Comment doomoo a amortit le choc de la crise
En 15 années d’existence, la marque wallonne de produits de couchage pour bébés est parvenue à se faire une place dans un secteur de plus en plus concurrentiel. Malgré la crise, ses responsables espèrent enregistrer cette année un chiffre d’affaires stable, voire en légère croissance. Voici les recettes de la résilience.
C’est l’événement qui rythme la vie de la PME wallonne Delta Diffusion, propriétaire de la marque doomoo spécialisée dans le confort du bébé. Chaque année, fin septembre, son patron Philippe Teurlings se rend au Kind+ Jugend de Cologne, la grand-messe de la puériculture. Ce salon lui permet de nouer des contacts avec de nouveaux clients potentiels, de s’inspirer des nouveautés du marché mais surtout de rencontrer ses différents partenaires distributeurs à travers le monde pour leur présenter ses dernières innovations.
Cette année, cependant, il va bien falloir s’y prendre autrement. Car le salon a tout bonnement été annulé, crise du Covid-19 oblige. Mais le responsable ne se montre pas plus inquiet que cela. ” Nous avons prévu des vidéoconférences “, lâche-t-il.
Nous sommes présents dans des pays qui ont continué à bien fonctionner.” – Philippe Teurlings, CEO de Delta Diffusion.
C’est donc en ligne que Philippe Teurlings présentera à ses partenaires internationaux sa dernière grande innovation, “la plus grande depuis des années” à l’en croire. Quinze ans après sa création, l’entreprise lance en effet en cette rentrée la troisième génération de son célèbre pouf ovoïde, dont la base modulable lui permet désormais de se transformer en balancelle. Nom de code : Seat’n Swing.
L’innovation, encore et encore, c’est justement l’une des clés du succès de cette petite entreprise brabançonne. “Il y a une telle compétition sur le marché qu’il faut absolument se différencier, assure le patron. La précédente version de notre pouf avait été pas mal concurrencée. Nous avons donc aujourd’hui décidé de breveter cette plaque modulable.”
Construire une marque
Comment cette petite entreprise belge est-elle parvenue à se faire un nom parmi les géants du secteur ? Tout commence en 1990. Philippe et Pierre Teurlings reprennent alors la société de leur père, qui distribuait les célèbres poussettes Maclaren. “Nous ne souhaitions plus être distributeurs, nous voulions fabriquer nos propres produits”, explique notre interlocuteur. Les deux frères en lanceront plusieurs, au départ sans marque spécifique.
Ce n’est qu’en 2005 qu’ils décident de créer la maque doomoo et de mettre sur le marché une première version de leur pouf. Alors que ce dernier connaît un énorme succès, la famille (de produits) s’agrandit. La PME commercialise aujourd’hui une trentaine d’articles, essentiellement des produits de couchage mais aussi pour le bain, des accessoires de voyage et des coussins d’allaitement. Tous labellisés doomoo.
“Il était très important pour nous de créer une marque qui puisse être reconnue dans un marché de plus en plus concurrentiel, explique Philippe Teurlings. Au départ, nous misions tout sur les produits. Ils se vendaient sans effort. Ce n’est clairement plus possible aujourd’hui. Alors qu’avant, la communication vers les jeunes parents se faisait en magasin, nos clients savent aujourd’hui pertinemment bien ce qu’ils recherchent lorsqu’ils arrivent dans un point de vente. Le choix est déjà fait. Il est donc primordial de construire en ligne une marque qui les inspire.”
La PME travaille depuis huit ans avec l’atelier anversois de design Absintt, qui l’aide aussi bien pour la communication sur les réseaux sociaux que pour le développement de nouveaux produits. Des produits qui sont essentiellement fabriqués à l’étranger (en Chine et en Turquie) mais aussi en Belgique. A Menin, plus précisément, en Flandre-Occidentale, où l’entreprise a noué un partenariat avec un atelier protégé. “Nous avons investi dans les machines et eux nous fournissent la main-d’oeuvre, précise Philippe Teurlings. Nous disposons d’un entrepôt juste à côté dans lequel transitent tous nos produits.”
Cette manière de procéder a permis à la pépite wallonne d’être très réactive pendant le confinement. ” ‘atelier protégé a pu continuer à travailler, explique notre interlocuteur. Il avait obtenu une dérogation pour la fabrication de masques pour la Région flamande, ce qui nous a permis de continuer à produire.”
70% du chiffre d’affaires à l’exportation
Certes, avec les fermetures des magasins, l’entreprise a bien vu son chiffre d’affaires baisser au plus fort de la crise. Mais à en croire son responsable, la situation aurait pu être bien pire. Philippe Teurlings table d’ailleurs cette année sur un chiffre d’affaires stable par rapport à l’an dernier, à 8 millions d’euros. Des revenus qui pourraient même être en légère croissance. Cette résilience s’explique par plusieurs facteurs. “Nous n’avons pas trop souffert car nous exportons beaucoup”, explique notre interlocuteur. La PME écoule en effet ses produits dans une trentaine de pays, essentiellement en Europe, mais aussi dans le Golfe et en Extrême-Orient (Hong Kong, Taïwan, Singapour). Elle enregistre 70% de son chiffre d’affaires en dehors du Benelux.
“Nous sommes présents dans des pays qui ont continué à bien fonctionner, explique le responsable. C’est notamment le cas des pays scandinaves dans lesquels nous sommes assez forts, et du Golfe où l’e-commerce est très développé.” Le commerce en ligne, c’est justement le second facteur qui explique la relative résilience de l’entreprise pendant cette période mouvementée. “Beaucoup de magasins ont profité de la crise pour développer leur e-commerce et ont bien vendu par ce canal.”
La marque ne possède pas son propre webshop – “ce n’est pas notre métier”, affirme Philippe Teurlings – mais la plupart de ses clients, eux, vendent en ligne. Doomoo est à la fois disponible dans les magasins spécialisés, chez les petits indépendants et sur les plateformes Bol.com et Amazon, qui ont cartonné pendant le semaines de confinement.
Multiplier les clients
Depuis juin, les affaires sont reparties de plus belle pour la PME. Mais son CEO ne se fait pas d’illusions quant aux faillites qui pourraient se multiplier parmi ses clients. “Beaucoup de petits indépendants ont déjà dû fermer, et il va encore y en avoir”, regrette Philippe Teurlings. Parmi les grandes chaînes, on notera aussi les déboires d’Orchestra Prémaman qui a réduit de manière drastique son parc de magasins en Belgique. C’est la raison pour laquelle il est si important pour la petite entreprise de multiplier les clients et d’encore s’étendre à l’étranger. “Notre marché est potentiellement mondial, se réjouit le patron. Dans les pays de l’Est, nous pourrions être davantage présents. Tout comme en Afrique, où nous avons déjà mis un pied via le Maroc. Le tout est évidemment de trouver les bons partenaires.”
En chiffres
- 6 millions d’euros de chiffre d’affaires (70% hors Benelux)
- 9collaborateur
- Une présence dans 30 pays
- Environ 30 produits
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