Deux heures gagnées, zéro valeur ajoutée : le paradoxe de l’IA au bureau

Caroline Lallemand

Les travailleurs belges économisent 108 minutes quotidiennes grâce à l’intelligence artificielle, mais ce gain de temps ne profite pas toujours aux entreprises. Un paradoxe révélateur selon le dernier rapport de The Adecco Group.

C’est l’un des paradoxes les plus frappants de la révolution IA. Les travailleurs belges affirment gagner près de deux heures par jour grâce aux outils d’intelligence artificielle, mais ce temps libéré ne se transforme pas toujours en valeur ajoutée pour leur entreprise. Un écart troublant entre perception et réalité qui interroge sur l’utilisation concrète de ces gains de productivité.

Le grand malentendu de la productivité

Selon le rapport annuel the Global Workforce of the Future, intitulé Humanity at work : How to thrive in the AI era d’Adecco Group auprès de 37.500 travailleurs dans 31 pays, dont 475 en Belgique, le constat est sans appel : une part importante des employés belges consacre ce temps gagné à des tâches identiques ou de moindre valeur. Plus révélateur encore, seuls 24% d’entre eux peuvent mesurer l’impact réel de leurs nouvelles activités sur les résultats de l’entreprise (contre 33% à l’échelle mondiale).

“La technologie seule ne suffit pas pour réaliser le changement”, souligne Jan Dekeyser, Country President Belgium chez The Adecco Group. “Pour traduire l’efficacité en un impact réel sur l’entreprise, les organisations doivent investir dans la formation, l’engagement et la confiance”, avance-t-il.

Un optimisme prudent face à l’IA

Malgré ce décalage, les travailleurs belges affichent un optimisme certain : 71% pensent que l’IA créera davantage d’emplois. 78% voient leurs tâches évoluer positivement grâce à cette technologie. Un enthousiasme tempéré toutefois par une inquiétude persistante : 18% craignent de perdre leur emploi.

L’adoption s’accélère. 63% des Belges s’attendent à ce que leur employeur intègre des agents d’IA dans leur flux de travail au cours des 12 prochains mois. Pourtant, seuls 21% déclarent être impliqués dans la refonte des tâches influencées par l’IA. Ce chiffre est nettement inférieur à la moyenne mondiale de 30%.

Le sens du travail, nouvelle arme de rétention

Au-delà de la technologie, l’étude révèle un levier de fidélisation puissant : le sens du travail. 99% des employés qui se sentent utiles quotidiennement prévoient de rester dans leur entreprise dans les 12 prochains mois, contre seulement 53% pour ceux qui n’ont jamais ce sentiment.

En Belgique, 41% des travailleurs se sentent très motivés chaque jour par le sens de leur travail. Pour renforcer ce sentiment, ils réclament avant tout une meilleure compréhension de la stratégie globale de l’entreprise et de leur contribution à celle-ci.

Le développement de carrière gagne également en importance : un travailleur sur trois affirme qu’il resterait chez son employeur si des possibilités d’évolution claires lui étaient offertes, contre 22% l’année dernière.

“L’adoption de l’IA n’est plus une option, mais une nécessité stratégique”, conclut Jan Dekeyser. “Seules les organisations qui investissent dans une gouvernance transparente, des cadres éthiques et une formation continue permanente atteindront une croissance durable de leur productivité et conserveront la confiance de leurs travailleurs.”

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