La fin anticipée de l’exemption “de minimis” (les petits colis ) aux États-Unis rebat les cartes du commerce international : plateformes d’e-commerce, logisticiens et détaillants doivent absorber de nouveaux coûts douaniers et réorganiser leurs flux en urgence. Une décision qui pourrait peser sur les marges, renchérir les prix et redistribuer les parts de marché dans un secteur déjà sous pression.
L’exemption dite « de minimis », ou « la règle des petits colis », en vigueur depuis près d’une décennie, a pris fin à travers le monde vendredi dernier. Cette règle permettait jusqu’ici aux colis d’une valeur inférieure à 800 dollars d’entrer sur le territoire américain sans droits de douane et avec des contrôles allégés. Conçue pour simplifier le commerce en ligne, elle facilitait les envois transfrontaliers pour les petites entreprises et accélérait les livraisons aux consommateurs.
Un chaos mondial
La suppression de cette mesure a été décidée par décret présidentiel. Donald Trump la qualifie de « faille catastrophique » utilisée pour faire entrer des produits non conformes et sous-tarifés. En mai, il avait déjà supprimé l’exemption pour les marchandises en provenance de Chine et de Hong Kong, avant de l’étendre fin juillet à tous les pays, avec deux ans d’avance sur le calendrier prévu par le Congrès. Résultat : les entreprises, les douanes et les services postaux ont dû s’adapter en urgence.
« La fin de cette règle des moins de 800 dollars par personne et par jour va probablement provoquer un certain chaos à l’échelle mondiale. Il y a des implications financières, opérationnelles et de conformité. Jusqu’ici, ces entrées étaient quasi informelles. Personne ne les suivait vraiment », explique Lynlee Brown, partenaire chez EY, citée par CNBC.
Chaînes logistiques et marges bousculées pour les petits colis
Le changement soudain a déjà perturbé les chaînes logistiques mondiales. Plusieurs services postaux ont même suspendu temporairement leurs envois vers les États-Unis pour se mettre en conformité. C’est le cas notamment de bpost.
Pour les détaillants, de Shein et Temu aux maisons de luxe, la suppression de l’exemption implique désormais de payer des droits pouvant atteindre 30 % sur des produits jusque-là exemptés, explique CNBC. Les petites entreprises vendant via Etsy, eBay ou Shopify perdent donc un outil clé qui leur permettait de rester compétitives.
Selon CNBC, avant cette suppression, les douanes américaines traitaient plus de 4 millions de colis “de minimis” par jour, soit une explosion par rapport aux 134 millions d’envois enregistrés en 2015. Cette simplification administrative avait dopé le commerce électronique transfrontalier mais avait aussi facilité l’entrée de marchandises contrefaites, de produits dangereux et, selon l’administration américaine, de fentanyl et autres opioïdes synthétiques, avance le site du média américain.
Impact pour les consommateurs
Pour les acheteurs américains, la fin de l’exemption pourrait se traduire par des prix plus élevés et des délais de livraison rallongés. Certaines entreprises choisissent de payer les droits en amont — ce qui a comme effet d’augmenter le prix final — tandis que d’autres les laissent à la charge du client au moment de la livraison, ce qui pourrait décourager l’achat. Les consommateurs, déjà confrontés à l’inflation et aux taux d’intérêt élevés, risquent donc de voir la facture grimper sur une large gamme de produits.
Et en Belgique ?
Contrairement aux États-Unis, la fin de l’exemption « de minimis » n’a pas d’effet direct sur les importations en Belgique. En Europe, le régime a en effet déjà été durci : l’exonération de TVA pour les petits envois (jusqu’à 22 €) a été supprimée en juillet 2021. Désormais, tous les colis importés depuis un pays tiers, quel que soit leur montant, sont soumis à la TVA. Les droits de douane, en revanche, ne s’appliquent qu’aux envois d’une valeur supérieure à 150 €.
En pratique, cela signifie que les consommateurs belges sont déjà confrontés à un surcoût sur les petits colis importés, sous forme de TVA et de frais de traitement. La suppression de l’exemption américaine pourrait néanmoins avoir un impact indirect : pour les e-commerçants belges qui exportent vers les États-Unis, les coûts d’expédition risquent de grimper. Leurs produits seront alors moins compétitifs sur ce marché.