La croissance de Deloitte Belgique fait face à des vents contraires : “Notre activité est le reflet de l’économie”

DEN HAAG - Kantoor Deloitte .ANP/ Hollandse Hoogte / Laurens van Putten
Alain Mouton Journaliste chez Trends  

Le chiffre d’affaires de Deloitte Belgique s’est établi à 822,2 millions d’euros pour l’exercice 2024-2025, soit une croissance de 0,3 %. Cette progression est principalement due aux services réglementés tels que l’audit, l’assurance et le conseil fiscal et juridique. Les activités de consultance, en revanche, sont restées stables ou ont connu une légère contraction. Les tensions géopolitiques et les discussions tarifaires pèsent sur les entreprises. “Notre activité est le reflet de l’économie”, déclare Rolf Driesen, CEO de Deloitte Belgique.

Lors de la présentation des résultats de l’exercice financier 2025 (de juin 2024 à mai 2025) du cabinet de conseil Deloitte Belgique, la différence avec l’exercice 2024 saute immédiatement aux yeux. À l’époque, l’acteur du Big Four enregistrait encore une croissance de 4,4 %. Aujourd’hui, elle s’élève à 0,3 %, portant le chiffre d’affaires de 819,4 à 822,2 millions d’euros. L’évolution de la croissance varie toutefois fortement selon le type d’activité.

Les trois activités

L’Audit & Assurance, soit le contrôle obligatoire des comptes annuels et de la comptabilité des entreprises, continue de croître fortement. Le chiffre d’affaires atteint 89,6 millions d’euros, en hausse par rapport à l’an dernier. Deloitte gagne des parts de marché sur ce marché, le nombre de mandats auprès de grands clients augmentant à nouveau.

Les services d’assurance, dont fait partie le reporting (la certification des rapports, ndlr), ont enregistré la plus forte croissance. Rolf Driesen, CEO : “Les facteurs de marché qui ont joué un rôle à cet égard ont été la première vague d’assurance CSRD (une évaluation externe des rapports de durabilité d’une entreprise par un expert-comptable, ndlr), mais nous avons gagné des parts de marché dans l’ensemble des services d’assurance : outre la durabilité, nous avons également réalisé des tâches complexes de comptabilité et de reporting. Comme l’assurance des contrôles technologiques (technology controls assurance), qui garantit que les systèmes informatiques répondent aux exigences de sécurité et de conformité. »

Le département Tax & Legal a réalisé un chiffre d’affaires de 341,9 millions d’euros. “L’incertitude croissante autour de la réglementation, l’émergence de l’intelligence artificielle et la complexité fiscale entraînent une demande croissante pour ces services”, explique Driesen. “La demande se déplace du conseil stratégique et technologique vers le soutien fiscal et réglementaire, notamment en matière de droits à l’exportation et d’imposition des plus-values.”

LIRE AUSSI | L’IA va-t-elle tuer les consultants ?

La consultance sous pression

Les activités de consultance présentent un autre tableau. Dans les activités de conseil, la demande a diminué dans Strategy, Risk & Transactions Advisory, tandis que Technology & Transformation est resté plutôt stable. Driesen voit plusieurs causes à cela. “Nous avons traditionnellement réalisé de nombreuses missions de gestion des risques pour les banques et les compagnies d’assurances. Ce besoin est aujourd’hui moindre. À cela s’ajoute le fait que Deloitte a repris des mandats d’audit dans le secteur financier, ce qui nous fait passer du rôle de conseiller à celui d’auditeur. Il est interdit d’exercer ces deux fonctions auprès d’une même entreprise. Dans le secteur public, il y a eu moins de missions de conseil, car il n’y a toujours pas de gouvernement à Bruxelles. Et ce n’est que depuis le début de cette année que nous disposons d’un gouvernement fédéral doté de pleines compétences.”

En outre, l’incertitude géopolitique en Europe, ainsi que la crainte de guerres commerciales, pèse sur les entreprises. “Notre activité est le reflet de l’économie en Belgique”, constate Driesen. “La majorité de nos clients adoptent une attitude attentiste et reportent des projets et investissements importants. Je comprends parfaitement leur position : la stabilité et la prévisibilité font totalement défaut. Un exemple, les discussions persistantes sur les droits d’importation rendent difficile la mise en œuvre d’une politique stratégique.”

Rolf Driesen ne cède toutefois pas au pessimisme. “Des chiffres récents montrent que la confiance des entrepreneurs augmente lentement. Bien que l’économie soit confrontée à de nombreuses incertitudes, nous observons aussi des signes de résilience”, souligne-t-il.

“Les tendances structurelles comme la numérisation et la durabilité exigent une reconfiguration stratégique. La biotechnologie reste une réussite en Belgique. Parallèlement, nous constatons que les entreprises familiales continuent d’investir grâce à leur vision à long terme.”

LIRE AUSSI | Facturer du temps n’a plus de sens, c’est la fin des marges “faciles” pour les consultants

L’accent sur les entreprises familiales

Deloitte, toujours numéro un du Big Four en Belgique, en récolte également les fruits. Cela se reflète dans la croissance de la branche Deloitte Private, qui se concentre sur les entreprises familiales et les sociétés en croissance. Cela va du conseil fiscal à la planification successorale, en passant par la fonction de family office.

“Depuis son lancement mondial en 2016, Deloitte Private est devenue une activité mature et intégrée”, conclut Rolf Driesen. En 2023, cette branche représentait 168 millions d’euros, soit 21 % du chiffre d’affaires. Aujourd’hui, Deloitte Private représente avec 198 millions d’euros près d’un quart du chiffre d’affaires en Belgique.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Expertise Partenaire