes et nous participons dans les stations au développement de l’économie locale.
On espère que la prochaine saison de ski sera la plus “normale” possible, mais on se pose quand même des questions. La crise sanitaire va encore jouer un rôle
Toutes les constructions de nos nouveaux resorts sont certifiées BREEAM (un label indépendant d’écoconstruction reconnu à l’international, NDLR). Pour l’exploitation au quotidien, nous adoptons aussi le label Green Globe (une autre certification qui récompense les professionnels du tourisme pour leurs efforts durables dans la gestion environnementale et sociale de leurs activités, NDLR).
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Les stations de ski restent une valeur sûre sur le long terme. On observe aussi un changement dans les habitudes des vacanciers. Ils ne skient plus du matin au soir, mais diversifient leurs activités en faisant des balades, des activités de découverte de la nature… On voit notre clientèle évoluer et nous misons beaucoup là-dessus. On a d’ailleurs profité de cet été pour rénover le club de montagne à Peisey-Vallandry ouvert en hiver comme en été.
Outre l’offre hivernale, nous avons lancé un nouveau resort eco-chic aux Seychelles au printemps dernier. En mai 2022, nous ouvrirons un club à Marbella et nous continuons à développer notre offre en Chine.
Comment envisagez-vous la prochaine saison de ski, à l’international ?
On espère qu’elle sera la plus “normale” possible, mais on se pose quand même des questions. La crise sanitaire va encore jouer un rôle. Notre clientèle des stations de ski est à 30% française, on ne s’inquiète pas pour elle, mais plutôt pour les voyageurs étrangers qui viennent de Grande-Bretagne, par exemple. Ce qui fait notre spécificité, c’est le mélange des cultures dans nos clubs. Nous avons aussi beaucoup de clients originaires du Brésil : pourront-ils prendre l’avion pour venir en France cet hiver ? Nous espérons aussi que les voies aériennes pour le Québec resteront rouvertes aux touristes étrangers pour notre lancement en décembre à Charlevoix. Mais cela semble aller dans la bonne voie après la réouverture des liaisons entre l’Europe et les Etats-Unis prévues début novembre. Mais il y a quand même encore beaucoup d’inconnues. Nous ouvrons, par ailleurs, les réservations pour l’été 2022 à la mi-octobre, on y verra déjà un peu plus clair à ce moment-là.
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